Algues vertes : des déchets qui suscitent la polémique...
Alors que débute la triste saison de prolifération des algues vertes sur les plages bretonnes, ça barde du côté de l’UFC-Que Choisir : l'association vient de réagir à la récente publication d’un rapport officiel ("Bilan des connaissances scientifiques sur les causes de prolifération de macroalgues vertes - Application à la situation de la Bretagne et propositions") et décerne un carton rouge à l’agriculture intensive. En effet, cette étude épingle les agriculteurs comme étant responsables de ces "marées vertes" et demande aux pouvoirs publics nationaux et européens des mesures ambitieuses pour juguler ce fléau environnemental et économique...
"Après l’avoir gardé sous le boisseau pendant 2 mois, les Ministères de l’Environnement et de l’Agriculture viennent de publier en catimini un rapport accablant sur les responsabilités de l’agriculture intensive dans le développement des algues vertes en Bretagne", indique l’UFC-Que Choisir. Commandité par l’Etat suite aux contestations des professionnels agricoles d’une précédente publication de l’Ifremer les mettant en cause, cette nouvelle étude enfonce le clou. Ainsi, contrairement à ce que prétendent les tenants de l’agriculture intensive, ce ne sont ni les évolutions du climat ni de nouvelles espèces invasives qui expliquent les proliférations d’algues vertes, car celles-ci sont bel et bien dues à la présence massive d’azote et de phosphore dans l’eau de mer.
Pour ce qui est du phosphore, les sédiments marins ayant été saturés par des décennies de rejets excessifs, sa présence dans les eaux devrait malheureusement perdurer pendant de nombreuses années. Le seul levier d’action disponible consiste à limiter le flux d’azote apporté par les rivières bretonnes qui continuent à charrier des quantités colossales de nitrates : 75 000 tonnes par an. Or, 90% de ces nitrates sont dus aux agriculteurs qui apportent des doses exagérées d’engrais. "Faut-il rappeler qu’au-delà de l’impact environnemental les algues vertes induisent un préjudice économique important pour la collectivité notamment en raison des coûts de dépollution", s'énerve l'association.
Alors qu’en février dernier la Commission européenne a ouvert une procédure d’infraction contre la France pour le non-respect de la réglementation environnementale sur les nitrates (voir notre article), le rapport commun des 2 Ministères confirme le constat récurrent de l’UFC-Que Choisir sur le désastreux impact environnemental de l’agriculture intensive et l’impérieuse nécessité de modifier les pratiques agricoles. En conséquence, l’association a décidé d'interpeller les pouvoirs publics à un double niveau :
au niveau national, l’UFC-Que Choisir a saisi Stéphane Le Foll, Ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, afin de relancer en le renforçant le plan gouvernemental 2010/2015 de lutte contre les algues vertes ;
au niveau Européen, alors que chaque année sont versés aux agriculteurs bretons 570 millions d’euros (majoritairement financés par les consommateurs) , l’UFC-Que Choisir prône que les règles de la nouvelle Politique Agricole Commune (PAC), actuellement discutées à Bruxelles, imposent des modes de fertilisation adaptés (s’inspirant des approches de l’agriculture intégrée et de l’agriculture biologique, privilégiant notamment des solutions agronomiques ou des sources d’azote à libération lente), des critères environnementaux précis, définis au niveau local selon la nature du sol, les conditions climatiques et géographiques, ainsi que des contrôles efficaces du respect de ces critères, assortis de sanctions dissuasives et proportionnelles portant sur le montant des aides allouées.
En rapport avec le sujet, nous vous renvoyons à la lecture de notre article : Méthanisation : la lutte contre les algues vertes se poursuit.