Triste fin pour cette installation. Sans surprise, le conseil communautaire a acté la fermeture définitive de Biopole, l’unité de traitement mécano-biologique des déchets d’Angers et de ses environs, construite à Saint-Barthélemy-d’Anjou et mise en service en 2011. Les déchets de l’agglo sont traités ailleurs, par incinération (UIOM de Lasse) et enfouissement (en Mayenne), tandis que des dizaines de millions d’euros auront hélas, été mis à la poubelle…
Après que les conseillers communautaires aient voté lors d’un Conseil d’agglomération, la résiliation du marché passé avec le constructeur de Biopole, Vinci Environnement, il était clair que l’on n’était plus, ni dans l’aimable, ni dans l’amiable, d'autant que l'exploitant avait imposé un arrêt forcé de l’usine, à la mi avril dernier, une décision que la filiale de Véolia avait justifié en parlant d'un « cas de force majeure ». Toujours est-il que par cet acte fort en effet, l’agglo devenait propriétaire de l’installation et partait en contentieux contre le constructeur… Il reste aussi, à caler l'avenir du traitement des déchets produits sur le territoire de la commaunauté d'agglo, privée de son installation, et pour cause.
Pour la communauté d’agglomération (33 communes) Angers Loire Métropole, présidée par Christophe Béchu depuis le printemps 2014, il était clair dès la mi juin, que les élus seraient contraints de trancher rapidement entre plusieurs scénarios proposés par le cabinet d’expertises Naldéo (qui travaille sur ce dossier depuis un an) : conserver les objectifs de base de Biopole, en retraitant un très fort pourcentage des déchets qui entrent dans le site (cela suppose de réduire le nombre de refus, d’augmenter la production de méthane et la qualité du compost), privilégier soit la production de méthane, soit la production de compost et faire les travaux nécessaires à l’un ou à l’autre, ou bien fermer le site, tout simplement (sauf que fermer une usine qui n’a que 4 ans et qui a coûté 66 millions d’euros n’a rien d’ordinaire, d’autant que ce qui relève des OM figure sur un budget annexe, ce qui sous-entend qu’il faudra équilibrer dépenses et recettes, ce qui passerait par une augmentation de la TEOM, une décision qui s’avèrerait impopulaire, comme on peut le supposer).
Cela dit, qu’il s’agisse d’organiser des travaux ou de décider d’une fermeture, il faut être chez soi, et donc être propriétaire (or, les dysfonctionnements avaient évidemment retardé la réception définitive de l’installation).
La communauté a finalement choisi de s'appuyer sur la contestation par Vinci, de la mise en demeure notifiée par la collectivité de se conformer à ses obligations contractuelles, puis d’approuver à l’unanimité, via les élus de l’agglo « la résiliation pour faute sous forme de résiliation simple du marché public de conception réalisation construction de l’usine de Traitement Mécano-Biologique Biopole conclu avec Vinci Environnement et consorts ».
Conséquences : le marché est résilié, l’usine est désormais réceptionnée en l’état, et, dans la mesure où elle ne donne pas satisfaction, la collectivité part au combat contre le constructeur. Pour l’heure, la collectivité locale annonce un préjudice sévère : l’amortissement du site, soit près de 2,8 M€/ an sur 30 ans, auquel s'ajoutent près de 8 M€ de surcoût de traitement réclamés par Géval (Veolia), qui exploitait le site (avec un manque à gagner dont elle n'a pas manqué de se plaindre), soit un sacré paquet de pognon et une publicité dont la communauté d’agglomération se serait bien passée (Angers étant aussi et par ailleurs le siège de l'Ademe) surtout à l'heure où l’on boucle la loi de Transition énergétique : avec une volonté affichée du gouvernement de ne pas miser sur le TMB à l’avenir, c’est la filière dans son ensemble qui risque gros, elle aussi…
Dans une suite quasi logique, les maires de la collectivité se sont prononcés il ya quelques jours, en séminaire, majoritairement en faveur de l’arrêt de Biopole (Gilles Mahé, l’élu Europe Ecologie Les Verts, a en effet plaidé pour la restructuration de l’unité de traitement, soulignant que voter pour la fermeture impliquait de démanteler une usine quasi neuve, alors que le process amont fonctionne) : mener les travaux nécessaires obligeait à une dépense supplémentaire de l’ordre de 10 millions d’euros (sans pour autant avoir la certitude que l’usine fonctionnerait correctement après cette opération), alors qu’il n’en coûterait « que » 2,5 millions pour stopper tout, de manière définitive. Les élus, du moins la majorité d’entre eux, n’ont pas souhaité prendre de risque supplémentaire et les dés sont donc jetés : cet équipement ne sera plus, à terme, qu’un quai de transfert (on espère mieux, tout de même!) et synonyme d’un gâchis sans précédent…
En revanche, tous sont d’accord pour poursuivre Vinci Environnement, exigeant du constructeur qu’il paye pour les préjudices subis. Nul doute que Vinci aura des arguments à avancer... Le bras de fer judiciaire pour régler ce serpent de mer, ne fait que commencer…