Aquitaine : récupérer et recycler la peinture pour éviter de l'incinérer...
Nombre de fonds de pots de peinture finissent leur vie en déchetteries ou dans des entreprises dont c'est le métier de récupérer les déchets : une fois massifiés, ces gisements sont le plus souvent détruits par incinération, puisque qualifiés de déchets dangereux par la réglementation. Ce gisement destiné à l'élimination serait de l'ordre de 59 000 tonnes par an, selon l'Ademe, tandis que dans une étude réalisée par EcoDDS, il est précisé que 43 % du tonnage de pâteux (soit 80.500 tonnes par an) est constitué de peintures ayant un potentiel de recyclage avéré.
Maïlys Grau, jeune ingénieure chimiste bordelaise de 34 ans, s'est alors penchée sur le possible recyclage des peintures acryliques, dès lors qu'elle a su qu'elles sont incinérées : 28 millions de litres par an sont détruites, alors qu'ailleurs, au Québec notamment, elles sont recyclées depuis des années. En janvier 2017, elle créait Circouleur, une start up immédiatement orientée « économie circulaire et recyclage», mais aussi une marque de peinture recyclée qui évolue dans la pépinière d’entreprises de l’Ecoparc, à Blanquefort. Un concept inédit en France, et qui fonctionne : l'entreprise occupe aujourd'hui 6 collaborateurs, dont Marianne Rittaud et Patrick Heinry, qui sont venus renforcer l'équipe en qualité d'associés, respectivement en charge des aspects marketing et commercialisation, et pour la partie administrative et financière.
Les sources d'approvisionnement sont les déchetteries publiques, bien sûr, mais surtout Péna Environnement, basée à Saint Jean d'llac, dont l'une des activités consiste à récupérer les pots de peinture inutilisés (via sa déchetterie) et avec laquelle elle a passé un partenariat : la société de recyclage captant 200 à 300 tonnes par an, fournit Circouleur en déchets de peintures acryliques et met à disposition un espace de tri.
Les peinturées récupérées sont triées par couleur, filtrées, de sorte à obtenir une matière homogène, avant que l'on y ajoute des additifs et autres composants neufs. La production, une activité confiée à l’entreprise girondine Campistro, est suivie d'un (re)conditionnement, avant que les pots Circouleur (qui proposent un nuancier d'une quinzaine de teintes), ne soient commercialisées. Si on ne connait évidemment pas les secrets de fabrication, la peinture proposée est composée à plus de 70 % de matières recyclées, ce qui ne veut pas dire qu'elles sont de qualité moyenne, au vu du rendu et de la satisfaction des utilisateurs (particuliers et professionnels). De fait, tout est contrôlé rigoureusement, étant entendu qu'un travail de R&D organisé en partenariat avec le Laboratoire de chimie des polymères organiques (LCPO), a été mené en amont pour proposer d'entrée, du haut de gamme.
L'objectif est évidemment de déployer l'activité de sorte à ce que l’on puisse trouver à terme, ces peintures recyclées dans toutes les grandes surfaces de bricolage : Circouleur souhaiterait passer à une production de 200 tonnes d’ici à trois ans et mise sur un public sensible aux produits limitant leur impact environnemental (moindre recours aux matières premières vierges fossiles (pétrole) ou minières (titane), diminution des coûts de transport toujours lourds sur les longues distances, d'où proviennent précisément les matières vierges)...