Biodéchets : du marc de café, aux champignons, c'est bête comme chou

On estime à environ 20 tonnes, la quantité de marc de café collectée chaque mois en Ile de France, provenant des cantines de grosses sociétés de l'ouest parisien, mais aussi, depuis peu, des cafés et brasseries parisiens, qui se sont joint au mouvement ; il faut dire qu'à Paris, ville des bistrots et des terrasses, les ressources ne manquent pas, puisque la capitale produirait environ 600 000 tonnes de marc par an. Forts de ce constats, d'aucun ont eu l'idée de produire des champignons, et très précisément des pleurotes... qui atterrissent dans les assiettes des clients de ces mêmes établissements : ce ne sont pas des salades...


"Nous reproduisons les conditions d'un sous-sol de sous-bois. La température et l'humidité y sont comparables" explique Arnaud Ulrich, l'un des deux fondateurs de UpCycle-La boite à champignons, basée à Saint-Nom la Bretêche (Yvelines), créée en 2014. Et le fait est : dans l'obscurité, le mycellium de champignon se multiplie, comme il le ferait sous les racines d'un arbre. Au bout de quinze jours, les sacs devenus tout blancs sont alors transférés dans une salle de "fructification". A ce stade, on met de la lumière, et on diminue l'humidité ; les sacs sont incisés, les pleurotes vont sortir. "Les champignons sont comme stressés, ce qui leur donne envie de se reproduire, et de libérer leurs spores, donc de sortir du sac. Ensuite, il n'y a plus qu'à récolter", poursuit Arnaud Ulrich pour qui "l'agriculture urbaine doit d'abord être liée au recyclage des déchets organiques de la ville, et s'inscrire dans une logique d'économie circulaire", rappelant que "30% des déchets urbains sont des biodéchets valorisables, alors qu'actuellement, seulement 5% de cette matière organique est recyclée".
Cette méthoide peut sembler originale ; il n'en est rien puisque "nous ne faisons que reproduire avec des méthodes modernes ce qui se passait au 19e siècle" : à l'époque, les "champignons de Paris" sont eux aussi, nés sur une idée de recyclage des matières organiques puisque les maraîchers franciliens les cultivaient dans des carrières autour de la capitale, en utilisant les crottins des milliers de chevaux qui servaient à livrer leurs légumes aux Halles, dans le cœur de Paris.


Souhaitant aller plus avant dans cette voie, les deux associés installent maintenant des machines à produire du compost au pied de grandes tour de la Défense. Alimentées par des biodéchets provenant de restaurants et de déchets verts provenant d'espaces verts (tontes de gazon), les "Rocket", des tubes qui hachent menu, chauffent et malaxent, produisent en un temps record du compost, qu'ils vont utiliser pour produire... des champignons de Paris à partir de septembre.
