A l’occasion de la réunion de la Division Ferrailles au cours du Congrès du BIR (Bureau International du Recyclage) qui se tient à Barcelone depuis hier matin, Ralph Oppenheimer, Président de Stemcor, un des premiers distributeurs d’acier au monde, a alerté son auditoire sur les risques que faisaient aujourd’hui courir à la Planète acier, la braderie des excédents d’acier chinois...
A suivre les évolutions récentes de la production d’acier dans le monde, on s’est bien rendu compte que quelque chose commençait à dérailler du côté de la Chine. Au cours des neufs premiers mois de l’année 2012, la production chinoise d’acier n’a progressé que de 1.7 % ce que l’on n’avait pas connu même aux pires temps de la crise de 2008-2009 à l’occasion de laquelle, la sidérurgie chinoise avait été pratiquement épargné.
Malgré ce fort ralentissement de production, il semble que la gigantesque machine sidérurgique chinoise n’ait pas trouvé les moyens de s’adapter au fort tassement de la consommation intérieure. C’est donc sur les marchés extérieurs que la Chine tente d’écouler ses excédents en bradant les prix. Depuis le début du mois de mai, les sidérurgistes chinois se sont lancés dans une politique de discount qui a eu quelques conséquences néfastes sur le marché mondial. Fin avril, le prix des ronds à béton chinois à l’export s’écoulaient encore au niveau de 640 €. Dans les premiers jours de septembre, les prix de ces mêmes ronds à béton avaient plongé sous la barre des 500 € entrainant dans leur sillage baissier les prix des ronds à béton produits en Turquie, premier fabricant de ce produit sur le marché international mais également premier importateur mondial de ferrailles. Cette dégradation des termes du marché des ronds à béton n’est pas resté sans conséquence sur le marché international des ferrailles. Après avoir touché un point bas à la mi-septembre, le prix export des ronds chinois a connu un rebond sensible qui a permis de lever quelque peu la pression sur le prix des ronds turcs qui ont regagné une quinzaine d’euros.
Selon Ralph Oppenheimer, la crise de surproduction chinoise ne pourrait être qu’un accident conjoncturel. La sidérurgie chinoise n’a, selon l’expert, aucun intérêt à produire de l’acier pour le brader à bas prix sur le marché international, pour la bonne et simple raison qu’elle ne dispose de ressources en matières premières (minerai de fer et ferrailles) en quantités suffisantes sur son marché domestique et qu’elle doit importer une part non négligeable de ces matières premières. Pour l'orateur, le gouvernement chinois devra poursuivre sa politique de fermetures d’unités de production d’acier car si elle produit 45 % de l’acier mondial, sa population ne représente que 20 % de la population de la planète. Quant au marché de la ferraille, Ralph Oppenheimer a estimé que les choses devraient cesser de se dégrader en raison de l’arrivée de l’hiver et grâce à l’accalmie de la concurrence chinoise sur les marchés exports turcs de ronds à béton, principalement au Moyen-Orient.
De son côté, Tom Bird, Président d’EFR qui rassemble les professionnels du recyclage des ferrailles en Europe a également dénoncé la concurrence chinoise sur les marchés des ronds à béton et estimé que les termes des marchés de ferrailles devraient aller en s’améliorant d’ici la fin de l’année. Cela n’engage que lui. D’une façon très conjoncturelle, les exportateurs européens pourraient profiter pendant quelques temps de la paralysie de la Côte Est des Etats-Unis qu’occasionne le passage du cyclone Sandy si les sidérurgistes turcs étaient soudain pris d’une brutale fringale de ferrailles. C’est en effet de la Côte Est que s’effectuent l’essentiel des expéditions de ferrailles américaines vers la Turquie