Cancers et environnement : des liens avérés

Le 03/07/2009 à 19:20  

Cancers et environnement : des liens avérés
pollution L’Afsset (Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail) vient tout juste de publier un avis sur les liens entre cancers et environnement, en formulant ses propositions pour relancer une dynamique de prévention des cancers futurs. Elles reposent sur une approche fondée sur le risque, un ciblage des expositions, et sur des recommandations de recherche...

L’incidence des cancers a augmenté de 20% tandis que la mortalité a diminué de 20%. L’Agence avait commandité en 2005 une expertise collective à l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale) sur les 9 types de cancers dont l’incidence a le plus augmenté en 25 ans (poumon ; hémopathies malignes ; sein ; testicule ; thyroïde ; mésothéliomes ; tumeurs cérébrales ; ovaire ; prostate). L’INSERM a mobilisé 40 chercheurs pour analyser 1 800 articles de la littérature scientifique et a rendu public en octobre 2008 un rapport de 900 pages.

Pour ce nouvel avis, l’Afsset s’est fondée sur ces travaux des chercheurs et sur ses propres travaux sur des cancérogènes particuliers (amiante, formaldéhyde, particules, benzène...). Elle a cherché à confronter les positions des parties compétentes en auditionnant 17 organismes scientifiques et 21 personnalités de la science, des mondes professionnels, des associations et du monde judiciaire, des sciences socio-économiques et des lanceurs d’alerte. Cette ouverture à la société civile constitue une première dans ce domaine.

1La part de l’environnement est substantielle dans la genèse des cancers. Une politique de prévention doit s’attaquer aux risques encore débattus de cancers et non pas se limiter aux seuls risques avérés.

Les seuls risques avérés n’expliquent que très peu de cancers (par exemple le couple amiante-mésothéliome ou tabac-cancer du poumon...) et beaucoup de cancers restent largement non expliqués. Les travaux scientifiques les plus récents suggèrent qu’ils doivent être reliés à un jeu extrêmement complexe d’interactions entre facteurs génétiques, expositions environnementales, facteurs comportementaux et vieillissement. De plus les inconnues scientifiques sont très nombreuses sur ces risques encore débattus. Dans ce contexte, faire l’impasse sur les risques débattus est impossible et l’Afsset considère que cette situation justifie pleinement que l’approche de prévention se double d’une approche de précaution.

La recherche devra donc de plus en plus croiser les disciplines pour mieux expliquer et comprendre les liens entre environnement et cancer. Par exemple l’approche épidémiologique devra s’enrichir de l’apport de nombreuses disciplines (toxicologie, expologie, sciences sociales et économie...).

2En ce qui concerne la gestion des risques, l’Afsset confirme l’intérêt de l’approche réglementaire actuelle fondée sur les dangers des substances, mais elle demande de la compléter par une approche sur les risques.

La réglementation donne des outils pour engager des obligations de substitution ou de suppression de cancérogènes avérés, mais elle est relativement démunie pour traiter des cancérogènes classés moins dangereux. Or, de tels cancérogènes peuvent concerner une très large population exposée. C’est le cas par exemple du dichlorométhane, classé en catégorie 3 par manque de données suffisantes mais qui n’est pas indemne de tout soupçon sur l’animal. Or il est utilisé largement, à 11 000 tonnes par an en France. L’Afsset recommande dans ce genre de cas que les logiques de recherche de substitutions, de définition de valeurs de références et de réduction de l’exposition soit plus développées. Elle vient ainsi de publier une valeur limite d’exposition professionnelle sur le dichlorométhane plus protectrice ; elle met aussi à disposition des industriels un site www.substitutioncmr. fr pour encourager la diffusion des expériences réussies de substitution.

L’approche par l’évaluation des risques sanitaires permet de mettre l’accent sur les expositions, de hiérarchiser les sources de plus fortes expositions et de traiter les sources de plus fortes expositions. La recherche devra alors se développer sur l’expologie (science de l’exposition aux agents à risque). Elle devra également développer les indicateurs précurseurs de cancers, comme les biomarqueurs qui permettent de reconstituer une exposition ou de détecter des signes avant coureurs de cancer.

3L’Afsset encourage le développement d’une approche socio-économique.

Face aux incertitudes multiples et aux inconnues qui entourent la question des liens entre cancers et environnement, une implication de la société est nécessaire. Le débat entre sciences sanitaires et sciences sociales permettra de progresser plus rapidement sur les déterminants des expositions (en partie liées à des inégalités sociales). L’approche coût-bénéfice permet d’éclairer le décideur et parfois d’identifier des opportunités manquées de prévention. Par exemple la prise en compte des fibres fines et courtes d’amiante par la réglementation, proposée par l’Agence, permettra d’économiser des indemnisations des victimes de l’amiante, dont le total est lourd pour la collectivité.

Télécharger le document pdfPour plus d'informations et tous les détails, vous pouvez consulter l'avis complet de l'Afsset en cliquant ici (PDF - 5,3 Mo).