Changement de nom, changement de ton…
Le groupement a changé de nom. Pourquoi ?
Avec quelques entrepreneurs un peu visionnaires, nous avions identifié, très tôt, la nécessité de nous regrouper au sein d’une organisation professionnelle pour mieux faire connaître nos métiers et pour promouvoir les valeurs auxquelles nous continuons de croire : celles de l’environnement et celles de l’entrepreneur.
En changeant de nom, nous changeons aussi de ton. Nous voulons désormais insister plus fortement sur la nécessité qu’il y a à ce que cette dernière spécificité soit mieux reconnue et respectée car elle est en danger.
A quelles menaces pensez-vous ?
Nous faisons face à un étrange paradoxe. Les entreprises indépendantes dont nous sommes les porte-paroles sont, en général, celles qui créent le plus d’emplois, qui innovent le plus et qui assurent la meilleure couverture du territoire avec une réelle proximité des clients. Néanmoins, au sein du débat public, nous constatons que notre voix est peu écoutée et qu’il existe un monopole de la parole que ce sont attribués les grands groupes. Au sein des organisations syndicales, auxquelles nous appartenons, il faut toujours taper du poing sur la table pour se faire entendre. Et souvent, les avancées obtenues auprès des pouvoirs publics sont plutôt à l’avantage des « Premiers de la Classe » ! Alors, nous avons décidé de monter en ligne pour dire directement à nos interlocuteurs : « voilà qui nous sommes et ce que nous pesons! ». Mais surtout « voilà quelle est notre situation ! ».
Aujourd’hui, la crise fait rage et avec elle, la guerre des prix ! Nous sommes surpris de voir tous les jours à quel point les leaders du secteur n’hésitent pas à jouer à la baisse pour grignoter des parts de marché supplémentaires. Nous n’avons pas leur trésorerie pléthorique et nous ne pouvons pas travailler à perte…
D’autant que nous n’avons pas l’habitude de recourir au rééquilibrage des marchés à postériori…
Qu’entendez-vous par là ?
Nous sommes des professionnels et nous ne sommes pas tombés de la dernière averse.
Nous savons très bien que des marchés traités à bas coût sont souvent relevés par des avenants. La renégociation a postériori, c’est quelque chose que nous ne pratiquons pas et c’est même une « méthode » qui ne nous paraît pas conforme à l’idée qui veut qu’un prix donné soit un prix qui engage…
D’ailleurs, le prix d’un marché public est révisable afin de tenir compte des variations économiques. Les formules et les modalités sont inscrites dans les marchés et concernent l’évolution de certains coûts comme les salaires et le carburant.
Nous pensons qu’un vrai professionnel doit pouvoir évaluer correctement les choses avant de remettre un prix. Nos entreprises fournissent souvent des prestations liées à notre culture de service du client et à notre proximité, qui ne sont jamais facturées. S’il arrive un « pépin » un dimanche matin, sur un site, nous sommes les premiers à dépanner la collectivité et à accompagner les élus dans leurs difficultés quotidiennes…
Pourquoi les collectivités acceptent-elles l’augmentation des tarifs après coup ?
Les appels d’offres sont faits normalement pour fixer le cadre de la compétition et permettre à la collectivité, comptable de l’argent public, de ne dépenser que le strict nécessaire.
On pourrait d’ailleurs reprocher, à ce sujet, que la philosophie pratiquée continue toujours de privilégier le moins-disant financier même si aujourd’hui, le système de notation paraît un peu plus transparent. C’est aux élus d’être plus vigilants sur la conformité des l’offre par rapport au cahier de charges initial et d’intégrer un peu plus la notion de « mieux-disance » environnementale et technique sur laquelle nous faisons souvent la différence. Ce qui est aussi préoccupant et je ne sais pas s’il faut y voir un phénomène de mode, c’est l’attitude récente de certaines collectivités qui souhaitent reprendre à leur compte, les marchés du déchet.
Echaudées sans doute, et on peut le comprendre, par les pratiques que je viens d’évoquer plus haut, elles ont de plus en plus tendance à recourir à la mise en régie.
Cette solution peut être pertinente dans certains cas de figures, mais c’est loin d’être la panacée. Nos métiers sont des métiers souvent durs, pour lesquels nous formons soigneusement notre personnel et que nous faisons évoluer dans nos entreprises pour éviter la routine et la pénibilité. Je me souviens avoir croisé le regard d’employés municipaux à l’oeuvre sur des sites de traitement de déchets… Je ne suis pas sûr que le choix de leurs élus soulève chez eux beaucoup d’enthousiasme. Je ne suis pas sûr, non plus, que la solution soit aussi économique que cela paraisse. On observe néanmoins certaines collectivités revenir au régime de la délégation. Il y a sans doute des raisons à cela !
Qu’appelez-vous de vos voeux pour que la situation des entrepreneurs soit réellement prise en compte ?
D’abord, nous avons besoin d’un peu plus de cohérence entre les discours et les actes. Les gouvernants actuels et ceux qui seraient amenés à leur succéder demain semblent faire grand cas de la situation des PME, car ils sont constaté que notamment en matière de création d’emplois, elles assuraient 90% des embauches. Ils veulent donc tous les préserver et les aider. Cela nous convient très bien. Mais cette vision nationale doit maintenant trouver et en urgence, une traduction locale dans les décisions d’attribution de marchés que prennent chaque jour les collectivités. Je ne parle pas ici de préférence « entrepreneuriale » mais d’une meilleure prise en compte de critères objectifs comme les délais d’intervention, l’innovation ou les moyens structurels ou matériels mis en œuvre. Sinon, le risque est grand de voir le marché des déchets se concentrer entre les mains de 3 ou 4 opérateurs nationaux et internationaux ce qui entraînerait inévitablement une flambée des prix pour le contribuable.
La présence d’un tissu fort d’entrepreneurs indépendants est un élément indispensable de la régulation du marché. Ensuite, il convient d’introduire un peu de bon sens dans les exigences réglementaires pour lesquelles nous assistons à une véritable inflation.
Complexifier à l’extrême la réglementation freine l’accès des marchés publics aux PME et on assiste finalement à une distorsion des règles de la libre concurrence.
Loin de nous de contester la nécessité de disposer de qualifications supplémentaires ou de ne pas répondre favorablement aux dispositions du Grenelle de l’environnement. Nous ne sommes pas rétrogrades. D’ailleurs, ce sont souvent nos entreprises qui donnent l’exemple.
Mais de grâce : simplifions un peu, les choses !!!
Enfin, nous devons réfléchir à une forme de « bouclier », c’est très à la mode en ce moment, qui amortisse le choc en cas de non renouvellement de marché par une collectivité, marché qui peut parfois représenter un pourcentage important du chiffre d’affaires de la PME et qui, met de facto sa pérennité en péril. Perdre un marché pour les géants du secteur, ce sont quelques dividendes en moins pour les actionnaires… Pour un entrepreneur indépendant, c’est souvent une somme de difficultés qui lui impose d’ajuster sa structure.
La collectivité devrait avoir présente à l’esprit cette notion de responsabilité « sociétale » lorsqu’elle rend sa décision et réfléchir, peut-être avec nous, aux moyens, tout en restant résolument dans le cadre de la loi des marchés publics, de prendre cette dimension en compte. Lorsque nous affirmons que nous sommes les partenaires naturels des collectivités, c’est pour bien faire toucher du doigt aux élus que la pluralité des acteurs de toutes tailles dans une filière aussi stratégique que celle des déchets est la condition impérative de l’équilibre des territoires, de la professionnalisation et de la qualité des services rendus. Ce sont les messages que nous souhaitons faire passer et nous allons profiter des échéances de 2012 pour lancer une invitation aux principaux candidats à venir débattre avec nous et à entendre nos propositions.
La machine est lancée et nous allons faire parler de nous !