Chine : les matières "recyclées" occidentales ne sont plus les bienvenues...
Depuis le 1er janvier, les portes de la Chine sont closes à 24 familles de déchets solides, dont certains plastiques, papiers et textiles... ce qui n'est pas sans générer des émois bien compréhensibles dans le monde du recyclage, puisque cette barrière infranchissable concerne les déchets correctement triés ou moins bien (or, l'on sait que tous les pays n'apportent pas le même soin au tri des déchets), mais aussi parce que la décision s'est avérée brutale et annoncée seulement six mois avant qu'elle ne prenne effet, ce qui ne laissait guère le temps de se « retourner »...
Le séisme est réel : les Etats-Unis ont envoyé en Chine, en 2016, plus de la moitié de leurs exportations de leurs métaux non ferreux, papiers et plastiques issus de la récupération, soit 16,2 millions de tonnes quand l'Union européenne exporte la moitié de ses plastiques collectés et triés, dont 85% vers ce même pays...
D'aucuns imaginent déjà un « scénario-catastrophe », avec la mise en décharge obligée ou l'incinération de ces matières collectées et triées puis destinées au recyclage et qui avaient pour exutoire, la Chine, devenue au fil des années, la première destination mondiale de ce qui ne pouvait être réinjecté au cœur de l'économie nationale concernée, voire européenne, faute de débouchés suffisants.
S'il est une évidence que ce redessinage du marché planétaire des déchets est on ne peut plus perturbateur pour les industriels américains et européens, tant ils étaient habitués à exporter les surplus, et à faire leur business via la Chine, qui absorbait en quantités colossales une belle part de ces matières recyclées ou recyclables, s'il est évident que certains d'entre eux vont souffrir et plus que ça, il est tout aussi évident qu'il va falloir réfléchir collectivement pour apprendre à faire autrement.
Une chose est sure : s'il est avéré que la crise est évidente tout autant que sévère pour les entreprises concernées (selon des estimations « prudentes » du BIR, les exportations mondiales de papier vers la Chine pourraient plonger d'un quart entre 2016 et 2018 et celles de plastiques s'effondrer de 80% en deux ans, passant de 7,35 à 1,5 million de tonnes), il est tout aussi clair que plus jamais on ne pourra exporter comme avant (avec parfois des qualités qui laissaient à désirer). Doit-on pour autant baisser les bras, céder à la kata du moment, ou se poser la question de savoir s'il n'est pas grand temps de réfléchir collectivement afin d'envisager l'avenir autrement ? A commencer par une politique européenne véritablement dédiée à ce qu'il est convenu d'appeler l'économie circulaire, ce qui générerait des capacités d'absorption de matières recyclées supplémentaires au sein de l'Union.
N'oublions pas que la grande export s'est développée parce que la Chine avait en effet grand besoin de ces matières triées et/ou recyclées, mais également parce que les capacités d'absorption étaient insuffisantes dans nos contrées... Il fut un temps où d'aucuns rechignaient à utiliser ces matières, parce que la qualité était jugée insuffisante, quand d'autres n'acceptaient pas d'en payer le juste prix, étant entendu que dans d'autres cas de figure, la réglementation elle-même constituait un frein à l'utilisation des matières recyclées.
Si l'on souhaite pouvoir de nouveau exporter, il faudra clairement miser sur une qualité optimisée, puisque le gouvernement chinois, qui avait déjà avancé son souci de mieux préserver l'environnement du pays, met en avant des problèmes de qualité. Etant entendu que si les dommages économiques sont importants en Chine, du fait de ces interdictions drastiques, peut être le gouvernement sera-t-il enclin à organiser des négociations avec en préambule l'acceptation de ces matières à condition que la qualité soit au rendez-vous.
Comme il est probable, même si cela prendra le temps qu'il faudra, que d'autres marchés s'ouvriront et se développeront, comme le suggère Arnaud Brunet, directeur général du BIR...