Gwenaëlle Lashermes est chargée de recherche en Science du Sol avec une spécialité sur la modélisation à l'INRA de Reims. Au mois d'avril 2010 elle a soutenu à AgroParistech sa thèse sur l'évolution des polluants organiques au cours du compostage de déchets organiques. L'objectif de ce travail est de dégager une approche expérimentale et une modélisation...
En introduction de sa thèse, G.Lashermes rappelle que les composts sont vecteurs de polluants organiques ou OPs puisqu'ils sont présents dans les déchets organiques de base et que de nombreuses études montrent que ces OPs se dissipent au cours du compostage par des mécanismes de dégradation, volatilisation, dissipation dans les lixiviats ou stabilisation par des processus de sorption sur la matière organique. Or, afin d'évaluer leur présence dans les composts finaux, ainsi que les risques liés aux pratiques de recyclage des composts sur le sols agricoles, G.Lashermes s'est attachée à caractériser et modéliser une méthode afin de suivre l'évolution de la spéciation des OPs.
L’utilisation de OPs radio-isotopiquement marqués (14C) a permis de réaliser un bilan complet du devenir des OPs au cours du compostage d’un mélange de déchets verts et de boue de station d’épuration. Quatre OPs représentatifs des groupes fréquemment détectés dans les composts ont été choisis comme molécules modèles : un hydrocarbure aromatique polycyclique (le fluoranthène), deux surfactants (le 4-n-nonylphénol – NP et un alkylbenzène sulfonate linéaire – LAS) et un herbicide (le glyphosate).
Un dispositif de compostage comprenant six mini-pilotes et permettant de composter des déchets organiques de manière réaliste et reproductible, à une taille compatible avec l’utilisation de 14C, a été mis en place.
Les résultats ont montré que :
Les phases actives (thermophiles) du compostage sont primordiales pour l’optimisation de la dégradation des molécules présentant une structure simple (glyphosate, LAS et NP).
La durée et le maintien de bonnes conditions pour l’activité microbienne pendant la phase de maturation apparaissent essentiels pour une dégradation optimale des molécules complexes présentant plusieurs cycles aromatiques (fluoranthène). Les capacités de sorption ont diminué au cours du compostage, sauf pour le glyphosate. Aucune relation n’a été trouvée entre les capacités de sorption des OPs et leur potentiel de minéralisation en considérant les quatre OPs étudiés.
Dans un deuxième temps, la réalisation de 12 compostages avec ajout de 14C-OPs en début de procédé a permis de caractériser l’évolution de la spéciation des OPs. La dissipation du LAS a été largement provoquée par sa minéralisation. Pour le NP et le glyphosate, la minéralisation et la formation de résidus liés ont contribué de façon équivalente à la dissipation. La dissipation du fluoranthène a été uniquement due à la formation de résidus liés.
Le compostage est apparu comme un moyen efficace pour diminuer la disponibilité directe des OPs et donc le risque de dissémination des OPs dans l’environnement lors de l’apport de composts sur les sols agricoles. Le potentiel de formation de résidus liés est cependant important pour le nonylphénol et le glyphosate et les quantités de OPs potentiellement disponibles après désorption sont intermédiaires pour le glyphosate et élevées pour le fluoranthène.
Le premier simule l’évolution des populations microbiennes et des transformations biochimiques de la matière organique au cours du compostage. Il a été paramétré et validé sur des jeux de données issues de la littérature.
Le second module décrit l’évolution de la spéciation et la minéralisation des OPs au cours du compostage. Il a été calibré grâce aux données expérimentales obtenues dans ce travail de thèse.
Le couplage entre les deux modules permet d’améliorer les simulations du comportement des OPs au cours du compostage.
Des hypothèses de couplage sont avancées. Une première hypothèse suppose que la sorption des OPs par la matière organique résulte de la somme des capacités de sorption des différentes fractions biochimiques qui la composent ; cette hypothèse n’a pas pu être validée avec le jeu de données acquis au cours de cette thèse.
Par contre, les hypothèses selon lesquelles la biodégradation des OPs et la formation de résidus liés sont influencées par l’évolution de la taille de la biomasse microbienne, elle-même dépendante de la décomposition de la matière organique, ont pu être validées.
Pour en savoir plus, contactez : gwenaelle.lashermes@reims.inra.fr