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Conférence environnementale : ne pas oublier la fiscalité écologique...
Le 27/04/2016 à 8:12
Conférence environnementale : ne pas oublier la fiscalité écologique...
Aux lendemains de la signature de l'accord sur le climat issu de la COP 21 à New-York, la ministre de l'Environnement, Ségolène Royal, a lancé hier matin, la quatrième et dernière conférence environnementale du quinquennat, une rencontre qui rassemblera près d'un millier de participants qui plancheront jusqu'au 26 avril à l'Elysée, puis au ministère de l'Environnement. Sous une pression évidente des ONG, cette réunion a pour but de fixer la feuille de route "verte" du gouvernement et de trouver des mesures concrètes, notamment sur la transition énergétique et le nucléaire. La TGAP n'est pas passée aux oubliettes : les collectivités locales, qui ne souhaitent pas être oubliées, ont fait valoir leurs souhaits...
D'entrée, force est de constater que les participants à ce rendez-vous sont partagés, voire mitigés, n'hésitant pas pointer les incohérences du gouvernement, et à mettre l'accent sur l'attente de réponses fortes.
Pour ce qui est du dossier nucléaire, la ministre a été claire : « il faut d'abord monter en puissance sur le renouvelable (...). Je ne vais pas couper l'électricité aux Français pour donner satisfaction à des idéologues anti-nucléaires ». Au moins, ça, c'est dit. Ségolène Royal n'a pas hésité à rappeler que « la France est regardée comme un modèle dans le domaine de la transition énergétique, de l'écologie, de l'environnement. (…) Nous sommes le seul pays au monde à avoir traduit dans la loi, la loi de transition énergétique pour la croissance verte, nos engagements en matière de réduction de gaz à effet de serre. Il faut en être fier ». Et d'ajouter un hommage appuyé « aux forces vives du pays : entreprises, territoires, villes, citoyens, ONG, parlementaires, qui ont poussé la France en avant dans cette transition énergétique ».
De manière unilatérale, notre pays va s'engager à donner un prix plancher au carbone, qui donnera plus de visibilité à tous les investisseurs, privilégiera le secteur spécifique de l’électricité, l’utilisation du gaz par rapport au charbon, a par ailleurs indiqué François Hollande. Au demeurant, une mission conjointe a été confiée à Gérard Mestrallet, Pascal Canfin et Alain Grandjean, qui pourront d'ailleurs s'inspirer de ce qui a été mis sur pied chez nos voisins d'outre Manche, premier pays à avoir introduit un prix plancher des quotas de GES, afin de plancher sur le marché européen du carbone.
Pour ce qui est de la fiscalité écologique, un sujet auquel les collectivités locales sont très attachées, convaincues que si l'année 2015 a été ponctuée d'événements majeurs et d'actes politiques forts, via la loi de transition énergétique, notamment, il reste à concrétiser un certain nombre d'aspects pour mettre en adéquation ce qui figure sur le papier, avec le terrain : cette transition écologique passe inéluctablement par l'action massive des territoires et des acteurs locaux.
Pour Amorce, il est clair que dans la continuité « des premiers financements ponctuels annoncés en 2015, la conférence environnementale doit impérativement faire figurer au débat, l'affectation de la fiscalité écologique française, en particulier la contribution climat énergie (CCE) et la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), aux collectivités territoriales en charge des politiques locales de transition énergétique et d'économie circulaire sous peine d'une immense désillusion ». L'association rappelle d'ailleurs que « la loi de transition énergétique et les lois de décentralisation ont considérablement renforcé les prérogatives des collectivités territoriales en matière de maîtrise de l'énergie, de précarité énergétique, et d'énergies renouvelables »... Les objectifs sont certes ambitieux et ce sont bel et bien les régions et les intercommunalités qui auront la charge de décliner ceux-ci à l'échelle régionale (SRCAE, SRADDET) et intercommunale (PCAET). Or, Amorce ne manque pas de souligner qu'une question se pose d'entrée : quels nouveaux moyens financiers ont été mis à disposition des collectivités pour mettre en œuvre ces plans et schémas dont la portée juridique reste limitée? Et d'aller plus avant dans son raisonnement : comment, dans ces conditions, peut-on considérer comme crédible l'atteinte des 500 000 rénovations par an en 2017, des -15% de précaires énergétiques d'ici 2020, des 32% d'énergies renouvelables d'ici 2030 ? Qui plus est avec une dotation globale de fonctionnement en baisse ». Si des premiers dispositifs financiers (fonds de transition énergétique, financement pour les Territoires à Énergie Positive, doublement attendu des aides du fonds chaleur en 2017...) ont eu le mérite de déclencher des initiatives, ils ne semblent pas être à l'échelle des enjeux de la transition énergétique des territoires. Et c'est la que le bât blesse. « La loi de finances rectificative pour 2015 a prévu une augmentation de la CCE, qui va passer de 22€/tonne en 2016 à 30,5€/tonne en 2017, ce qui représente une recette supplémentaire d'1,5 milliards d'euros. Nous proposons donc d'attribuer dès 2017 une partie de cette recette supplémentaire (entre 750 millions et 1 milliard d'euros) aux collectivités territoriales en charge de la mise en œuvre effective des PCAET et des SRCAE (puis SRADDET) ». Etant entendu qu'il sera nécessaire de soutenir « une accélération de la montée en puissance de cette fiscalité carbone pour favoriser la compétitivité des énergies renouvelables dans une période d'effondrement du prix des énergies fossiles ».
Passer d'une fiscalité injustement punitive à une fiscalité sur les déchets cohérente et vraiment incitative, serait un Plus incontestable : on rappellera que la loi de transition énergétique impose un objectif de division par deux du stockage des déchets en France, la réduction de 10% de la production de déchets et le recyclage de 65% des déchets à l'horizon 2025. Dans ce contexte, une réforme de la fiscalité sur les déchets a été votée par l'ex-Comité pour la Fiscalité Ecologique afin de rendre la TGAP plus cohérente et plus efficace. Cette réforme consiste à introduire une taxe sur les produits non recyclables (plus d'un tiers des déchets ménagers), afin de mettre fin à une véritable « prime au cancre » pour les producteurs de ces biens de grande consommation (jouets, matériels de bricolage, ustensiles de cuisine, produits d'hygiène, produits jetables...) qui ne participent absolument pas au recyclage. La deuxième partie de cette réforme consiste, à prélèvement constant, à simplifier les modalités de la TGAP sur l'élimination des déchets résiduels et à la rendre plus incitative pour les collectivités et les entreprises qui atteignent les objectifs de la loi de transition énergétique.
Sauf que, parce qu'il y a un hic, de taille,... le Gouvernement, qui a pourtant porté cette réforme dès l'origine, ne l'a toujours pas mise en œuvre et n'envisage aujourd'hui « qu'une augmentation simpliste et injuste de la TGAP sur les collectivités et les entreprises ». Il en découle, au moment de cette conférence environnementale, une demande expresse des collectivités locales (qui souhaitent être écoutées et entendues) pour que la mise en œuvre de la réforme adoptée en 2014 par le Comité pour la Fiscalité Ecologique, ainsi que l'affectation des 400 millions d'euros de la TGAP actuelle aux politiques d'économie circulaire (contre seulement 160 millions en 2015), auxquels pourraient éventuellement s'ajouter, d'ailleurs, les 200 à 400 millions d'euros de la nouvelle TGAP sur les produits non recyclables, soient effectives. Il s'agit de donner un "signal prix" qui soit significatif, et de mobiliser, aussi, de nouvelles ressources financières par l'affectation (au moins partielle) des recettes fiscales générées, aux territoires d'une part, mais également aux acteurs locaux. Il est à craindre que sans une réorientation significative vers les territoires de la fiscalité écologique sur les déchets, l'énergie et le climat, la transition écologique et énergétique souahitée sur le papier, n'aura tout simplement pas lieu sur le terrain.