Crise des déchets en Campanie : c'est pas fini !
Il convient de mettre en place un plan de gestion intégrée des déchets accordant la priorité à la réduction, à la réutilisation et au recyclage, afin d’éviter une nouvelle crise dans la région de Campanie, affirme un série de recommandations approuvées la semaine dernière par la Commission des pétitions du Parlement européen, à l’issue d’une mission d’information effectuée en avril dernier...
Le rapport souligne que "ni les gouvernements nationaux successifs de différentes couleurs politiques, ni les commissaires ne sont parvenus à résoudre ce problème aux racines profondes". C’est pourquoi les députés estiment que, à ce stade, il ne paraît pas utile de désigner de coupables. La Commission des pétitions lance un avertissement : "la crise des déchets en Campanie n’est pas terminée ; elle est juste en sommeil et le risque d’une nouvelle éruption est important". Pour l'éviter, les euro-députés recommandent l’adoption d’un plan de gestion intégrée des déchets visant en priorité la prévention, la réduction, la réutilisation et le recyclage des déchets, ainsi que l’organisation de collectes séparées. Le plan devrait également comprendre l’assainissement des zones polluées et des critères de référence afin de mesurer les progrès, et fournir des infrastructures de formation et d’assistance aux autorités et opérateurs locaux
Le rapport fait également état d’une "rupture totale" de la communication entre citoyens et autorités, ainsi que d’un "déficit démocratique" dans la Région Campanie. Il convient de renouer le dialogue entre les citoyens et les autorités, affirment donc les députés, qui soulignent que "la supervision militaire est contreproductive à l’égard de la transparence ou de toute perception raisonnable de normalité". Par ailleurs, le rapport invite également les autorités italiennes et régionales à allouer des fonds appropriés afin de financer de nouvelles usines de recyclage et des sites de tri des déchets spéciaux.
La Commission européenne a décidé en 2007 de suspendre le paiement de 135 millions d’euros d’aides européennes pour la période de financement 2006-2013 à des projets en matière de déchets en Campanie, et un autre paiement de 10,5 millions d’euros pour la période 2000-2006. L’UE a réclamé une feuille de route précise, ainsi qu’un calendrier, avant de reprendre son soutien financier. Toutefois, les députés européens affirment que les fonds suspendus doivent être utilisés pour contribuer à démarrer le déploiement, à condition que l’Italie soit à même de "consentir de réels efforts et de faire preuve d’une ambition sincère pour se conformer au droit de l’UE". La commission des pétitions s’engage à suivre de près les évolutions et à effectuer une nouvelle mission dans la région à la fin 2011 ou au début 2012.
Seules les décharges officiellement autorisées, conformément à la directive européenne sur les décharges, doivent être utilisées. Leur emplacement doit être clairement indiqué. Tous les autres sites doivent être progressivement éliminés et déclarés illégaux. Le dépôt "sauvage" de déchets doit faire l’objet de sanctions nettement plus sévères, afin de dissuader la pratique, soulignent les recommandations.
Pour mémoire, une crise des déchets a été déclarée en Campanie en 1994. Cette année-là, un commissaire aux déchets doté de pouvoirs et de fonds spéciaux a été nommé afin d’encadrer l’abandon de la mise en décharge et l’adoption d’un cycle de gestion intégrée des déchets. Toutefois, les progrès réalisés depuis lors en matière de réduction et de recyclage restent infimes (les habitants de Naples produisent notamment une moyenne de 2,2 kg de déchets/jour, contre une moyenne européenne de 1,4 kg). En outre, selon le rapport, une grande majorité des décharges sont exploitées par des opérateurs privés, et certaines seraient sous le contrôle de groupes criminels tels que la Camorra.
En 2008, lors du récent état d’urgence en matière de déchets, une loi a été promulguée afin de fixer des objectifs contraignants en matière de recyclage, et de désigner les décharges "d’intérêt stratégique" en les plaçant sous surveillance militaire. En février dernier, la Région Campanie a mis un terme à 15 années de gestion d’urgence des déchets et transféré à nouveau la compétence de la gestion du cycle des déchets vers le gouvernement régional. L’Italie a été condamnée par la Cour européenne de justice en 2007 et 2010 pour violation des dispositions européennes en matière de gestion et d’entreposage des déchets (voir notre article : Déchets napolitains : l'Europe condamne l'Italie).
En rapport direct avec le sujet, nous vous renvoyons à la lecture de notre article : Déchets napolitains : un feuilleton sans fin....