D3E et durabilité : les fabricants nous mènent en bateau !
Comme chaque année, Noël est l'un des temps forts de la consommation d’équipements électriques et électroniques. C'est pourquoi les animaux de l'éco-organisme Eco-systèmes reviennent en force pour promouvoir un message simple : "La nature n’a pas besoin de votre vieil appareil". Autrement dit : à l’achat d’un nouvel équipement, il faut confier l'ancien au magasin ou au livreur afin qu’il soit dépollué et recyclé. Hasard du calendrier, cette campagne coïncide avec une prise de position des associations écologistes les Amis de la Terre et le Cniid concernant les D3E (ou DEEE). Celles-ci dénoncent un bilan médiocre où 60% de ces déchets ne sont toujours pas collectés séparément ; elles s’insurgent également de l’absence d’efforts sur la réduction des déchets aussi bien en quantité qu’en nocivité...
A partir du 10 novembre prochain et pendant 3 semaines, les suricates ("La nature n’a pas besoin de votre vieille TV"), l’ours blanc ("La nature n’a pas besoin de votre vieux lave-linge"), le cacatoès ("La nature n’a pas besoin de votre vieux sèche-cheveux"), le coq ("La nature n’a pas besoin de votre vieux réveil") et le gorille ("La nature n’a pas besoin de votre vieux rasoir") vont interpeller le consommateur à travers les médias (voir les affiches ici). Les annonces dans la presse magazine et à la radio sont complétées par des publi-communiqués pédagogiques indiquant la possibilité de réutilisation des appareils ou leur recyclage.
Il est à noter qu’Eco-systèmes profite de cette nouvelle vague pour toucher un public plus jeune et lancer un spot radio mettant en scène, pour la première fois, des téléphones portables. Autre nouveauté de cette campagne : du 10 au 17 novembre, les abribus des 50 plus grandes agglomérations diffuseront ces messages au coeur des villes.
Malgré ces jolies affiches et une succession de colloques, le constat des Amis de la Terre et du Cniid sur la filière de traitement des D3E est pourtant bien médiocre. Les entreprises, dont les produits mis sur le marché ont une durée de vie de plus en plus limitée, restent en première ligne. Par des stratégies d’obsolescence programmée des produits électriques et électroniques (voir notre article), elles contribuent au gaspillage et à l’épuisement des ressources naturelles, qui vont à l’encontre de la prévention des déchets. Elles produisent des biens fortement générateurs de déchets (gadgets, appareils fragiles, non démontables et non réparables, etc.) vendus souvent via des budgets publicitaires énormes dont les supports génèrent aussi de plus en plus de D3E (tels les écrans plats publicitaires géants).
"Les producteurs et les distributeurs ont une responsabilité supérieure à celle des consommateurs et des collectivités locales qui sont en bout de chaîne. Ils doivent mettre sur le marché des produits durables, c’est à dire solides, à durée de vie longue et réparables facilement", explique Claude Bascompte des Amis de la Terre.
Lors des 2èmes rencontres nationales organisées par Eco-systèmes, aucune volonté n’a été affichée pour répondre à ces enjeux. Pire, les représentants des producteurs d’équipements électriques et électroniques se sont félicités de la qualité et de la durée de vie de leurs produits. Mais cette durée de vie "théorique" de 10 à 12 ans pour les produits électroménagers d’après les fabricants, n’est qu’un affichage en termes de communication. Ce qui compte, c’est la durée de garantie, qui représente un engagement très concret du producteur puisqu’il s’engage à reprendre l’appareil et à le réparer en cas de panne pendant la période couverte par la garantie.
"Si les fabricants sont sûrs de la qualité de leurs produits, pourquoi la durée de garantie maximale sur un appareil d’électroménager par exemple est-elle limitée à un ou deux ans, soit la durée de la garantie légale de conformité qui est un minimum à respecter par les producteurs et les distributeurs ?", s’interroge fort justement Sébastien Lapeyre, Directeur du Cniid (Centre national d'information indépendante sur les déchets).
Pour réduire efficacement les déchets, il faut donc que les produits électriques et électroniques soient conçus pour durer plus longtemps. C'est pour quoi les Amis de la Terre et le Cniid demandent aux pouvoirs publics d’imposer aux fabricants et aux distributeurs de produits électriques et électroniques une durée minimale de 10 ans pour la garantie commerciale (visée à l’article L211-15 du Code de la consommation). "Sans cela, les efforts déployés par l’Ademe, les collectivités locales et toutes les bonnes volontés oeuvrant en faveur de la prévention des déchets seront insuffisants face à la prolifération des D3E. Et le consommateur-contribuable continuera à payer ses factures pour de nouveaux achats d’équipements électriques et électroniques et une éco-participation continuellement à la hausse pour le traitement de ce type de déchets", concluent les 2 associations.