Décharge vs. recyclage : l'Europe en remet une couche
En août 2012, la Commission a publié un tableau de bord qui attribue une note à la performance des Etats membres en matière de gestion des déchets municipaux (voir notre article). Les principaux obstacles à surmonter concernent le recours à la mise en décharge (jusqu'à 95% !), la faiblesse des taux de recyclage (moins de 20%) due aux carences des systèmes de collecte séparée et au manque d'infrastructures, et enfin l'insuffisance de mesures d'incitation favorisant la prévention, le réemploi et le recyclage des déchets. Les Etats membres les plus performants en la matière (l'Autriche, la Belgique, le Danemark, l'Allemagne, les Pays-Bas et la Suède) se sont dotés de systèmes élaborés de collecte, mettent en décharge moins de 5% de leurs déchets et utilisent pleinement les instruments économiques afin d'encourager une gestion efficace des déchets. Cependant, il existe une marge d'amélioration, y compris dans les Etats membres où les taux élevés d'incinération risquent de freiner la progression de meilleurs choix de gestion des déchets tels que le réemploi et le recyclage...
C'est un chiffre qui revient régulièrement dans notre journal : chaque année, un Européen produit plus de 500 kg de déchets municipaux, dont un tiers est immédiatement mis en décharge. Alors que certains Etats membres parviennent à utiliser ces ressources à des fins productives et recyclent ou compostent environ 60% de ces déchets, d'autres peinent à y parvenir. "Bien que de grands progrès aient été réalisés dans toute l'UE en matière de gestion des déchets et de mise en oeuvre de la législation en la matière, d'autres améliorations s'avèrent nécessaires dans la plupart, voire la totalité, des Etats membres", indique la Commission européenne.
Afin de venir en aide aux Etats membres affichant un certain retard dans leurs pratiques en matière de gestion durable des déchets, un séminaire de haut niveau a eu lieu ce mardi à Bruxelles, en présence notamment de Janez Potočnik (membre de la Commission européenne chargé de l’environnement). Objectif : les aider à optimiser leurs politiques en matière de déchets grâce à des feuilles de route personnalisées contenant des recommandations pratiques axées sur la mise en oeuvre efficace de la législation de l'UE en la matière. La Bulgarie, la République tchèque, l'Estonie, la Grèce, l'Italie, la Lituanie, la Lettonie, la Pologne, la Roumanie et la Slovaquie étaient représentées à ce séminaire. Parallèlement, l'Agence Européenne pour l'Environnement (AEE) a publié une analyse approfondie des réalisations en matière de gestion durable des déchets dans l'UE au cours de la dernière décennie.
"De nombreux Etats membres dépendent encore trop lourdement de la mise en décharge, ce qui ne correspond pas à nos efforts pour parvenir à une Europe plus efficace dans l'utilisation des ressources. En enfouissant nos déchets, nous perdons énormément de matériaux précieux et nous manquons une occasion de créer plus d'emplois, de la croissance économique et de réduire l'incidence des déchets sur la santé humaine. Dans le contexte économique actuel, la gestion des déchets doit être améliorée et utilisée pour créer de l'emploi tout en allégeant la pression que subissent les ressources naturelles", explique M. Potočnik.
Les feuilles de route (voir ici) mettent l'accent sur la nécessité d'utiliser des instruments économiques permettant d'améliorer la gestion des déchets municipaux, tels que la taxation ou l'interdiction de la mise en décharge ou de l'incinération, les régimes de responsabilisation du producteur et les mesures d'incitation favorables à la prévention, au réemploi et au recyclage des déchets (par exemple, des systèmes de tarification en fonction du volume des déchets). Elles recommandent également d'améliorer le suivi et les statistiques, d'intensifier la collecte séparée, de mettre en place une meilleure gouvernance, d'adapter les stratégies de gestion des déchets et d'adopter des mesures en vue d'accroître la participation de la population.
En ce qui concerne de futurs investissements en matière de gestion des déchets, les feuilles de route soulignent que la priorité devrait être accordée à la prévention, au réemploi, au recyclage et au compostage, qui sont les options privilégiées par la hiérarchie des déchets figurant dans la directive-cadre relative aux déchets. Cette recommandation fait écho au Cadre Financier Pluriannuel (CFP) 2014-2020, dans lequel de nouvelles conditions ex ante relatives au financement des fonds structurels disposent que les projets doivent respecter la hiérarchie des déchets et permettre aux Etats membres de réaliser les objectifs juridiquement contraignants de l'UE, tels que le taux de 50% de recyclage des déchets municipaux.
Dans un futur proche, la Commission prévoit d'organiser davantage de séminaires sur la gestion des déchets municipaux dans d'autres Etats membres, en collaboration avec l'AEE. "Les plans nationaux de gestion des déchets et les programmes de prévention des déchets, que les Etats membres doivent finaliser et soumettre à la Commission avant décembre 2013, seront analysés attentivement", précise-t-elle. Un processus d'examen des principaux objectifs juridiquement contraignants figurant dans la législation de l'UE relative aux déchets a également commencé et devrait s'achever fin 2014. Cet examen pourra conduire à des propositions visant à renforcer les objectifs existants afin de stimuler l'utilisation efficace des ressources.
En rapport avec le sujet, nous vous renvoyons à la lecture de notre dépêche : Déchets municipaux : le recyclage progresse en Europe.