Déchet or not déchet… un changement de statut très attendu

Le 05/01/2010 à 15:49  

Déchet or not déchet : un changement de statut très attendu

Ferrailles Tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Mais les changements promis par la directive du 22 novembre 2008 commencent à prendre forme. Du moins pour certaines matières recyclées. Les exigences pour l'acier ont été publiées en fin d’année 2009 sans susciter d'inquiétude chez les professionnels…

1975 : la loi française sur le traitement des déchets impacte la directive du 15 juillet 1975 qui pose les bases de la réglementation européenne de la gestion des déchets.

Plus de trente ans après, l'Union européenne a adopté en novembre 2008 une nouvelle directive chargée de combler les vides juridiques. D’aucuns pourront toujours dire : ce n’est pas trop tôt.

Car si le texte de 1975 encourageait déjà le recyclage et la transformation des déchets en matières premières, il ne donnait aucun statut particulier à ces matières recyclées. En clair et c’est là que les recycleurs deviennent de plus en plus ombrageux, en dépit du travail parfois spécialisé qui est réalisé, les matières recyclées restent de déchets. Et comme on est dans le juridique, on déduit tout ce que cela implique : responsabilité du producteur de déchet tout le long de la chaîne de recyclage, difficulté de circulation sur le marché intérieur de l'Europe et au-delà, constitutions de garanties financières…
Comme toujours, on compte sur la jurisprudence pour établir les nuances, voire les différences. Aussi, l'interprétation de ce vide juridique a-t-elle été laissée aux bons soins de la justice qui le plus souvent dans ses décisions, a choisi de s'en tenir à l'objectif d'origine de la Directive : répondre à des préoccupations environnementales et sanitaires.

Et l’on navigue au cas par cas… Si pour certaines affaires, des débris d'extraction issus d'une carrière ont été assimilés à des déchets, dans d’autres procès, des résidus solides issus de la distillation du pétrole (coke) ont été considérés comme des sous-produits.

Justice ou injustice que ces maux là ?

Papiers Le temps passe… Sauf que Bruxelles se penche sur la question des statuts de ces « machins » comme dirait le général de Gaulle, qui permettent, faut-il le rappeler, de développer des économies un peu partout dans le monde, soulagent d’autant les décharges, génèrent des emplois pérennes, évitent le gâchis toujours imbécile, tout en limitant la casse du côté des émissions de CO2.

Ahhh… Que ne nous sommes nous pas penchés plus tôt sur ce dossier…

A la décharge des législateurs (sans mauvais jeu de mots), le lobbying, rôdant de partout dans les couloirs et faussant sans doute un peu la donne et en tout cas la réactivité des personnes en charge d’instruire les nouvelles moutures réglementaires…

Mais il paraît qu’on commence à tenir le bon bout : « nous avons enfin le mode d'emploi pour sortir de ce statut de déchets », a commenté Olivier François, Président de Federec Nord-Picardie à l'occasion du salon Pollutec 2009.

L'un des objectifs de cette directive est en effet d'aider l'UE à se rapprocher d'une « société du recyclage » pour éviter la production de déchets et à les utiliser comme ressources.

A la rescousse, l'article 5 qui établit clairement que les substances issues d'un processus de production peuvent être considérées comme un sous-produit et non comme un déchet.

Pour le reste des cas, l'article 6 liste les critères auxquels les « substances » doivent répondre pour être considérées comme « produit » : utilisation à des fins spécifiques, existence d'un marché, respect d'exigences techniques et utilisation sans effets nocifs pour l'environnement et la santé.

Granulats Des critères spécifiques à la fin de vie des déchets doivent être définis pour plusieurs familles : les granulats, le papier, le verre, le métal, les pneumatiques et les textiles.

Ces exigences se rapprocheront des caractères techniques exigés pour les matières premières classiques, ce qui n’inquiète pas les recycleurs : « les critères sont déjà respectés pour de nombreuses matières premières car plus de 50% des matières premières mondiales proviennent du recyclage » (…). « Les critères de sélection appliqués aujourd'hui répondent déjà à l'article 6 de la directive », rappelle Olivier François.

Pour exemple, il faut savoir que d’ores et déjà, « les ferrailles broyées doivent être présentées en morceaux dont le calibre n'excède pas 200 mm ; ils ne doivent pas contenir d'humidité, de produits incinérés et de cuivre à plus de 0,25% ou encore d'éléments inertes comme des stériles, à plus de 0,9%. L'union européenne a publié en novembre dernier, les standards que devra respecter l'acier recyclé. Selon ces exigences, la concentration en stériles doit être inférieure ou égale à 2% des volumes ».

Cela étant, tout n’est pas réglé pour autant

Restera la mise en œuvre des contrôles inévitables pour que soient respectées ces exigences. A ce niveau, les recycleurs se posent moult questions. Car le régime de circulation des matières est différent entre le statut de déchet et celui de produit. « Comment les douaniers pourront-ils faire la différence entre des ferrailles classées ''produit'' et des ferrailles classées ''déchets'' », confirme Olivier François. Dans bien des domaines, la réglementation devient en effet de plus en plus complexe, ce qui nécessite des techniques que les douaniers ne maîtrisent pas forcément.

Et puis, faut-il confirmer ou rappeler que la sortie du statut de déchet sous-entend une entrée dans le périmètre d'application du règlement REACH ? : « il n'y a aucun doute au niveau de la Commission et des Etats membres », exprime le président de Federec Nord.

Pas question de broyer du noir pour autant : l'Union européenne a déjà précisé dans le cas de l'acier « que les ferrailles recyclées n'auront pas besoin de se faire enregistrer à nouveaux si la matière première l'a été ». Les instances européennes doivent encore publier leurs exigences et positions pour l'aluminium, le cuivre, le papier-carton et le verre, courant 2010. Des discussions ont également commencé pour les plastiques.

Cela étant, il est bon de garder en mémoire que chaque pays peut, s'il le souhaite, définir ses propres critères (C’est ce qu’a choisi de faire le Royaume-Uni pour les pneus) sans nécessairement attendre ceux établis par l’UE... Alors...