Déchets dangereux : les régions à la masse ??
Que font l’Etat et les régions pour la planification de la prévention et la gestion des déchets dangereux ? Pour le savoir, France Nature Environnement (FNE) a réalisé une étude de leurs plans (avec le soutien de Veolia Propreté), dont elle publie les résultats dans un rapport disponible en ligne. Manque de planification, manque de suivi, couverture incomplète du territoire : son constat est plus que mitigé...
Sur 26 régions (dont DOM-TOM), 10 d'entre elles n’ont pas de PREDD (Plan Régional d'Elimination des Déchets Dangereux) et ne souhaitent pas s’y mettre. FNE a étudié les 16 plans en cours de révision ou d’adoption, et livre ses conclusions dans son rapport intitulé "Expertise sur la planification régionale et la gestion des déchets dangereux (Bilan et prospective des PREDD)" consultable intégralement ici (format PDF - 3,7 Mo).
Concernant la planification, de grandes régions productrices de déchets n’ont toujours pas de centre de stockage de déchets dangereux comme le Nord-Pas de Calais, l’Aquitaine, ou encore les régions PACA et Rhône-Alpes. Peu de plans préconisent la création de tels sites, alors que celle-ci demande une grande anticipation. Rappelons qu'il faut en moyenne 7 ans entre la décision de créer un site et sa réalisation. De plus, les moyens, financiers et humains, manquent pour suivre et mettre en oeuvre des initiatives. Heureusement, quelques rares plans, comme celui d’Ile-de France (voir notre article), définissent clairement les modalités de leur suivi et de leur mise en place.
L’étude des plans existants démontre pourtant bien leur intérêt. Ils facilitent la mobilisation des acteurs, aident à saisir l’importance d’une bonne évaluation des quantités de déchets dangereux produites et gérées sur les territoires. Ils permettent également d’identifier les flux de transports de matières dangereuses. Rappelons que les déchets dangereux ne sont pas à prendre à la légère. Leurs impacts sur la santé humaine et l’environnement peuvent être importants s’ils ne sont pas gérés convenablement. On les estime à plus de 3 000 kt (kilotonne) par an, provenant principalement de l’industrie, dont environ 80 000 tonnes sont produits par les ménages et artisans.
FNE demande donc à l’Etat et aux régions de mieux considérer et planifier la prévention et la gestion de ces déchets, qui présentent de réels risques pour notre santé et notre environnement. "Il est indispensable que les plans élaborés soient suivis et mis en oeuvre et non oubliés au fond d’un tiroir, grâce à des moyens humains et financiers suffisants. Ainsi, chaque région en collaboration avec les acteurs concernés, devra veiller à fixer des objectifs réalistes, ainsi qu’une feuille de route claire, garante du suivi des plans", explique la Fédération.
FNE demande également aux régions d’être, au travers des PREDD, moteurs dans la prévention des déchets dangereux. Pour cela elles peuvent promouvoir et soutenir le développement de technologies qui génèrent moins de déchets dangereux, mais aussi des actions de formation et d’information. "Pour être efficace, le volet "prévention" du PREDD devrait être assorti d’objectifs et de moyens précis, en particulier sur les actions à entreprendre et leurs coûts, le calendrier de mise en oeuvre ainsi que sur les indicateurs de suivi. De plus, les plans reconnaissent eux-mêmes la difficulté à obtenir des chiffres précis concernant les déchets dangereux. La meilleure solution est bien la mise en place d’observatoires dans chaque région, au minimum dans les régions avec des activités industrielles importantes".
Par ailleurs, afin de respecter le principe de proximité, FNE demande à ce que soit prévue l’étude des besoins en termes de capacité de traitement des déchets dangereux par bassin de production. Chaque bassin de production important doit en effet être doté d’un site de stockage de déchets dangereux (par exemple, le Nord-Pas-de-Calais, l'Aquitaine et la région Rhône Alpes en sont dépourvus). Pour la Fédération, il est primordial d’anticiper et d’impliquer l’ensemble des acteurs locaux, dont les associations de protection de l’environnement, dans l’évaluation des besoins et les choix d’implantation des sites de traitement. "Sans cette anticipation, les blocages sont inévitables. Ceci doit passer par des démarches de concertation associant très en amont citoyens et collectivités, dès l’étape de l’évaluation des besoins, c'est-à-dire, au tout premier stade de l’élaboration des PREDD", précise FNE.
Une nouvelle filière des déchets dangereux spécifiques (provenant des ménages et assimilés) verra le jour au plus tard janvier 2011, un projet de décret étant en cours. Il est donc important que la planification régionale permette d’optimiser cette filière, entre autre en réduisant les transports des déchets collectés et en utilisant les sites existants sur le territoire.