Déchets et traitement de surface : on traite le problème en profondeur
Il existe environ 100 000 produits chimiques connus et référencés au sein de l’Union européenne. Certaines de ces substances sont connues et utilisées depuis l’aube de l’humanité comme le chlorure de sodium (sel de table), l’éthanol (alcool), l’acide acétique (le vinaigre)… D’autres ont fait leur apparition plus tardivement comme l’acide acétyle salicylique ou aspirine, synthétisée pour la première fois en 1855. De nos jours, on estime que sont mises sur le marché de 200 à 300 nouvelles molécules par an...
Parmi toutes les familles de produits chimiques, il en est qui sont quasi spécifiques au nettoyage de surfaces. Cela consiste aussi bien à enlever la graisse présente sur une vis lorsqu’on démonte un moteur, à nettoyer la pièce en titane qui servira de prothèse de hanche, à dégraisser la carrosserie avant de coller le logo sur les voitures, à entretenir le train d’atterrissage d’un avion gros porteur…
Dans l’industrie, comme à la maison, les recettes pour nettoyer sont finalement identiques, rappelle Patrice Sajkiewicz, responsable technique chez Socomor…
On prend un chiffon, et on nettoie les salissures les plus simples, quand les salissures sont un peu plus tenaces, on fait appel à une lessive ou alors, on fait appel à l’artillerie lourde des solvants…
Ces recettes étant finalement maîtrisées industriellement depuis des décennies, tout pourrait aller pour le mieux, ajoute notre interlocuteur. A chaque type de pièce, à chaque type de salissure, à chaque procédé de fabrication, conviennent des méthodes de nettoyage parfaitement identifiées.
Et pourtant, un vent de changement vient balayer l’ensemble des technologies de nettoyage : avec le temps, de nombreuses études ont mis en lumière les nuisances environnementales et le danger pour les utilisateurs que nombre de produits de nettoyage pouvaient occasionner. A chaque preuve de dangerosité ainsi découverte, le législateur européen a soit ajouté des contraintes d’utilisation (quand l’emploi est toujours autorisé) pour circonscrire le danger, soit carrément interdit l’utilisation de nombre produits.
Ainsi, nombre de tensio-actif (composants essentiel aux produits lessiviels) ont été bannis. On leur reprochait leur faible biodégradabilité. Un tri énorme a ainsi été fait, ne laissant sur le marché que les produits ayant montré patte blanche…
Fort heureusement, les efforts de Recherche ont abouti à la création de nouvelles familles de tensio-actifs, qui moyennant quelques adaptations, ont permis de remplacer la vieille génération sans trop de heurts…
Mais les solvants posaient et posent encore un problème encore plus grand. Ils ont un emploi massif dans l’industrie, car finalement ils se révélent très efficaces et simples d’emploi : ils peuvent venir à bout de n’importe quelle salissure,n rapidement, en séchant très vite.
Bref : ils ont tout pour plaire à ’importe quel acteur industriel. Cela étant, leur impact n’est pas neutre…
ils peuvent avoir un effet négatif sur la couche d’ozone
ils participent au réchauffement climatique certains nuisent gravement à la santé des personnes les utilisant.
En somme, la réponse à apporter se traduit simplement : éliminer les produits dangereux et les remplacer par des procédés inoffensifs, ou tout au moins plus sûrs.
Mais est-ce si simple à réaliser ?
En fait, changer ne serait-ce qu’un seul produit dans une ligne de nettoyage peut entraîner des conséquences assez phénoménales…
« Prenons le cas par exemple d’une méthode de nettoyage, appelée « dégraissage phase vapeur ». Elle consiste à immerger les pièces à nettoyer dans un solvant en ébullition (le plus souvent du trichloro-éthylène). Comme ce dernier pose des problèmes environnementaux, et de sécurité des utilisateurs, les sociétés utilisatrices ont essayé de trouver un remplaçant. Or, il est vite apparu qu’il n’existerait pas de produit miracle, adapté à cette technique de nettoyage (et donc compatible avec les équipements en place) qui soit significativement moins dangereux. En conséquence, cette technologie de nettoyage est appelée à disparaître et à être remplacée par d’autres ». Et cela ne se fait pas sans résoudre quelques problèmes :
A la base, il faut prévoir un investissement matériel conséquent pour détruire l’ancien équipement phase vapeur
Il faut ensuite prévoir un ré aménagement des ateliers de productions pour installer de nouvelles cuves (encore faut-il qu’il y ait la place pour accepter d’installer 2 voire 3 cuves différentes en remplacement de l’ancienne)
Valider industriellement que la nouvelle technologie tient bien ses promesses et que la qualité de nettoyage est bien comparable.
« C’est dans ce cadre particulier que s’inscrit la coopération menée par l’Ademe et la société Socomor, PME bretonne, spécialisée dans les produits de nettoyage et de protection des surfaces », poursuit notre orateur…
« Nous offrons à nos clients toute les spécialités chimiques destinées au dégraissage de la vis au nettoyage de l’avion long courrier…
Ce partenariat représente un point fondamental de notre politique de R&D. par son soutien, mais aussi par la validation des sujets de recherche porteurs d’amélioration de la protection de l’environnement. L’Ademe nous a soutenu par exemple, pour le développement d'une fontaine de nettoyage en remplacement des fontaines à solvants (Clean 3). Maintenant que ce système est opérationnel, nos clients arrivent à nettoyer leurs pièces, sans utiliser une seule goutte de solvant et en ayant pratiquement aucun rejet aqueux.
L’amélioration environnementale est colossale. Sur les projets que nous avons en cours, l’Agence nous soutient sur un programme d’élimination d’un toxique appelé chrome 6. Les travaux de recherche sont en voie de finalisation, les premiers résultats industriels sont prometteurs. L’attente environnementale est énorme sur ce sujet, et nous espérons tous que les résultats finals seront à la hauteur », conclut notre interlocuteur…