Déchets : il faudrait que les législateurs réagissent !...
Selon une étude de la Commission européenne publiée ce vendredi, la mise en œuvre intégrale de la législation de l'UE sur les déchets permettrait d'économiser 72 milliards d’euros par an, d'augmenter le chiffre d'affaires annuel du secteur européen de leur gestion et recyclage de 42 milliards d'euros, et de créer plus de 400 000 emplois d'ici 2020. Rien que ça !... "Les opérations illicites de traitement des déchets dans les Etats membres génèrent des occasions manquées sur le plan de la croissance économique, alors que des inspections nationales plus rigoureuses et une meilleure connaissance de la gestion des déchets permettraient de réaliser des progrès considérables en la matière", déplore cette enquête...
Chaque personne consomme 16 tonnes de ressources par an dans l'Union européenne, dont 6 deviennent des déchets, la moitié prenant la direction des décharges. Dans de nombreux Etats membres, la mise en décharge reste l'option privilégiée de gestion des déchets ; cette situation perdure en dépit de la législation existante de l'UE dans ce domaine. La feuille de route pour une Europe efficace dans l'utilisation des ressources de la Commission établit des jalons visant à garantir que les déchets sont gérés comme des ressources d'ici 2020. Cela passe notamment par le réexamen des objectifs en matière de prévention, de réutilisation, de recyclage, de valorisation et de réduction de la mise en décharge, ainsi que le développement des marchés pour les matériaux secondaires et recyclés.
L'étude menée par la Commission analyse en profondeur les effets que produiraient une mise en œuvre et un respect plus efficaces de la législation en matière de déchets, démontrant au final que les avantages seraient considérables. Elle a passé au crible un certain nombre d’études de cas à Chypre, en Allemagne, en Irlande, en Italie et aux Pays-Bas afin de mettre en évidence les avantages économiques, financiers et sociaux pour les Etats membres. Le secteur européen de la gestion des déchets et du recyclage est très dynamique, mais ses débouchés économiques ont encore un potentiel de développement énorme. En 2008, son chiffre d'affaires de 145 milliards d'euros représentait environ 1% du PIB de l'UE et 2 millions d'emplois. Le respect de la politique de l'Union contribuerait à faire émerger un secteur fort de 2,4 millions d’emplois et réalisant un chiffre d'affaires annuel total de 187 milliards d'euros. Sur fond de crise économique mondiale, voilà qui est toujours bon à prendre !...
"Le problème de fond est que, dans de trop nombreux cas, les prix ne reflètent pas le véritable coût de l'élimination des marchandises ; si c’était le cas, on disposerait là du moyen le plus efficace pour limiter les déchets. En outre, de nombreux Etats membres n'ont toujours pas les infrastructures adéquates pour la collecte sélective, le recyclage et la valorisation des déchets. L'absence de mécanismes de contrôle systématique et d'exécution constitue une entrave supplémentaire, à laquelle s’ajoute le manque de données fiables sur la gestion des déchets", note le rapport. De ce dernier, on peut tirer 4 conclusions essentielles :
Tout d'abord, les Européens doivent être mieux informés sur les déchets : "Nous devons disposer de données de meilleure qualité et d'un suivi systématique de la manière dont la législation est concrètement appliquée. Des progrès ont été accomplis en ce sens, avec notamment la mise en place récente d’un centre de données sur les déchets par Eurostat".
Ensuite, une meilleure utilisation du principe du pollueur/payeur et un recours accru aux instruments économiques tels que l'augmentation des coûts de l'élimination des déchets pourraient contribuer à assurer le respect de la législation et à mettre à disposition les ressources financières nécessaires à la gestion des déchets.
3ème point : les capacités d'inspection et de contrôle doivent être renforcées dans les Etats membres. Cela pourrait nécessiter la mise en place d’une capacité d’audit au niveau de l'UE et, éventuellement, de normes d'inspection communes.
Enfin, pour renforcer, à des coûts relativement raisonnables, le contrôle au niveau de l'UE de la mise en œuvre de la législation, une solution consisterait à s'appuyer sur l'expertise et les compétences de l'Agence Européenne pour l'Environnement (AEE). Cette solution aurait un coût administratif moindre que ceux engendrés par la création d'une nouvelle agence spécialisée dans l'élimination des déchets.
Et maintenant ?... Les conclusions de cette étude vont être examinées et analysées par la Commission. Comme le préconisent la feuille de route pour une Europe efficace dans l’utilisation des ressources et la stratégie thématique pour la prévention des déchets, celles-ci serviront de base à l'élaboration d’un dosage équilibré d'instruments juridiques et économiques. Ces stratégies encouragent des mesures d'incitation économiques et juridiques, comme les taxes ou les interdictions de mise en décharge, l’extension des systèmes de responsabilité du producteur et la mise en place de systèmes de tarification basée sur le volume des déchets ("pay as you throw").
"Nous devons considérer les déchets comme une ressource. Enfouir cette dernière dans le sol témoigne d'un manque de vision grave à long terme. Ce rapport montre que la gestion et le recyclage des déchets peuvent grandement contribuer à la croissance économique et à la création d'emplois. Si la législation existante était correctement mise en œuvre, de coûteuses opérations de nettoyage, des problèmes de pollution et de santé pourraient être évités. N’oublions pas non plus que les matériaux recyclés sont moins chers que les matériaux vierges, et qu’ils réduisent les émissions de GES ainsi que notre dépendance à l'égard des importations", a déclaré pour l'occasion Janez Potočnik, membre de la Commission chargé de l'environnement.