Déchets radioactifs : présentation du projet de loi
Le ministre délégué à l’Industrie, François Loos, a présenté hier en conseil des ministres un projet de loi de programme relatif à la gestion des matières et des déchets radioactifs. Selon le communiqué officiel " Il institue un plan national de gestion des matières et déchets radioactifs et fixe un programme de recherches et de travaux, assorti d’un calendrier pour mettre en œuvre ce plan. Il permet de définir et de mettre en place des solutions sûres et de très long terme pour gérer tous les types de déchets radioactifs en protégeant la santé des personnes et l’environnement. "...
Le texte du projet de loi sera discuté au Parlement à partir du 6 avril. L'objectif est de mettre en place une "solution sûre et de très long terme " pour la gestion des déchets radioactifs et de l'industrie nucléaire. Concernant les déchets hautement radioactifs (15% des déchets représentent 99,9% de la radioactivité), le gouvernement opte, dans l'état actuel des connaisssances, pour la solution de stockage en "couche géologique profonde". Ces déchets sont actuellement entreposés dans des installations de surface. Il est prévu que la construction du centre de stockage pourra être autorisée, à l'horizon 2015, par décret du Premier ministre, après examen de l'Autorité de sûreté nucléaire, débat et enquête publics, et avis des collectivités locales.
Le projet de loi renforce aussi l'interdiction de stocker en France des déchets étrangers, tout en encadrant l'industrie de leur retraitement sur le territoire. Les substances radioactives envoyées par des pays étrangers pour retraitement ou pour la recherche pourront être stockées en France pour une "durée limitée" qui sera fixée par des accords intergouvernementaux.
Le texte concerne aussi les sources radioactives provenant de la radiographie industrielle, la médecine, les déchets issus des activités militaires, les résidus des mines d'uranium et les anciens paratonnerres au radium.
Afin de réduire le volume et la toxicité des déchets, le procédé de séparation des éléments les plus toxiques et à vie longue en les transformant en éléments radioactifs à durée de vie plus courte est à l'étude à Marcoule. Un prototype de nouvelle génération de réacteur nucléaire pour la transmutation des éléments les plus toxiques est prévu d'être mis en service vers 2020. Les déchets non recyclables feront l'objet d'un conditionnement spécifique et temporairement entreposés en surface. Ceux qui ne pourront pas être stockés définitivement en surface , seront placés en "stockage réversible" en couche géologique profonde.
Les industriels du nucléaire (EDF au premier rang) devront constituer des provisions dès aujourd'hui pour financer dans l'avenir la gestion de leurs déchets.
Les réactions d'opposition
Cap 21: "Le projet de loi s’inscrit en rupture de la loi Bataille de 1991 qui avait opéré une ouverture sur les différentes options de gestion et engage notre pays dans un processus d’irréversibilité....Cette position s’avère totalement prématurée. Les études doivent être complétées pendant au moins une dizaine d’années selon les recommandations d’experts internationaux et français avant de confier au Parlement le soin de retenir telle ou telle option (...).Tel que le projet est aujourd’hui rédigé, la COGEMA pourra faire ce qu’ elle veut:importer des déchets ou combustibles usés à des fins de recherche (sans retour), importer des déchets pour les "traiter" et les stocker pendant des années puisque les délais de traitement ne relèvent plus de la loi mais du décret et des accords intergouvernementaux(...) Ce projet qui doit être lié au projet de loi Transparence et sécurité nucléaire (inscrit en procédure d’urgence) organise un véritable déni de démocratie "
Coordination nationale des collectifs contre l'enfouissement des déchets radioactifs : "Ce projet de loi est un véritable passeport industriel pour l'enfouissement, au mépris de l'avis de la majorité de l'opinion publique. La faisabilité du stockage géologique à BURE, clamée abusivement par les pouvoirs publics, n'est pas acquise. Si le Parlement devait entériner ce projet en l'état, en fermant définitivement la voie de l'entreposage sur les sites de production, option qui permet de "les garder sous nos yeux", cela se ferait contre tout principe démocratique". 50 000 habitants de Meuse et Haute-Marne attendent une réponse à leur demande de référendum local sur la question de BURE.
Confédération Paysanne :"Tout comme la loi OGM vise à rendre légale la pollution génétique, ce projet de loi sur les déchets nucléaires est la porte ouverte à une pollution radioactive durable de la Terre. C'est inacceptable"
Amis de la Terre : "Enfouir les déchets radioactifs à 600 mètres sous terre n'est pas une gestion acceptable et conforme au développement durable ! C'est l'avenir des générations futures que l'on hypothèque!"
Greenpeace France :"Ce texte confirme et légifère le statut de poubelle nucléaire internationale de la France"
Réseau "Sortir du nucléaire" : "Ce projet de loi est taillé sur mesure pour la filière électro-nucléaire qui, pour justifier la construction de nouveaux réacteurs comme l'EPR, a besoin de prétendre qu'une solution a été trouvée pour les déchets radioactifs. Or, il n'y a que de très mauvaises solutions... et l'enfouissement des déchets les plus dangereux est la pire de toutes. Par ailleurs, l'industrie nucléaire produit d'immenses quantités de déchets et résidus contaminés qui, bien qu'oubliés par la loi, mettent eux aussi en cause la santé publique. Il faut stopper au plus vite l'industrie nucléaire."