Déchets toxiques : ArcelorMittal dans le collimateur du parquet
ArcelorMittal souillé dans le blanchiment de déchets sales… Bigre ! En voilà une belle affaire. Elle a été révélée par "La Voix du Nord" ce matin. La justice aurait mis à jour un circuit "bizarre " de déchets toxiques impliquant la société Sollac Dunkerque appartenant au groupe sidérurgique. Le trafic, qui durerait depuis quelques années concernerait des millions de tonnes de déchets et porterait sur plusieurs millions d'euros.
C’est le pavé dans la mare ! Selon La Voix du Nord, le parquet de Dunkerque a ouvert une information judiciaire pour corruption, concussion, faux et usages de faux documents administratifs et exportation non-déclarée pour élimination dans l'UE de déchets nuisibles. Sollac, intégrée à ArcelorMittal, est soupçonnée pour des faits survenus de 1993 à 2005.
Pour information, Sollac Dunkerque, société de laminage à chaud, qui emploie environ 4 000 personnes, fait partie du groupe Usinor jusqu'à la fusion de ce dernier en 2002 avec Arbed (Luxembourg) et Aceralia (Espagne) pour former Arcelor. Depuis lors, Arcelor a été intégré par Mittal.
Les infractions auraient donc eu lieu pendant des années ! Durant cette période, la société sidérurgique aurait revendu des millions de tonnes de déchets toxiques en Belgique, sous forme de carburant pour tankers, révèle le quotidien La Voix du Nord. Aucune mise en examen n'a encore été prononcée et le niveau de responsabilité dans chaque entreprise impliquée n'a pas été précisé. L'enquête interne de la direction régionale des douanes de Dunkerque -bouclée en 2005 et transmise à la justice en juin 2008- met en lumière un « marché douteux » passé entre plusieurs sociétés et intermédiaires en France et en Belgique. Elle met en cause Sollac Dunkerque, le Rubis Terminal (entrepôt d'hydrocarbures dunkerquois), la SONOLUB (une société de valorisation des déchets basée en Seine-Maritime), un courtier portuaire et un agent des douanes, aujourd'hui en retraite.
Le coût du traitement des déchets industriels, on le sait, constitue une charge onéreuse pour les industries lourdes. À l'époque, les responsables de Sollac auraient flairé le bon filon quand la SONOLUB, entreprise de valorisation des déchets, implantée en Seine-Maritime, aurait proposé de lui racheter son fioul dit « naphtaliné ». Un produit classé dangereux, toxique, cancérogène, normalement très encadré par la législation et qui résulte du nettoyage des installations du sidérurgiste. L'aubaine, c'est que la Sonolub aurait promis à Sollac que le traitement de ce déchet ne lui coûterait pas un centime. Mieux encore, à l'aide d'un montage frauduleux, les industriels auraient trouvé le moyen de récupérer la TIPP (taxe intérieure sur les produits pétroliers).
En clair, Sollac déclarait « vendre » à la Sonolub son fioul « naphtaliné ». En réalité, « le fioul était stocké par le Rubis Terminal, vendu et convoyé en Belgique où il terminait son cycle comme carburant pour les super-tankers », affirme notre confrère. Déclaré comme fioul domestique, le produit a en outre permis des remboursements de TIPP (Taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers) par l'Etat.
L'enquête est close depuis trois ans, mais n'a été transmise au procureur par les douanes qu'en juin... Pourquoi ce retard? «Il n'y a eu aucune volonté de passer l'enquête sous silence», indique un porte-parole des Douanes, cité par le quotidien. «La meilleure preuve, c'est que nous avons nous-même dénoncé les faits». Des dizaines de millions de litres de déchets toxiques, et autant d'euros seraient concernés.
Si le procureur Jean-Philippe Joubert confirme ce matin qu'une information judiciaire a été ouverte, chez ArcelorMittal, on ne dément ni ne confirme. «Nous sommes en cellule de crise. Nous ne sommes au courant de rien. Nous sommes en train de tout vérifier avec les services juridiques et achats»...
La suite, donc, au prochain numéro!