Déchets :Triselec Lille, sous le projecteur judiciaire
Ce n’est pas la première fois que la vie locale est polluée par une histoire de gros sous. Sauf que dans le cas de Triselec, l’histoire a tourné au tragique avec le suicide d’un homme de 59 ans, directeur du site, contraint de démissionner par la présidence de la communauté urbaine, au vu des chiffres résultant d’une expertise comptable demandée par les représentants du personnel de l’usine de recyclage, en décembre de l’année dernière.
Il faut dire que les montants annoncés sont loin de l’idée qu’on se fait de l’insertion sociale : un salaire doublé en l'espace de huit ans, passant de 6 000 à 15 500 euros, des dépenses jugées « extravagantes », des signes extérieurs de richesse dérangeants… Bref : tout ceci faisant l’effet d’une bombe au sein de l'exécutif communautaire qui ordonne alors un audit.
L’unité de traitement des déchets ménagers, fierté de l’équipe dirigeante de Lille Métropole depuis des années, est régulièrement considérée comme un modèle du genre : pour preuve, elle génère 16 millions d’euros de chiffre d'affaires. A la suite des premières turbulences, parce qu’il a été reproché au conseil d’administration présidé par Paul Deffontaine, d’avoir manqué de vigilance, on a assisté à un remaniement en profondeur…
Le maire de Bousbecque, Jean-Pierre Brand, remplace en effet Paul Deffontaine qui quitte ses fonctions, tandis que Dany Dunat, chef du service recyclage à la communauté urbaine, se voit confier la direction par intérim.
Avril 2012 : Martine Aubry admet les dérapages à la tête de l'entreprise en s'appuyant sur les conclusions de l'audit, document qu'elle remet au procureur de la République de Lille, à charge pour la justice de décider de la suite à donner à cette très triste affaire. Le Parquet saisi, confie une enquête préliminaire à la police judiciaire de Lille. Les services de police entendront sans doute plusieurs personnalités de l'exécutif communautaire, des membres du conseil d'administration mais aussi quelques collaborateurs de l'ancien directeur, afin de donner un éclairage plus conséquent aux enquêteurs. Rien ou presque ne transpire, l’entourage de Martine Aubry se faisant discret sur cette affaire.
Selon notre confrère « La voix du Nord », Éric Darques aurait reçu une convocation de la brigade financière de Lille. L'ancien élu, militant pour des finances publiques clean, n’en est pas à sa première procédure, dans ce type de dossier (il s’est notamment illustré dans le cadre des procédures judiciaires relatives au Grand Stade, ou encore au contrat des eaux) : au demeurant, sans attendre les résultats de l’audit, il avait porté plainte contre X au lendemain des premières révélations, pour détournement de fonds publics et suspicion de faux et usage de faux.
« J'attends beaucoup de cette enquête », a-t-il confié à notre confrère. « La confiance n'exclut pas le contrôle », plaide Éric Darques qui mène ses propres investigations depuis plus d'un an sur l'usine de traitement des déchets et qui prône la transparence et la communication à bon escient des résultats de l’enquête, rappelant à juste titre que ce sont les « contribuables qui ont payé les salaires mirobolants de l'ancienne direction et qui ont aussi payé l'audit… Par conséquent ils ont le droit de savoir... »
Le vice-président de la communauté urbaine chargé de la collecte et du traitement des résidus urbains depuis près de 3 ans, Henri Gadaut, tout comme ses collègues, ont pris connaissance de l'audit mais refusent tout commentaire, estimant à juste titre que ce sera « à la justice de dire s'il y a eu faute ou pas ». Pour l'heure, parce que l'heure est grave, la Communautré urbaine a lancé un audit sur la gestion des huit sociétés d'économie mixte auxquelles elle prend part. Espérons qu'il n'y ait pas d'autres surprises du même genre...