DEEE : la coupe pourrait bientôt déborder
"D'ici à 2017, en une année, tous les réfrigérateurs, téléviseurs, téléphones mobiles, ordinateurs, écrans, jouets électroniques et tous les autres produits en fin de vie avec une batterie ou un fil électrique représenteraient une file de camions de 40 tonnes faisant la longueur des trois quarts de l'Équateur", avertit cette étude publiée dimanche, lancée par l'Initiative pour résoudre le problème des déchets ("Solving the E-Waste Problem", StEp), un partenariat d'organisations satellites de l'Onu, d'industriels, de gouvernements, d'ONG et de scientifiques... Voir également notre dépêche
L'an dernier, selon l'état des lieux réalisé et cartographié par le StEp, environ 48,9 millions de tonnes de déchets électriques et électroniques (DEE) ont été générées à travers le monde, soit 19,6 kilos par habitant de la planète. Il va de soi qu'on assiste évidement à un grand écart : le Qatari caracole avec 63 kilos par habitant, les États-Unis sont dans le peloton de tête, avec 29,8 kilos par tête, tandis que l'Union européenne est en moyenne à 19,2 kilos (l'Allemagne est à 23,2, le Royaume-Uni à 21,8, la France à 21,1, l'Espagne à 18 ou encore l'Italie à 17,8 kilos). En bout de liste, il est établi qu'un Indien génère en moyenne 2,25 kilos de DEE, un Brésilien 7,1 et un Chinois 5,4 kilos.
Pour ce qui est des déchets, les D3E, la Chine (7,3 millions de tonnes par an) est numéro 2 derrière les États-Unis (9,4 millions). La Chine était d'ailleurs l'an dernier le premier marché de produits électriques et électroniques, avec 11,1 millions de tonnes commercialisées, devant les États-Unis avec 10 millions de tonnes. Ces données excluent les exportations, un produit fabriqué en Chine et vendu en Europe apparaissant ainsi dans les statistiques pour l'Europe, a précisé à l'AFP un des responsables de l'étude, Ruediger Kuehr, de l'Université des Nations unies.
Se présentant comme une comparaison unique à l'échelle mondiale, l'enquête statistique vise à mieux identifier l'enjeu de ce type de déchets, difficiles à recycler et contenant des métaux ou éléments rares ou dangereux pour l'environnement. "Même s'il y a d'amples informations sur l'impact environnemental et sanitaire négatif des méthodes primitives de recyclage des DEE, le manque de données complètes a jusqu'ici rendu difficile à saisir l'ampleur du problème", a souligné M. Kuehr.
L'étude reste en revanche parcellaire sur deux points clés du secteur, faute de données : le niveau de recyclage dans le monde et l'exportation des déchets électroniques. "Pour le recyclage, nous observons des progrès substantiels mais nous n'avons pas assez de données, même pour l'Union européenne", a expliqué M. Kuehr à l'AFP. L'essentiel des déchets continue à aller en décharge au niveau mondial, estime toutefois le rapport.
Sur le volet exportations de déchets, l'étude inclut également un rapport concernant les seuls déchets électroniques aux États-Unis. Selon l'AFP, pour 258,2 millions d'appareils (ordinateurs, écrans, TV et téléphones), celle-ci conclut à un taux de recyclage et de réutilisation de 56 % du poids total. Au titre de l'étude, seulement 8,5 % des appareils jetés aux États-Unis (et 3,1 % du poids total) sont exportés. "Ce chiffre d'exportation, sur la base des données de commerce international, représentent probablement le bas de la fourchette, puisque les bons codes commerciaux ne sont pas toujours appliqués aux cargaisons exportées", avertit néanmoins l'étude. "Et cela n'inclut que les appareils exportés entiers, et pas désassemblés", a souligné M. Kuehr.
Le rapport recommande "de créer des codes commerciaux pour les produits électroniques usagés permettant un meilleur suivi et une meilleure distinction entre les cargaisons". L'étude américaine déplore également les "grandes difficultés actuelles de collecte d'informations sur le sujet dans le monde, ainsi qu'un manque de définition solide pour catégoriser et labelliser les déchets électroniques et leurs composants".