Dépollution des sols : le marché va se tasser
La réhabilitation des sites et des sols pollués est une activité en plein essor depuis plusieurs années en France. Néanmoins, la dégradation du contexte économique va peser sur les performances de la profession à court terme. L’activité devrait ainsi continuer à progresser mais à un rythme inférieur à celui du milieu des années 2000, compte tenu de la baisse des commandes. Le Groupe Xerfi vient de publier une étude approfondie sur le sujet, après plusieurs semaines d’enquêtes et d’analyses, intitulée : "La réhabilitation des sites et des sols pollués - Prévisions 2014 et perspectives à moyen terme, analyse du paysage concurrentiel" (auteur : Flavien Vottero). Voici quelques-uns des principaux enseignements de cette analyse de 220 pages...
L’indicateur d’activité Xerfi, réalisé sur la base d’un échantillon représentatif des entreprises spécialisées dans la dépollution des sols, a progressé à un rythme de +6,6% par an entre 2005 et 2013. Compte tenu de la baisse des commandes et de la dégradation du contexte économique, l’activité devrait continuer à progresser mais à un rythme inférieur à celui du milieu des années 2000. Ainsi, en 2014 le chiffre d’affaires augmentera de +3%, selon les experts de Xerfi.
- Chiffre d’affaires Xerfi des acteurs de la réhabilitation des sites et sols pollués -
Alors qu’auparavant, les opérateurs de dépollution des sols pouvaient imposer leurs conditions, les clients disposent désormais de toutes les informations nécessaires sur les coûts et les pratiques du secteur pour faire jouer la concurrence. "Par ailleurs, les principaux donneurs d’ordre feront preuve d’attentisme en 2014, réduisant ainsi les chantiers", précise Xerfi. Ainsi, les industriels devraient reporter leurs projets de diagnostic et de décontamination des terrains faiblement pollués. "Et lorsqu’ils seront contraints par l’administration de réaliser des travaux de réhabilitation, ils se tourneront vers des techniques peu coûteuses. Les pouvoirs publics réduiront également leurs commandes, compte tenu de la baisse du budget du Ministère de l’Environnement pour 2014", poursuit Xerfi. Quant aux promoteurs immobiliers, ils devraient profiter d’une légère hausse de la demande de logements neufs pour programmer de nouveaux projets. Ils feront appel aux spécialistes de la réhabilitation pour réaliser des travaux de dépollution des friches industrielles, dans un contexte de pénurie de logements dans les grandes villes.
La situation des spécialistes de la réhabilitation des sites et des sols pollués devrait toutefois s’améliorer à l’horizon 2020. En effet, la réglementation française est particulièrement favorable au développement de leur activité (mise en place d’une base de recensement des sites pollués, obligation systématique de traiter les sites pollués...) La croissance du chiffre d’affaires devrait ainsi progresser de +4 à 7% entre 2015 et 2020 (hors récession de l’économie française) selon l’étude de Xerfi. Par ailleurs, plusieurs tendances de fond permettent d’envisager cette croissance du chiffre d’affaires des spécialistes de la dépollution :
Le principe "pollueur-payeur" et le concept du "tiers payeur" devraient être introduits dans la législation relative à la dépollution des sols d’ici 2015. Cette mesure inciterait les industriels à faire réhabiliter leurs anciennes installations et à des acteurs intégrés, comme Brownfields ou Valgo, de prendre à leur charge l’obligation administrative du site.
La fermeture des sites industriels va s’accélérer, alimentant la demande en prestation de dépollution des sols. Les industriels sont nombreux à envisager de regrouper leurs activités dans des pôles centralisés. En 2012, Total a ainsi annoncé la concentration de ses investissements sur les pôles industriels intégrant des activités de pétrochimie et de raffinage au détriment des sites isolés.
Le concept de dépollution "verte" devrait se développer progressivement. Les collectivités locales et les industriels seront à la recherche de ce type de prestations, notamment pour une question d’image. Les opérateurs positionnés sur ce segment pourront ainsi proposer des prestations à plus forte valeur ajoutée et augmenter leurs tarifs.
"Face à l’évolution du paysage concurrentiel et de l’offre, les spécialistes de la dépollution doivent s’adapter, notamment en se diversifiant", préconise l’étude de Xerfi. Certains industriels investissent une part croissante de leurs revenus dans l’innovation afin de monter en gamme. Serpol a par exemple été retenu par l’Ademe dans le cadre de l’Appel à Manifestations d’Intérêt (AMI) "Solutions innovantes de dépollution et de valorisation des sites et des sédiments" des Investissements d’Avenir (voir notre article). D’autres préfèrent élargir leur offre, à l’image de Veolia Environnement qui se positionne sur le démantèlement et la réhabilitation de sites nucléaires (voir notre dépêche). Enfin, certaines entreprises se tournent vers l’international, comme Sita Remediation et ses filiales en Belgique, aux Pays-Bas et en Allemagne.