Le contentieux entre Ottawa et Manille dure et perdure depuis plusieurs années : en 2013/2014, une entreprise canadienne a expédié aux Philippines, une centaine de conteneurs identifiés comme étant des plastiques destinés au recyclage, dans un port situé près de Manille, alors que la réalité était bien différente. Le retour à l'expéditeur est programmé pour le 15 mai prochain, soit près de 6 ans après que la violation de la convention de Bâle ait été confirmée.
C'est l'histoire d'une exportation de déchets, des plastiques destinés au recyclage qui n'en étaient pas : en 2013/2014, une entreprise canadienne a en effet expédié des déchets qui n'avaient pas grand chose à voir avec les mentions figurant sur les étiquettes... L'affaire dure depuis ce temps et n'a jamais été digérée, aux Philippines.
Pétitions et manifestations ont été organisées, afin que le Canada reprenne ses ordures, la convention de Bâle (instaurée en 1992 Il pour réglementer l'exportation des déchets des pays industrialisés en vue de leur élimination à bon marché dans des pays en développement), n'ayant pas été respectée. Pour acheminer les déchets, il fallait en effet obtenir le feu vert de ministère de l'Environnement des Philippines ; l'exportateur des déchets ne l'a pas obtenu. Ce qui constitue juridiquement une exportation illégale de déchets, et accessoirement une atteinte à l'image du recyclage. Deux sénateurs locaux Francis Escudero et Loren Legarda sont montés au créneau, notamment lors d'une audience devant le comité environnemental du Sénat. Greenpeace a relayé l'histoire, qui a donc fait grand bruit.
Depuis lors les négociations n 'ont pas manqué, mais sans succès, le Canada ayant régulièrement botté en touche dans cette histoire, évoquant un litige commercial privé, et n'a donc jamais repris les conteneurs sur son sol.
Le temps passe, et rien n'avance vraiment : en 2016, le gouvernement canadien a modifié ses lois sur le transport de déchets dangereux, invoquant le cas philippin pour justifier la mise à jour de ses normes en matière d'exportation de déchets.
Le député néo-démocrate Gord Johns, qui a évoqué ce dossier aux Communes, n'a pas manqué quant à lui de souligner la réputation ternie de son pays. « Cela nuit à notre crédibilité lorsque nous n'agissons pas lorsqu'une entreprise n'a, par exemple, pas respecté ses obligations », a lancé l'élu, convaincu comme d'autres, que le Canada se doit de respecter la Convention internationale de Bâle, étant entendu qu'il «s'agisse ou non d'une question juridique pour le Canada, c'est une question morale ».
Fin avril dernier, la ministre canadienne de l'Environnement, Catherine McKenna, a quant à elle déclaré plancher sur ce dossier, afin de venir à bout rapidement de cette affaire qui n'a duré que trop longtemps. Une déclaration qui est survenue quelques heures seulement après que le président Rodrigo Duterte, dont on sait qu'il n'a pas tendance à rigoler, eut menacé de « déclarer la guerre » si le Canada ne réglait pas immédiatement la situation, le secrétaire philippin aux Affaires étrangères, Teodoro Locsin, s'étant fait écho des propos colorés du président philippin. Il a publié sur Twitter qu’il pourchasserait les importateurs qui ont fait venir ces déchets au pays ; mais a toutefois écarté, comme cela lui a été suggéré, l'idée d’expédier ces dirigeants au Canada avec les ordures, pour ne pas « aggraver encore la pollution ».
La fin du différend approche : le Canada offre finalement de rapatrier au port de Vancouver, ses 75 conteneurs de déchets expédiés il y a 6 ans aux Philippines, sous des informations trompeuses. Cette offre a été déposée alors que Manille ordonnait au Bureau des douanes philippines de charger les conteneurs sur un navire à destination du Canada d’ici le 15 mai. Le porte-parole d’Affaires mondiales Canada, Adam Austen, a indiqué jeudi que le Canada n’a reçu aucune réponse officielle, mais Teodoro Locsin a écrit sur Twitter que les déchets seraient «sans équivoque» chargés sur des navires avant cette date du 15 mai.