Fiscalité écologique : Un système qui marche sur la tête

Le 19/04/2004 à 8:55  

Fiscalité écologique : Un système qui marche sur la tête

Yves Cochet copyright assemblée nationale La fiscalité environnementale, levier du développement durable… Sujet du moment et sujet d’importance s’il en est. Pour en débattre nombreux sont les professionnels, économistes, politiques, … Yves Cochet a été député européen en 1989, vice président de l’Assemblée Nationale et a succédé à Dominique Voynet en qualité de ministre de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement. Depuis juin 2002, il est Député de Paris. Sur ce thème, il a son mot à dire et ne mâche pas ses mots : pour l’ancien ministre, le système fiscal qui nous régit marche sur la tête…
La fiscalité écologique devrait être basée sur la double application du principe pollueur payeur qui date de 1992, c'est-à-dire taxer le vice et récompenser la vertu. Taxer la pollution, l’utilisation des ressources non renouvelables et celle des biens communs et alléger les taxes sur les biens et services ayant peu ou pas d’impact sur l’environnement.

Notre système actuel, français ou européen, marche sur la tête.

La plupart des taxes sont lourdes sur le travail et légères sur la pollution, sur l’utilisation des richesses non renouvelables et du bien commun.

Une attitude absurde qui encourage l’inefficacité dans l’emploi des ressources encourage le gaspillage et pénalise l’emploi.

Ces taxes sont même immorales, elles pénalisent la valeur ajoutée du travail de chacun et oublient de la faire pour les valeurs qui sont les plus injustes socialement car les grandes entreprises leur échappent souvent en se domiciliant dans les paradis fiscaux ou dans des produits financiers défiscalisés. Les micro-entreprises et les personnes défavorisées n’ont pas les moyens de se permettre ce genre d’échappatoire.

Mais comment définir les biens communs ?

Ceux qui appartiennent à l’humanité et conditionnent son devenir comme l’atmosphère, polluée aujourd’hui, aussi bien dans ses couches basses que dans la stratosphère, le territoire avec ses sites et ses paysages remarquables, les énergies non extraites, l’eau consommable, celles des océans…
Sans une nature vivable, il n’y aurait plus d’économie du tour. Nous amoncelons pour les générations futures une lourde dette à acquitter dans le domaine énergétique. D’ailleurs la fête est bientôt finie dans le domaine pétrolier.

Je connais des optimistes aveugles, certains membres par exemple de l’Agence Internationale de l’énergie, elle dépend de l’OCDE. Ils imaginent une croissance de la consommation et de la production pétrolière pour encore plusieurs dizaines d’années. Les géologues éminents ne sont pas sur la même longueur d’onde, ils voient arriver le pic de Hubbert : entre 2008 et 2012 on aura extrait plus de la moitié des ressources pétrolières à bas coût d’extraction et la production ensuite ne pourra que décroître.

Autre phénomène, la courbe mondiale de l’offre du pétrole qui a toujours été supérieure à celle de la courbe de la demande vont se croiser à cause du boom asiatique.

Je crains que le choc pétrolier d’alors ne nous fasse prendre celui de 1973 pour un aimable divertissement. Nos économies ne se préparent pas à ce choc.

Le baril de pétrole à 31 $ sur le marché de New York risque de passer à 100 $ en 2015 et 200 en 2025.

Je ne vois pas comment l’aviation commerciale de masse pourra survivre !

Depuis 1945, le kérosène est totalement détaxé, il ne supporte pas la TIPP. Cela créé une distorsion de concurrence scandaleuse entre les transports aériens et terrestres.

Il faudrait au moins, à l’échelon européen, une TIPP moyenne sur le kérosène. Cela renchérirait le transport aérien mais économiserait sur la destruction de la couche d’ozone et les émissions de gaz à effet de serre.

Autre proposition : la taxation mondiale à raison d’un centime d’€ par Kwh de l’énergie nucléaire fortement détaxée et qui ne paie pas le coût de ses assurances.

Elle assure à peu près 2% des risques qu’elle fait courir à tout le monde.

C’est la Price Anderson Act de 1957 aux Etats-Unis qui a défiscalisé à l’époque cette industrie naissante. La loi de 1957, prévue pour 10 ans, a été prorogée plusieurs fois et court maintenant jusqu’en 2017.

C’est bien 60 ans de mesures favorables !

Je rappellerai que Tchernobyl a coûté 360 milliards de dollars.

Nous proposons qu’il y ait pour les risques majeurs un fonds mondial : un centime d’euro part Kwh en sortir de réacteur permettrait de disposer de 20 milliards de dollars par an pour 430 réacteurs dans le monde.

Ce serait un début...

Pour contacter Yves Cochet et en savoir plus visitez son site internet