FREC : le SIOM n'a pas attendu pour tracer sa route
Quel est votre sentiment premier s'agissant de la Frec telle que présentée par le Gouvernement ?
Sur la forme, la Frec n'arrive pas de nulle part, sans autre forme de préavis ; de ce point de vue, c'est très satisfaisant, puisque l'on ne part pas de rien : les collectivités locales ont travaillé sur la réduction des déchets et la valorisation/recyclage des tonnages, depuis un certain temps.
Sur le fond, la Frec est ambitieuse, et c'est ce que l'on en attendait.
Cela dit, à la lecture de la partie déchets de cette feuille de route, je constate qu'un certain nombre de points sont déjà en place ; on y travaille même depuis un moment et pour certains depuis plusieurs années.
S'il est clair que je n'ai pas la responsabilité de préconiser ce qu'il y aurait lieu de mettre en place sur les territoires, au niveau régional, je suis néanmoins un élu de la région francilienne et suis enclin à penser que si, au niveau de l'I le-de-France, tous les syndicats de déchets mettaient en œuvre ce que nous avons mis en place sur le territoire du Siom, on ne pourrait qu'être plus performants, d'un point de vue global, notamment quant à l'amélioration du tri.
Je suis personnellement encore sous l'effet de surprise de la réussite totale liée à l'extension des consignes de tri à tous les emballages plastiques, que nous avons mise en place en octobre 2016, dans le cadre d’un appel à projet Eco-Emballages/Citéo : non seulement l'adhésion fut immédiate, mais on a constaté qu'il y avait une véritable attente des habitants alors que d'une manière assez générale, lorsqu'on change les habitudes des citoyens, ça les perturbe, ce qui impose une sensibilisation préalable et beaucoup d'explications pour justifier l'objectif que nous souhaitons atteindre.
Or, dans ce cas précis, à peine quelques semaines plus tard, les habitants ont exprimé leur souhait de voir s'inverser les fréquences de collecte, à savoir passer à une collecte d'OMR par semaine, et à deux collectes hebdomadaires des bacs jaunes. Enorme succès. Ce que nous avons concrétisé, d'autres pourront le faire, étant entendu que nous ne sommes pas les seuls à avoir mis en œuvre cette simplification des consignes.
Ce plan a aussi été assorti de l'extension du parc des conteneurs à verre. Toujours est-il que si chacun passait à cette vitesse là, j'estime que nous progresserions de manière significative : pour preuve, à l'échelle de notre territoire, en un an (année pleine), nous avons gagné environ 1000 tonnes, tandis que le taux de refus a simultanément baissé de 4% environ : notre syndicat atteint déjà le taux de 80 % de recyclage des déchets d’emballages plastique qu’il collecte. Le recyclage effectif supplémentaire des déchets d'emballages n'est donc pas un leurre. Pour mémoire, Ecoemballages/Citéo subventionne non seulement le syndicat pour parfaire sa communication, mais participe également au financement de la construction de la nouvelle chaîne de tri de l'entreprise qui assure le travail et dont le centre de tri est donc parfaitement organisé pour réceptionner les nouveaux déchets plastiques résultant de l'extension des consignes. Dans notre cas, il s'agit des installations ultra modernes de Trivalo Paprec, au Blanc Mesnil.
Vous évoquez la R&D comme étant un bon moyen de progresser en matière de recyclage des déchets ménagers … Quelle serait l'implication des collectivités locales ?
Gérer les ordures ménagères demande de se doter d’outils parfois complexes, avec une approche technique, celle-ci se devant d'être en constante évolution. Pour aller encore plus loin, il est nécessaire d'innover davantage. En permanence. Pour cela, le développement de la R&D est essentiel et doit être intégré dans le Plan régional de prévention et gestion des déchets, en cours d'élaboration. A mon sens, son financement, ne peut qu'être collectif, privé/public, participatif, puisque tout le monde gagnerait à l'instauration d'un taux de valorisation et/ou de recyclage supplémentaire...
Que pensez-vous de l'idée d'augmenter la TGAP ?
Un service public de qualité doit être maintenu à l'échelle de nos territoires. Cela a un coût dont je suis bien évidemment conscient, qu'il ne faut pas revoir à la baisse si l'on veut maintenir des prestations qualitatives. Cela dit, je ne suis ni favorable à cette idée d'augmenter la TGAP, ni à l'augmentation de la fiscalité qu'il s'agisse de taxes ou d'impôts, d'une façon générale.
Depuis 8 ans, et ce à raison de tous les dix huit mois, en moyenne, nous abaissons le montant de la taxe à l'enlèvement des ordures ménagères, sans pour autant altérer la qualité du service, au contraire, puisque nous investissons en vue de rendre toujours plus performantes, nos installations. Ainsi, des travaux ont été réalisés en 2014, dans notre UVE de Villejust, à hauteur de 25 millions d'euros, ce qui en fait un très bel outil, en matière de cogénération et de récupération de chaleur fatale. Un dispositif performant de récupération de l’énergie dégagée par l’incinérateur permet de produire électricité et chauffage urbain et force est de constater que les résultats sont au rendez-vous puisque nous bénéficions désormais d'un taux exceptionnel de valorisation, chiffres à l'appui : 90% en 2017.
Nous avons par ailleurs mis sur pied un programme ambitieux de réduction des déchets, sommes entrés dans la boucle de l'extension des consignes de tri, avons adapté la fréquence des collectes, progressons globalement en matière de tri et de valorisation des déchets produits par nos concitoyens, et abaisserons de nouveau le montant de la TEOM, en 2018 pour la 5ème fois en six ans. A périmètre constant, la taxe d’enlèvement des ordures ménagères aura baissé de plus de 21% en 10 ans, tout en améliorant la qualité de service. Dès lors que nous y parvenons, grâce à l'optimisation des outils dédiés et à l'intégration de moyens techniques modernes, et par conséquent de plus en plus performants, je ne saurais être favorable à une augmentation des taxes.
Comment s'articule la nécessité d'alimenter l'UVE, productrice d'énergie, avec l'augmentation des tonnages destinés au centre de tri ?
Cela peut en effet paraitre paradoxal, mais il n'en est rien. Notre usine dispose d'une capacité de 110 000 t annuelles et nous y traitons environ 95 000 tonnes. 55 000 tonnes environ proviennent des communes du territoire et le reste relève de clients privés ou publics, d'ailleurs, qui apportent le complément. Il nous reste donc un peu de marge, mais n'avons pas à subir ce qu'il est convenu d'appeler des vides de four.
Vous avez évoqué la mise en place d'un programme local spécifique dédié à la réduction des déchets qui aurait permis d'en abaisser les tonnages de 7%. Comment s'est-il décliné sur le territoire ?
Un Programme Local de Prévention des déchets a été mis en œuvre en 2011, de manière très participative via des actions de sensibilisation menées à tous les niveaux afin de mobiliser le plus grand nombre possible de citoyens : elles sont menées par des associations, dans le cadre scolaire, ou encore auprès des habitants, ce qui s'est traduit par des réunions, des ateliers, des actions ludiques et éducatives, ce qui a permis de réduire la production de déchets par habitant de 7% en 5 ans.
A ce programme, déployé depuis cette année dans le cadre d'un Contrat d'Objectifs Déchets et Economie Circulaire (Codec), s'ajoute ce que nous appelons le dispositif des Ecoles durables. Nous apprenons aux enfants des établissements primaires (qui sont suivis sur un cycle de 3 ans) à moins gaspiller, à bien trier, les informons sur ce qu'est le recyclage et à quoi il sert... De très nombreuses classes sont concernées par cette opération qui rencontre un franc succès tant les enfants y sont attachés.
A la fin de chaque cycle, nous décernons des trophées aux écoles, les Tritou d'or, d'argent et de bronze, que je remets personnellement. Je ne manquerai pour rien au monde cette cérémonie, tant les enfants sont fiers d'être récompensés. A la suite de quoi, ils échangent et enseignent ces acquis à leurs parents. Dans cette logique d'apprentissage, nous avons inauguré l'an dernier, un espace pédagogique situé à proximité de l'usine, qui à travers un parcours d'activités multimédia montre toutes les étapes de la valorisation et du recyclage des déchets, en passant par la collecte et bien évidemment par le tri, une étape incontournable pour réussir la politique d'ensemble.