Grenelle : Nicolas Hulot fait entendre sa voix
En signant le Pacte écologique, près de 750 000 Français ont signifié leur volonté de mettre l’écologie au centre des préoccupations politiques. Dans le cadre de la préparation du Grenelle de l’Environnement, la Fondation Nicolas Hulot continue son combat : elle vient de présenter six mesures concrètes dont l’objectif est de donner une impulsion qui engage la mutation écologique de la société française. Reste maintenant à savoir si elles seront entendues et appliquées...
Ces mesures concernent des secteurs clés de l’activité des hommes et des femmes de notre pays : l’énergie et la fiscalité, l’industrie et la consommation, l’agriculture et l’alimentation, la nature et l’urbanisme, les institutions et la démocratie, l’éducation et la formation. Elles ont pour caractéristique commune d’introduire une autre logique dans le progrès humain, une logique qui tienne désormais compte de l’impératif écologique. Selon la Fondation, si elles sont adoptées, leurs implications provoqueront des changements profonds et des opportunités dans l’organisation économique et sociale, le fonctionnement démocratique, les manières de produire, de consommer, de se déplacer, de travailler, d’habiter le territoire et de penser notre rapport aux autres et au monde.
Voici un résumé succinct de ces 6 propositions :
Mettre en place une contribution climat-énergie en progression régulière pour utiliser efficacement la fiscalité contre le problème principal : le changement climatique qui menace chaque jour un peu plus l’humanité. Afin de diminuer les émissions de GES, la Fondation estime qu'il faut frapper fort pour réduire massivement le recours aux combustibles fossiles dans tous les usages et, plus largement, pour faire baisser la consommation énergétique. Cette mesure favoriserait en même temps les économies d’énergie, l’innovation pour une meilleure efficacité énergétique et le développement des sources renouvelables.
Construire une économie de fonctionnalité afin de découpler la production de richesses de la consommation de matières et d’énergie pour en finir avec l’ère du tout jetable et ses conséquences désastreuses. La production industrielle serait ainsi orientée vers des biens fabriqués pour durer (éco-conception). La vente (ou la location) de l’usage et de la fonction d’un bien se substituerait ainsi à la vente du bien lui-même. Le service fourni l’emporterait alors sur l’appropriation de biens dont l’accumulation infinie épuise les ressources et multiplie déchets et pollutions.
Organiser le transfert d’une part croissante des subventions agricoles européennes vers l’agriculture de qualité (biologique, fermière, labellisée). Dans un premier temps : par la vente sous contrat de produits alimentaires à la restauration collective (cantines scolaires, hôpitaux, maisons de retraite, restaurants d’entreprises...). L’objectif est d’ouvrir un marché rémunérateur, stable et de proximité aux agriculteurs respectueux de l’environnement. De leur côté, les consommateurs profiteraient d’une meilleure alimentation avec des prix de repas inchangés.
Créer un réseau écologique national reliant les espaces naturels protégés pour établir une continuité entre tous les milieux qui abritent la biodiversité. Il s’agit de garantir ainsi leurs fonctions écologiques d’échange et de dispersion entre espèces animales et végétales. Ces corridors de la vie seraient dotés de droits opposables aux projets d’aménagement, d’infrastructure et d’urbanisme, qu’ils soient publics, privés, collectifs ou individuels.
Mettre l’environnement au coeur de la gouvernance pour adapter les institutions, les entreprises et le fonctionnement de notre démocratie aux nouveaux défis de l’époque. Au moyen de toute une série d’outils (de la systématisation des procédures de démocratie participative, à la réforme du Conseil économique et social, au renforcement de la loi sur l’obligation d’information des entreprises ou encore à la valorisation du travail d’expertise), il s’agirait de placer les dirigeants en situation de responsabilité quant à l’intégration de la problématique écologique dans leurs sphères respectives.
Enfin, lancer une grande politique d’éducation et de sensibilisation à l’écologie et au développement durable à tous les niveaux du système éducatif, dans l’ensemble des formations professionnelles et en direction de l’opinion publique en général pour engager la prise de conscience de chacun sur la nécessité des changements. Sans cette imprégnation en profondeur, dès les bancs de l’école, aucune modification des consciences et des comportements, aucune mobilisation pour des changements structurels ne sera possible
La Fondation Nicolas Hulot, ainsi que d'autres ONG, appelle donc à un changement des modes de vie individuels et collectifs. Dans cet esprit, il ne s’agit pas seulement d’ajustements techniques ou sectoriels mais de l’amorce d’un processus de long terme pour le ressaisissement et la métamorphose de la civilisation, dont le Grenelle de l’Environnement peut constituer un premier levier. Notre planète le vaut bien.