Incinération : prudence avant la sortie du nouvel arrêté...

Le 08/06/2010 à 18:43  
Incinération : prudence avant la sortie du nouvel arrêté...
UIOM Le CNIID vient de donner son point de vue sur la prochaine parution de l'arrêté sur l'incinération et la co-incinération des déchets non dangereux et dangereux. Il prévient que les nouvelles normes en matière de suivi des rejets de dioxines ne réglent pas le problème dans le fond et vont augmenter le coût au citoyen de 2 à 6 euros. Il souligne aussi sa vigilance sur l'application de la formule de calcul de valorisation de l'énergie par les incinérateurs. Surtout, il rappelle qu'il y a de meilleures solutions de traitement que l'incinération, et que les incinérateurs français ont une très faible efficacité énergétique...  

 Avec la parution du nouvel arrêté qui fait suite au Grenelle et à la Directive cadre déchets, deux modifications vont intervenir : 
 l’obligation pour les exploitants de mettre en place un prélèvement en semi-continu des dioxines
 la prise en compte de la performance énergétique des installations. 

En réaction le CNIID prend position :  
 

Prélèvement en semi-continu des dioxines : quelles garanties ?

La mesure découle de la demande des associations au début du Grenelle d’améliorer le suivi des rejets de dioxines issues des incinérateurs existants. Il faut rappeler que l’arrêté actuel n’impose que deux analyses annuelles des dioxines/furanes : la durée d’analyse est de 32 heures maximum sur une durée annuelle de fonctionnement de plus de 7500 heures. Rien d’étonnant à ce que les résultats ne soient pas représentatifs des rejets réels : l’exploitant a tout loisir de choisir des conditions optimales de combustion et de filtration de façon à limiter la formation de dioxines pendant la courte période d’analyses.
Le nouvel arrêté imposera donc des prélèvements en semi-continu des dioxines
(1) en plus des analyses classiques. Le problème des phases d’arrêt et de redémarrage, les plus génératrices de dioxines, n’est toutefois pas réglé puisque le système de prélèvement ne sera pas activé dans ces cas-là.

Cette nouvelle mesure, en plus de la mise aux normes de 2005, si elle améliore un tant soit peu la situation à court terme, ne règle pas le problème à moyen terme : une fuite en avant perpétuelle qui impose des mises aux normes toujours plus nombreuses et toujours plus coûteuses (ces systèmes coûteront entre 2 et 6 euros de plus à la tonne, qui seront payés par le citoyen)…

Performance énergétique : le risque d’une promotion de l’incinération

Nous avons déjà souvent parlé, lors de l’élaboration de la nouvelle directive cadre déchets, de la possibilité donnée aux incinérateurs européens de bénéficier du statut de « valorisation énergétique » dans le cas où l’usine atteint un certain seuil d’efficacité énergétique, les autres gardant leur statut d’élimination.
La complexe formule de calcul européenne pour classifier les usines sera insérée dans le nouvel arrêté français et les exploitants auront obligation de fournir la performance annuelle de leur installation, Le Cniid s’est toujours opposé à l’introduction de ce critère compliqué qui vise à « promouvoir » l’incinération dans la hiérarchie des déchets (possibilité de passer du niveau 5 (élimination) au niveau 4 (valorisation énergétique)).
Les incinérateurs peuvent certes utiliser, plus ou moins efficacement, l’énergie en sortie de chaudière mais 100 % d’entre eux gaspillent en entrée des déchets que l’on pourrait soit éviter, soit mieux traiter.  
De plus, en France plus qu’ailleurs, les incinérateurs sont d’une très faible efficacité énergétique : l’Ademe a montré que plus de 85 % des usines françaises ne pouvaient prétendre à ce statut de valorisation énergétique. Le Cniid a dénoncé en parallèle le fait que les exploitants et certaines collectivités usent et abusent du vocable d’UVE (Unité de valorisation énergétique) pour mieux faire accepter leur usine de traitement. Le Cniid sera vigilant sur les modalités d’application du nouvel arrêté et sur les tentations qui pourraient naître d’embellir une situation peu reluisante.   

(1) A la différence des prélèvements ponctuels effectués sur quelques heures dans l’année, le prélèvement en semi-continu est réalisé pendant des périodes ininterrompues de 4 semaines en fonctionnement normal (l’arrêté préfectoral peut fixer une période plus courte). Le changement des cartouches justifie que l’on parle de prélèvement semi-continu