La Commission européenne déterminée à lutter contre la pollution par le mercure

Le 08/02/2005 à 15:20  

La Commission européenne déterminée à lutter contre la pollution par le mercure

Symbole chimique du mercure La Commission vient de diffuser sa stratégie pour les prochaines années en vue de diminuer la consommation du mercure et limiter la pollution due à son utilisation et transformation du minerai. Elle prévoit notamment l'interdiction des exportations depuis les pays membres d'ici 2011, sachant qu'elle est la principale exportatrice mondiale via une entreprise en Espagne...

«Nous sommes résolus à agir pour réduire les émissions de ce poison. Nous allons prendre des mesures en vue de faire baisser la demande de produits contenant du mercure dans l'UE. Nous allons également prendre les devants pour faire diminuer la quantité totale de mercure présent dans notre environnement. L’UE est le principal exportateur mondial de mercure, et il nous incombe de supprimer progressivement et complètement ce commerce.» a déclaré M. Stavros Dimas, membre de la Commission chargé de l’environnement.

Au cours des dernières décennies, la législation de l’UE a réduit l'utilisation et les émissions de mercure en Europe. Néanmoins, certains consommateurs européens de poisson et de fruits de mer dans lesquels le mercure s’accumule sont encore fortement exposés. C’est surtout le cas des personnes qui vivent dans les zones côtières de la Méditerranée (voir le dossier Europa sur la sécurité alimentaire).

Au niveau mondial, la demande reste importante pour le mercure et l'UE est le principal fournisseur.

Voici, les principales mesures qui constituent la nouvelle stratégie d'action de l'UE à l'égard du mercure :

Interdiction des exportations de mercure d’ici à 2011.

Mesures à l’échelon mondial – contribution à l’action internationale et coopération avec d’autres pays pour, par exemple, limiter le commerce du mercure, les émissions de mercure et son utilisation dans des activités telles que l’orpaillage.

Réduction de la demande dans l'UE – restrictions à la commercialisation d'instruments de mesure contenant du mercure (les thermomètres par exemple) et étude plus approfondie des autres utilisations (les amalgames dentaires par exemple).

Résorption des excédents de l’UE – stockage sûr du mercure déclassé par l’industrie et étude plus approfondie du

mercure qui circule déjà dans la société (dans les vieux produits encore utilisés, par exemple).

Réduction des émissions de l’UE – examen des effets de la législation en vigueur de l'UE, diffusion d'informations en vue d'appuyer les réductions des émissions dans les États membres et étude des limitations supplémentaires des émissions résultant de la combustion du charbon.

Protection contre les expositions dans l’UE – étude plus approfondie de l’exposition alimentaire chez les femmes en âge de procréer et chez les enfants et conseils supplémentaires sur le mercure présent dans les aliments.

Amélioration des connaissances – recherches en vue de combler les lacunes dans les connaissances en ce qui concerne le mercure.

Questions et réponses sur le mercure

1) Qu’est-ce que le mercure?

Le mercure est un élément naturel. Tout le monde le connaît sous la forme du liquide argenté qui monte et descend dans les thermomètres. Le mercure est le seul métal qui soit liquide à température et pression ambiantes. On l’appelle parfois “vif-argent”. Comme il est indestructible (il peut être transformé en un composé moins toxique, mais le processus chimique nécessaire est complexe et coûteux), une certaine quantité de mercure circule dans la société et l’environnement, dans l’air, l’eau, les sédiments et les sols, et parmi les êtres vivants.

2) D’où vient le mercure?

Du fait que le mercure est présent à l’état naturel dans la croûte terrestre, une certaine quantité est diffusée par des sources naturelles telles que les volcans. Il peut être également produit sous forme de métal liquide par le traitement d’un minerai naturel appelé cinabre (sulfure de mercure). L’exposition de l’homme et de l’environnement au mercure est accrue du fait que le mercure est utilisé dans des produits et dans des activités humaines telles que la combustion du charbon.

3) Pourquoi le mercure constitue-t-il un problème?

Le mercure et ses composés sont très toxiques pour l’homme et l’environnement. Des quantités élevées peuvent être mortelles pour l’homme, mais même des doses relativement faibles peuvent attaquer gravement le système nerveux.

Dans l’environnement, le mercure peut se transformer en méthylmercure, composé plus complexe et toxique. Le méthylmercure traverse aisément la barrière placentaire et la barrière hémato-encéphalique, et risque ainsi de perturber le développement intellectuel potentiel des enfants avant même leur naissance.

Le méthylmercure s’accumule dans certaines espèces de poisson (notamment les grands prédateurs) et les fruits de mer, que consomment certaines populations. Même si l’exposition au méthylmercure de la plupart des Européens ne dépasse pas les doses considérées comme inoffensives au niveau international, il semble que certaines populations soient exposées à des teneurs proches, voir supérieures, notamment dans les zones côtières des pays méditerranéens et dans l'Arctique.

4) Où et dans quelle mesure le mercure est-il encore produit et utilisé dans l’UE?

L’UE est un gros exportateur de mercure. Elle assure en effet environ 1 000 tonnes de la production mondiale annuelle de 3 600 tonnes. Les exportations de mercure de l’UE consistent essentiellement dans les excédents de mercure provenant du secteur du chlore et de la soude communautaire, qui élimine progressivement l’utilisation du mercure, et sont fournis pour l’essentiel par une entreprise établie en Espagne.

Cette entreprise a également produit du mercure à Almadén, en Espagne, où de gros gisements de cinabre ont été une importante source de mercure depuis l’époque romaine. La production à cet endroit a été provisoirement interrompue en 2003. En dehors de l’UE, les principaux producteurs de mercure à partir du cinabre sont le Kirghizstan, l’Algérie et la Chine.

Le mercure peut également être produit par recyclage de déchets, tels que les amalgames dentaires ou les tubes fluorescents usés. Le mercure est parfois un sous-produit de la production d’autres matières, telles que le zinc ou l’étain. La production de mercure par recyclage ou en tant que sous-produit a lieu dans plusieurs pays de l'Union européenne.

Le mercure est utilisé dans toutes sortes d’applications. Dans l’Union européenne à quinze, la demande a été d’environ 300 tonnes en 2003. Le mercure est utilisé dans les amalgames dentaires, dans les appareils de mesure et de contrôle (par exemple des thermomètres) et dans les lampes fluorescentes (dont le mercure permet d'améliorer le rendement). Le mercure est également utilisé pour certaines opérations industrielles dans le secteur du chlore et de la soude, qui produit du chlore et de la soude caustique, mais l'emploi du mercure y est progressivement supprimé.

5) Qu’est-ce que le droit communautaire et national existant en ce qui concerne le mercure a permis de réaliser jusqu’à présent?

Il existe de nombreuses mesures législatives communautaires et nationales relatives au mercure. Les aspects les plus importants sont les rejets et l'utilisation du mercure. Les mesures prises, et certains autres facteurs tels que des changements dans l'utilisation des combustibles, ont permis de réduire considérablement les émissions de mercure en Europe au cours des dernières décennies. Elles ont diminué d’environ 60 % entre 1990 et 2000.

Les émissions de mercure à partir de sources industrielles importantes sont désormais couvertes par la directive 96/61/CE relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution (directive IPPC), qui devait avoir été mise en oeuvre par les États membres avant octobre 1999, un délai expirant en octobre 2007 étant prévu pour mettre en conformité avec la directive les installations existantes. La directive IPPC couvre le secteur communautaire du chlore et de la soude, qui élimine progressivement l'utilisation du mercure dans ses procédés.

Les émissions de mercure ont été réduites par l’application de directives communautaires spécifiques concernant les grandes installations de combustion et l’incinération des déchets. Certains États membres ont introduit des contrôles plus stricts des émissions, par exemple en ce qui concerne l’incinération.

Le droit communautaire interdit ou limite strictement l’utilisation du mercure dans les domaines suivants: piles, équipement électriques et électroniques, pesticides et biocides, cosmétiques, produits de conservation du bois, agents de traitement des textiles, agents antisalissure pour les coques de bateaux, interrupteurs dans les véhicules. Certains États membres ont été plus loin, en interdisant par exemple la vente de thermomètres médicaux contenant du mercure ou en limitant l'emploi du mercure dans l'amalgame dentaire.

D’autres domaines du droit communautaire ont fixé des exigences concernant la gestion des déchets contenant du mercure, et pour la protection ou la surveillance de la qualité de l'environnement en ce qui concerne le mercure (air, eau, eaux souterraines). Le droit communautaire limite également la teneur en mercure de l’eau alimentaire et des produits de la pêche.

6) Quelle est la situation en ce qui concerne le mercure dans le monde?

L’exposition au mercure est élevée dans certaines autres parties du monde que l’UE. Les émissions de mercure diminuent en Europe, mais au niveau mondial elles continuent de croître, par exemple à la suite d’une utilisation accrue du charbon pour produire de l’électricité dans les pays en développement.

La consommation mondiale de mercure, environ 3 600 tonnes par an, demeure également assez élevée, même s’il y a une certaine réduction par rapport aux décennies antérieures. À l’heure actuelle, l’utilisation du mercure pour l’extraction de l’or à petite échelle, surtout en Afrique, en Asie et en Amérique du Sud, constitue un problème particulièrement inquiétant. Cette activité utilise environ 1 000 tonnes de mercure par an, dont la plus grande partie est rejetée dans l'environnement.

Le mercure fait l’objet de mesures nationales, mais comme il s’agit d’un polluant universel qui franchit les frontières, il constitue aussi une préoccupation nationale.

On constate par exemple les plus fortes expositions de l’homme dans les communautés arctiques, à la suite de l’accumulation de mercure dans les animaux dont elles se nourrissent traditionnellement.

Des discussions ont lieu actuellement sous les auspices du Programme des Nations unies pour l’Environnement (PNUE) sur la manière de traiter le mercure au niveau mondial. Un programme spécifique a été mis sur pied au sein du PNUE en 2003 pour encourager tous les pays à adopter des objectifs et à prendre des mesures, le cas échéant, pour identifier les populations à risque, minimiser l’exposition grâce à des campagnes d’information, et réduire les émissions de mercure anthropogènes. D’autres actions seront examinées lors du conseil d’administration du PNUE de février 2005.

Conséquences de la nouvelle stratégie de l'UE concernant l'utilisation du mercure

8) La mise en œuvre de la stratégie sur le mercure va-t-elle coûter cher et compromettre la compétitivité?

En élaborant sa stratégie sur le mercure, la Commission a effectué une étude d’impact étendue sur cinq aspects principaux :

  • l’offre et les échanges de mercure ;
  • le devenir des excédents de mercure provenant du secteur du chlore et de la soude ;
  • l’utilisation du mercure dans les dispositifs de mesure et de contrôle ;
  • le contrôle renforcé des émissions de mercure provenant des grandes installations de combustion ;
  • le contrôle des émissions de mercure dues à l’incinération.

Pour chaque aspect, au moins deux options ont été comparées, et l’option choisie a été incluse dans la stratégie pour refléter l’équilibre optimal des impacts sociaux, économiques et environnementaux concernés.

En ce qui concerne l’offre et les échanges de mercure, le coût économique direct de l’interdiction de l’exploitation proposée est faible, du fait que le prix du mercure a très fortement diminué depuis son niveau maximal au cours des années 1960. Le prix est resté relativement stable à environ 5 euros par kilogramme pendant une bonne partie de la dernière décennie (abstraction faite d’une récente hausse temporaire à 10 euros par kilogramme), et les quantités échangées (environ 1 000 tonnes par an - voir question 4) sont assez faibles.

Cependant, l’interdiction des exportations entraînera des frais de stockage des excédents de mercure provenant du secteur du chlore et de la soude. On s’attend à environ 1,5 million d’euros par an. Ce coût est cependant considéré comme justifié, eu égard à la contribution importante que la fin des exportations apportera à la solution du problème du mercure au niveau mondial. Selon l’évaluation, le coût du stockage est trop faible pour compromettre la compétitivité du secteur européen du chlore et de la soude. En revanche, l’option d’un traitement préalable en vue de constituer un composé du mercure pour une élimination permanente, qui a également été examinée dans l’étude d’impact étendue, est apparue beaucoup plus coûteuse et est considérée comme risquant d’affaiblir la compétitivité du secteur.

Les effets des mesures proposées sur les dispositifs de mesure et de contrôle dans les biens de grande consommation et dans les soins de santé seront faibles. Des solutions de remplacement d’un coût comparable existent pour la plupart des dispositifs concernés, et la substitution est déjà largement entamée.

Il a cependant été décidé de ne pas prendre au stade actuel de mesures complémentaires concernant le contrôle des émissions provenant de la combustion du charbon et de l’incinération. Ces secteurs sont en effet déjà soumis à un contrôle en vertu de mesures législatives communautaires ou nationales. En conséquence, les avantages supplémentaires qu’apporterait une action communautaire seraient limités par rapport au coût.

9) La Commission a-t-elle consulté les parties intéressées et tenu compte de leurs observations?

Au cours de l’élaboration de la stratégie sur le mercure, la Commission a procédé à deux séries de consultations. Premièrement, une réunion a été organisée en septembre 2003 pour les États membres, en vue de récolter des informations sur leur législation en vigueur et d’autres initiatives concernant le mercure, et discuter le contenu et les objectifs possibles de la stratégie. Deuxièmement, un document de consultation ouverte a été publié sur l’Internet le 15 mars 2004. Les parties intéressées ont été invitées à présenter leurs observations sur toute une série de questions, et à fournir des informations techniques, scientifiques ou économiques pour informer les responsables de l’élaboration de la stratégie sur le mercure. Une cinquantaine de réponses écrites ont été reçues.

Dans le cadre de la compagne de consultations, une réunion de consultation des parties intéressées a eu lieu le 31 mars 2004. Y assistaient près de cent représentants des États membres et d’autres pays, d’associations commerciales, d’entreprises, d’ONG environnementales, de chercheurs et d’organismes internationaux.

Toutes sortes d’avis ont été émis lors de ces consultations. La Commission a utilisé les informations et les éléments fournis, ainsi que ses propres analyses, pour identifier les aspects principaux à évaluer. Elle a ensuite évalué les options sous l’angle de leurs incidences environnementales, sociales et économiques

10) Comment cette stratégie va-t-elle maintenant être appliquée?

La stratégie va maintenant être soumise au Conseil, qui en avait demandé l’élaboration à l’origine, et au Parlement européen. Elle constituera également la base d’une position communautaire en vue de discussions internationales sur le mercure au cours de la réunion de février 2005 du conseil d’administration de l’UNEP.

La stratégie en elle-même ne prévoit aucune proposition législative, mais annonce plutôt l’intention de la Commission d’élaborer de telles propositions (par exemple pour supprimer progressivement les exportations de mercure et limiter la commercialisation des dispositifs de mesure contenant du mercure). C’est la raison pour laquelle la Commission va maintenant commencer à élaborer ces propositions avant de les soumettre au Conseil et au Parlement aux fins d’adoption.

On trouvera sur le site suivant la stratégie proposée en ce qui concerne le mercure, l’étude d’impact étendue et d’autres informations à ce sujet:

http://www.europa.eu.int/comm/environment/chemicals/mercury/index.htm

source Europa