La sidérurgie européenne s'organise face aux défis de la mondialisation
Il y a quelques semaines, en mars 2004, Philippe Busquin, membre de la Commission européenne chargé de la recherche, et Guy Dollé, président-directeur général d'Arcelor et président d'Eurofer, ont lancé la plateforme technologique européenne sur l'acier. Elle réunit les principales organisations européennes, parmi lesquelles des entreprises, des instituts de recherche et des organisations d'utilisateurs d'acier. L'objectif est d'aider la sidérurgie à relever les défis de la mondialisation, de modifier les structures de l'offre et de la demande, d'atteindre les objectifs environnementaux et de rationaliser la législation et la réglementation communautaires et nationales dans ce domaine. De plus, avec l'élargissement de l'Union Européenne, la nécessité de restructurer complètement les activités sidérurgiques se fait encore plus pressante.
La plateforme permettra de définir les moyens de promouvoir la recherche et l'innovation, et de mettre au point de nouvelles méthodes de traitement plus propres, comme la réduction des émissions de CO2. Elle aidera à resserrer les liens entre les entreprises et les universités afin de développer les qualifications et les compétences nécessaires dans ce secteur en pleine évolution. Elle formulera également des recommandations sur le meilleur moyen d'ajuster et de coordonner les instruments et ressources disponibles y compris les programmes de l'Union Européenne afin de tirer le plus grand parti de l'accès au capital, de l'expertise scientifique et du savoir-faire technique.
"L'acier constitue un secteur clé pour l'Europe" a déclaré Philippe Busquin, membre de la Commission chargé de la recherche. "Au cours des dernières décennies, la sidérurgie européenne a subi une restructuration complète, mais il convient de redoubler d'efforts. L'innovation a sauvé l'acier européen et en a fait un secteur compétitif au niveau mondial mais, pour rester compétitif et relever les défis de la mondialisation et du développement durable, il est nécessaire d'intensifier la recherche et d'accroître les investissements. Grâce à une longue expérience d'excellence en matière de coopération scientifique, d'innovation et de travail en réseau, et au soutien de la recherche sidérurgique européenne, le secteur est prêt à affronter ces défis. Les acteurs de l'industrie sidérurgique participant à la plateforme technologique sur l'acier s'efforceront de définir une perspective pour répondre aux besoins futurs et créer un véritable espace européen de la recherche dans le secteur de l'acier."
Le groupe à haut niveau réunit les principaux représentants de: Arcelor S.A., Acerinox S.A., Badische Stahlwerke GmBh, Böhler-Uddeholm, Celsa Group, Corus, Federacciai, ILVA S.p.A., Riva Acciaio S.p.A., ISPAT Europe Group S.A., Megasa, Outokumpu Oyj, Rautaruukki Oyj, Salzgitter AG Stahl und Technologie, Steel Institute VDEh, SSAB Swedish Steel, Thyssenkrupp Steel et Voestalpine AG.
L'acier, un facteur essentiel de la compétitivité européenne
L'acier est un secteur clé pour l'économie et la compétitivité de l'Europe. La sidérurgie européenne est au premier rang mondial en termes de production d'acier et à l'avant-garde pour ce qui est des méthodes employées. L'Europe jouit, par rapport à ses principaux partenaires commerciaux, d'un véritable avantage concurrentiel dû à ses efforts constants dans le domaine de la collaboration scientifique, lesquels ont été notamment déployés dans le cadre de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA).
La sidérurgie européenne représente une production totale annuelle d'environ 160 millions de tonnes et génère un chiffre d'affaires de 90 à 100 milliards € par an. Elle fournit, dans l'Union européenne, plus de 250.000 emplois directs et un nombre bien supérieur d'emplois dans les secteurs du traitement, de l'exploitation et du recyclage de l'acier. Par voie de conséquence, la sidérurgie est aussi à l'origine de millions d'emplois indirects dans de nombreux secteurs industriels. Par exemple, l'industrie de la construction métallique et le secteur automobile représentent en Europe 1,1 millions et 200.000 emplois respectivement.
De la crise au leadership
Il y a trente ans, la sidérurgie européenne employait 774.000 personnes. Dans les années soixante-dix et quatre-vingts, le secteur a traversé de graves crises et subi une profonde restructuration. Toutefois, dans les années quatre-vingt-dix, avec l'introduction de technologies nouvelles et de procédés modernes de fabrication, le secteur a pris un nouvel essor. Les privatisations et les fusions transfrontières ont également contribué à améliorer ses performances concurrentielles. À partir de 1998, le marché européen a totalement absorbé la production d'acier de l'UE et l'industrie exporte désormais ses produits de haute qualité à travers le monde.
Le secteur vise maintenant à conserver sa position de leader mondial par la mise en œuvre d'une politique de développement durable qui répondra aux besoins de la société et préservera sa compétitivité. En 40 ans, la sidérurgie européenne a réduit ses émissions de CO2 de 60% et sa consommation d'énergie de 50%, mais ce niveau de CO2 représente encore 6% des émissions totales de CO2 de l'UE.
Les défis à venir
L'industrie européenne de l'acier doit relever de grands défis sur le marché mondial, qu'il s'agisse de la concurrence avec les pays émergents, de l'obligation de satisfaire des marchés plus exigeants et de la nécessité de s'engager clairement à sauvegarder les ressources naturelles conformément à la réglementation environnementale, notamment en réduisant substantiellement les émissions de CO2. Ces défis exigent des mesures résolues à long terme de la part de tous les acteurs industriels. En particulier, les questions environnementales et l'élaboration de solutions innovantes pour de nombreuses applications nécessiteront de mettre en œuvre de nouvelles filières de production.
L'imminence de l'élargissement
La sidérurgie occupe, dans les dix nouveaux États membres de l'Union Européenne, une place relativement plus importante que dans l'Union Européenne actuelle à 15. En 2002, la production d'acier dans les pays adhérents s'élevait à 26,1 millions de tonnes, soit 16,5% de la production de l'Union Européenne à 15 (158,6 millions de tonnes). Les nouveaux États membres de l'Union Européenne ont entamé la modernisation de leurs aciéries et participent aux projets de recherche de l'Union Européenne en la matière de façon à rattraper le retard sur leurs partenaires de l'Union Européenne à 15.
Le rôle central de la recherche au sein de l'Union Européenne
La recherche est un élément capital pour faire en sorte que l'industrie de l'acier conserve son avance sur un marché mondial de plus en concurrentiel tout en répondant aux besoins de la société. Un effort accru dans le domaine de la recherche et du développement est donc indispensable. Parallèlement à ces activités, il convient aussi d'aborder les questions de la sécurité au travail et de la disponibilité d'une main-d'œuvre qualifiée et correctement formée. Le reliquat de 1,6 milliards € provenant de la Communauté européenne du charbon et de l'acier, qui fournit les recettes du "Fonds de recherche du charbon et de l'acier" (FRCA), permet de soutenir financièrement des activités de recherche dans les secteurs du charbon et de l'acier. Environ 73% du budget FRCA sont destinés à la recherche sur l'acier. Pour la période 2003-2004, plus de 43 millions € y seront consacrés chaque année et, en 2003, 49 projets seront entrepris.
En 2004, la Commission s'est engagée à soutenir des projets coordonnés (20 millions € pour le 6PC et 5 millions € pour le FRCA) afin de réduire les émissions de CO2 et de gaz à effet de serre dans les aciéries. En outre, il existe des possibilités de financement de la recherche sur l'acier dans le 6ème programme-cadre de recherche de l'Union Européenne (6PC, 2003-2006), doté de 20 milliards €, dont plusieurs thèmes prioritaires présentent un intérêt pour la recherche sidérurgique, parmi lesquels les nouveaux matériaux, les nouveaux procédés de fabrication et l'énergie. C'est là un exemple de l'intégration des systèmes de financement afin de rendre la production d'acier moins gourmande et surtout plus propre, la priorité absolue étant la réduction des émissions de CO2.
La plateforme technologique sur l'acier: des objectifs ambitieux pour l'Europe
Le Conseil européen qui s'est tenu en mars 2002 à Barcelone a invité l'UE à accroître ses dépenses de recherche de sorte qu'elles atteignent, d'ici à 2010, 3% de son PIB moyen. La constitution de partenariats public/privé paneuropéens en matière de recherche technologique (plateformes technologiques) permettra d'augmenter les investissements dans ce domaine, et de veiller à ce que les fonds soient utilisés de façon plus efficace et plus cohérente.
C'est pourquoi la Commission européenne et toutes les parties prenantes dans la sidérurgie lancent ensemble aujourd'hui la plateforme technologique européenne sur l'acier. Cette nouvelle plateforme repose sur les priorités de recherche établies avec succès au cours des deux dernières années dans plusieurs autres secteurs clés, comme l'aéronautique (par le "Conseil consultatif de la recherche aéronautique en Europe" ou CCRAE) et le transport ferroviaire (par le "Conseil consultatif de la recherche ferroviaire européenne" ou CCRFE).
Tous les participants à la plateforme technologique sur l'acier ont coopéré pour élaborer un Rapport recensant les points forts, les points faibles et les défis dans ce secteur. Ce document préfigure un ordre du jour stratégique des activités de recherche et a été cosigné par tous les représentants de l'industrie sidérurgique. Il expose quels sont les défis majeurs qui devront être relevés à l'avenir et doit fournir à la sidérurgie de l'UE des perspectives à long terme jusqu'en 2030 ainsi que des priorités de recherche stratégique claires. L'objectif essentiel est de coordonner tous les instruments et ressources disponibles y compris les programmes de l'UE afin d'atteindre une masse critique en termes de moyens financiers, de connaissances scientifiques et d'expertise technique. La plateforme a une structure ouverte et d'autres parties prenantes devraient y participer en fonction de l'évolution des priorités.
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