Le Grenelle 2 enterre la question des déchets...
Le projet de loi Grenelle 2 est soumis au vote final des députés aujourd’hui, les 26 articles relatifs aux déchets ayant été votés vendredi soir dernier, peu avant 3 heures du matin. Selon le Cniid (Centre national d’information indépendante sur les déchets), "le Grenelle 2 avait pour ambition d’être 'la boîte à outils' du Grenelle 1 mais les faibles objectifs fixés l’année dernière (réduction des déchets et du recours à l’incinération et au stockage) ne laissaient pas présager une mise en application très ambitieuse". Cela se vérifie aujourd’hui dans le texte final...
La prévention des déchets se place en tête de la hiérarchie des déchets définie par la directive cadre européenne. Pourtant, dans le texte final du Grenelle 2, les mesures censées contraindre les producteurs et les distributeurs à prendre en compte cette priorité sont étrangement absentes. Ainsi, le seul article consacré à la conception des produits (Article 78 bis B) ne mentionne même pas une prise en compte de la réduction des déchets. Aucune mesure contraignante concernant les emballages n'est prévue : ils constituent aujourd’hui pourtant 30% du poids de notre poubelle !
"Il faut se rappeler que Jean-Louis Borloo avait déclaré en 2008 que toutes les mesures visant à lutter contre le suremballage seraient prises. La seule petite mesure qui ressort après 3 ans de débat est l’installation de plateformes de déballage dans les hypermarchés d’ici 2011 (Article 78 ter)", souligne le Cniid. "Il faudra donc se consoler avec l’obligation faite aux collectivités de mettre en place un programme local de prévention des déchets d’ici le 1er juillet 2012 (Article 78 - alinéa 33)".
Point positif en apparence, la planification locale (modification des plans départementaux d’élimination des déchets), intègre désormais la prise en compte d’objectifs de réduction et de collecte sélective notamment des biodéchets (Article 78). "Malheureusement, dans l’ensemble, le texte ne sort pas d’une logique où l’incinération et le stockage restent les modes de traitement majoritaires sur nos territoires : fixer le dimensionnement des incinérateurs et des centres de stockage à 60% des déchets produits sur un territoire (Article 78 - alinéa 10) est inadmissible face aux enjeux écologiques", s'indigne le Cniid.
"Le Grenelle ne permettra même pas à la France de rattraper son retard au sein de l’UE qui a fixé un objectif de recyclage de 50% en 2020. Il ne va réussir qu’à maintenir la France au sein des élèves médiocres de l’Europe", ajoute Sébastien Lapeyre, Directeur du Centre. Les collectivités auront 2 ou 3 ans selon les cas pour modifier les plans d’élimination et intégrer les nouvelles mesures de prévention et de recyclage des déchets. Cette formulation de la loi (Article 78 - alinéa 3) présente le risque de voir d’ici 3 ans des collectivités délibérer à la va-vite pour faire passer à tout prix un projet de décharge ou d’incinérateur et de l’entériner avant la révision des plans.
"Si le décalage entre les promesses (qui n’engagent que ceux qui les font) et les 2 textes Grenelle est déjà immense, il l’est encore plus avec les réalités sur du terrain. Le Grenelle n’étant pas une fin en soi, la mobilisation devra se poursuivre au sein de la société civile pour combattre les projets vendus comme 'grenello-compatibles', qui sont pourtant trop souvent 'écolo-incompatibles'", conclut le Cniid dans son communiqué.