Les australiens ont peur du recyclage

Le 01/10/2013 à 8:34  

Les australiens ont peur du recyclage

ferrailles Pour être un peu plus précis, ce sont les « mineurs » australiens qui ont peur du recyclage « chinois ». Les mineurs australiens, au rang desquels on compte notamment BHP Billiton et Rio Tinto, sont aujourd’hui parmi les principaux fournisseurs de minerai de fer et de coke à destination de la Chine...

 Les exportations de minerai et de coke ont rapporté en 2012-13 la bagatelle de 75 milliards de $ australiens (1.44 € au cours d’aujourd’hui). Et les mineurs australiens craignent d’avoir mangé leur pain blanc.
Les perspectives de développement de la production de ferrailles en Chine aurait fait dire à Andrew Mackenzie, le patron de BHP que la production de celles-ci sera dans les années à venir une variable plus importante sur le prix du minerai et du coke que la demande d’acier elle-même.

Les perspectives de développement de production chinoise de ferrailles pourraient conduire Mackenzie à renoncer à un projet d’extension du port minéralier de Port Hedland. « Nous suivons attentivement le développement du marché de l’acier en Chine et plus attentivement encore la croissance de la disponibilité en ferrailles de ce marché » a encore précisé Andrew Mackenzie. C’est dans cette disponibilité que réside la véritable concurrence à la fonte qui est produite à partir de minerai de fer et de coke. Andrew Mackenzie manifeste à l’égard de la croissance de la production de ferrailles en acierChine une inquiétude plus marquée que celle de la plupart des analystes et de son grand concurrent Rio Tinto. Le réservoir chinois de ferrailles est considérable selon Richard McLaughlin de Hatch Associates.

A l’échelle de la consommation récente d’acier en Chine, ce réservoir pourrait déjà leur assurer des ressources pendant une dizaine d’années si l’on cessait d’en rajouter, ce qui ne sera évidemment pas le cas la société chinoise étant désormais lentement orientée par ses dirigeants vers une « société de consommation ». 85 % de ces ferrailles sont issues des véhicules hors d’usage et des produits domestiques en fin de vie et sont les matières premières de la sidérurgie électrique qui ne consomme de la fonte et du minerai de fer sous forme de préréduits que lorsqu’elle est arrivée à un niveau de développement particulièrement élevé comme aux Etats-Unis. Au fur et à mesure que les marchés de l’acier deviennent mâtures, plus on recycle de ferrailles et moins on consomme de minerai de fer et de coke pour produire de nouveaux aciers. Les moindres émissions de gaz à effet de serre et autres polluants de la sidérurgie électrique ont conduit les dirigeants chinois à encourager la consommation de ferrailles dans le dernier Plan quinquennal qui courre depuis 2010 jusqu’en 2015. Au cours de cette période, le taux de consommation de ferrailles devrait passer de 10 à 15 %, mais ces 5 points, à l’échelle chinoise se traduisent par un « sacré paquet » de tonnes.
production acier
Juste question de se faire un peu plus peur encore, BHP et Rio Tinto ont récemment publié leurs prévisions concernant les disponibilités de ferrailles chinoises dans les années à venir et il est intéressant de constater que ces prévisions diffèrent quelque peu. BHP estime qu’au rythme actuel de progression, la production chinoise de ferrailles pourrait atteindre 500 millions de tonnes à l’horizon 2025. En même temps, BHP estime que la proportion d’acier produit à base de ferrailles ne sera que de 40 % soit 5 points en dessous de la moyenne mondiale qui aura alors atteint 45 %. Les prévisions de BHP s’établissent à un niveau très supérieur à celle de Rio qui estime, selon ses calculs, que la production de ferrailles en Chine n’atteindra que 300 millions de tonnes en 2030. Rio Tinto estime que l’essentiel de la consommation d’acier au cours de ces dernières années l’ayant été dans la construction de bâtiments et d’infrastructures, cet acier mettra plus longtemps à revenir sur le marché sous forme de matières premières sidérurgiques. Rio Tinto estime qu’une ou deux décades de plus seront nécessaires avant que le cycle de l’acier soit suffisamment mâture pour générer les quantités de ferrailles avancées par son concurrent.

Chaque tonne d’acier produite par la filière fonte nécessitant 1.6 tonne de minerai et 600 kg de coke, les prévisions de BHP impliquent une différence de 320 millions de tonnes par an de minerai et 120 millions de tonnes de coke par rappproduction acier longort à celle de Rio Tinto. Les prévisions de Hatche se situent exactement entre celles des deux mineurs et il table sur un disponible de ferrailles de 400 000 000 de tonnes en 2030. Hatche estime quant à lui que si la Chine consomme l’intégralité des ferrailles qu’elle produit et que sa production annuelle d’acier atteint 1 million de tonnes, ce sont plus de 350 000 000 de tonnes de minerai de fer auxquelles les mineurs australiens devront trouver une autre destination.

Pourquoi tant de pessimisme ? Il n’est d’abord pas absolument évident que la sidérurgie chinoise parvienne au bout de sa « révolution électrique ». Car pour produit de l’acier au four électrique, il faut disposer d’importantes quantités d’énergie fiable et relativement bon marché. La Chine n’en est pas encore tout à fait là et l’avenir de l’énergie en Chine sera très dépendant d’importantes décisions politiques. Et puis il faudra compter avec la concurrence montante des préréduits pourvu que l’on dispose de gaz bon marché. Mais de toutes façons, conclut McLaughlin de ces considérations, « si l’histoire a un sens, il ne fait aucun doute que tôt ou tard, la Chine construira une puissante industrie du recyclage ».