Les déchets organiques, une mine pour l'agriculture
Face à l'épuisement global des ressources en phosphore, les déchets organiques d'origine animale, urbaine ou agro-industrielle constituent de véritables mines du futur pour la fertilisation des cultures. A la Réunion, le Cirad (Centre international en recherche agronomique pour le développement) vient de lancer une étude comparative de la valeur fertilisante en phosphore de différents types de déchets organiques épandables sur les sols tropicaux, dont les premiers résultats sont attendus d'ici un an...
Sur l'île de la Réunion, la canne à sucre occupe près de 60% des surfaces cultivées. A l'heure actuelle, sa fertilisation repose largement sur l'importation d'engrais minéraux et de synthèse. Les agriculteurs sont ainsi soumis à la disponibilité et à la volatilité des prix de ces engrais. Face à l'épuisement global des ressources en phosphore, ils doivent donc limiter, voire s'affranchir, de cette dépendance.
Une solution consiste à utiliser les déchets organiques d'origine animale, urbaine et agro-industrielle. On appelle ces déchets des produits résiduaires organiques. A la Réunion, on trouvera principalement du fumier, des fientes ou du lisier issus de l'élevage, des boues de stations d'épuration, des déchets verts et des sous-produits de la canne provenant des usines sucrières. Certains de ces déchets bruts sont également mélangés entre eux et/ou transformés par compostage ou méthanisation, offrant ainsi un large panel du point de vue de leurs propriétés fertilisantes. Ces produits résiduaires contiennent des éléments essentiels à la nutrition des plantes, et notamment du phosphore : une véritable mine pour l'agriculture.
Sur l'île, les effluents d'élevage, les composts de déchets verts et les sous-produits de la canne sont déjà utilisés à l'heure actuelle pour fertiliser les sols canniers. Parallèlement à ces gisements, le volume de production des boues de stations d'épuration ne cessent d'augmenter du fait de la mise aux normes progressive des stations d'épuration tout autour de l'île. Aujourd'hui, il est ainsi nécessaire de connaître la valeur fertilisante de chaque produit pour orienter au mieux les usages. Le phosphore étant régulièrement l'élément limitant les plans d'épandage de boues de station d'épuration et d'effluents d'élevage, le Cirad a récemment lancé en collaboration avec Veolia Eau Réunion une thèse Cifre (Conventions industrielles de formation par la recherche) sur la question.
"Le but est de comparer les effets de différents types de produits résiduaires organiques sur la phytodisponibilité du phosphore dans les sols", indique Cécile Nobile, Doctorante en charge de l'étude au Cirad. Cette phytodisponibilité dépend de plusieurs facteurs, notamment la forme chimique (organique ou inorganique) et la distribution (en phase liquide ou solide) du phosphore, des propriétés physico-chimiques des sols et des stratégies mises en oeuvre par la plante pour s'alimenter. Jusqu'à présent, la dynamique du phosphore dans les sols a fait l'objet de très peu d'études à la Réunion. Aussi, la thèse intégrera une diversité de type de produits résiduaires organiques et de sols. "Elle sera également étendue à des sols malgaches afin d'obtenir une plus grande diversité de sols tropicaux", précise Mme Nobile