Métaux de base : et si le cycle baissier ne faisait que commencer ??
La chute des métaux de base est vertigineuse et verticale. Le cuivre est tombé en séance ces derniers jours au LME à 4099 usd/tonne soit son niveau d'octobre 2005, et c'est pareil pour l'aluminium qui s'est échangé à une valeur de 1980 usd/tonne. Pour situer l'importance de la chute, au mois de juillet le cuivre flirtait avec les 9000 usd/tonne et l'aluminium dépasssait les 3220 usd/tonne. Et à y regarder d'un plus près, on se dit qu'après tout cela pourrait bien continuer et que c'est simplement l'entrée dans un nouveau cycle baissier...
Première leçon de cette crise : surtout ne faites absolument pas confiance aux experts !.... En effet, depuis quelques années, ils n'ont cessé de nous dire que face à une demande en croissance notamment dans les pays émergents et la Chine, les cours des matières premières et des métaux de base ne pouvaient pas baisser et que de toute façon ils resteraient à des niveaux élevés. Nous étions rentrés dans une nouvelle ère avec un cycle haussier durable pour les matières premières compte tenu des besoins gigantesques des pays émergents. Or, en quelques semaines, ces mêmes experts ont changé leur fusil d'épaule et constatent la dégringolade des cours tout en prévoyant que ces baisses peuvent encore s'accentuer.
Peut-être que tout simplement, une fois de plus ils ont manqué de simple bon sens et aveuglés par les taux de croissance du géant chinois, ils ont oublié que les mentalités et les comportements ne changent pas aussi rapidement qu'on le prévoit. La transformation et la modernisation à grande échelle et en quelques années de ces centres urbains chinois était-elle bien raisonnable ? A-t-on suffisamment pris en compte le niveau de vie et surtout les habitudes de la population ? Souvenons nous aussi des excès au temps du Grand Timonier avec des objectifs de productivité pour l'agriculture et la sidérurgie si élevés (1 tonne d'acier par chinois à l'époque) qu'en final, les statistiques nationales étaient truquées et que cela a abouti à une déroute sur le plan économique.
Aujourd'hui tout le monde accuse les Etats-Unis d'être les responsables de cette crise financière qui est en train de devenir une crise économique. Mais, c'est très probablement avoir une vision simpliste car la croissance de la demande des pays émergents arrangeait bien tout le monde et bien sur les pays développés. Il était de leur intérêt d'encourager au plus vite la croissance économique de la Chine en lui procurant des moyens financiers, et les responsables chinois ne demandaient que cela tellement désireux de hisser la Chine au niveau et à l'image d'une grande puissance occidentale. D'où les grands travaux, la construction de toutes ces tours d'immeubles dans les villes chinoises !
Plus simplement, ne sommes nous pas en train de nous réveiller avec une grande gueule de bois après avoir beaucoup bu et dansé constatant que maintenant il va falloir faire le ménage !
Du coup, la dégringolade des cours des matières premières et des métaux de base pourrait bien signifier que les acteurs ont simplement pris conscience que la fête était finie et que maintenant était venu de temps de faire les comptes, payer l'addition et pour ceux qui n'ont plus les moyens, de nettoyer la vaiselle !!!
Concrétement, si l'on regarde l'évolution des cours des métaux sur les six dernières années, on constate qu'en 2002, le cuivre s'échangeait aux environs de 1500 usd/tonne, et pour l'aluminium la valeur se situait aux environs de 1370 usd/tonne. C'est dire si la marge de progression à la baisse est encore importante. La brutale chute des cours depuis son record de l'été 2008 marque la fin d'un "supercycle" pour le cuivre et le marché va rester déprimé jusqu'à ce que la situation économique internationale s'améliore a déclaré Jose Pablo Arellano qui préside Codelco, la plus importante mine de cuivre au monde.
Alors, si nous sommes désormais rentrés dans un cycle baissier compte tenu de l'affaiblissement de la croissance économique mondiale, la question est de savoir quelles vont être sa durée et son intensité ?
Difficile d'y répondre. Selon l'analyste Kevin Norrish de Barclays Bank, en ce qui concerne l'offre de cuivre, elle va continuer de ralentir, voire diminuer à cause de la forte augmentation des coûts de production et d'investissement. Il estime que les cotations devraient rester à un niveau sensiblement supérieur à celui des bas de cycle précédents et que la période de dépression devrait être relativement courte. De plus compte tenu du niveau bas des stocks, et du problème de l'offre dès que la demande repartira, les cours remonteront rapidement prédit-il. Pourquoi pas ? Mais pour ma part, je suis très sceptique car une fois de plus les comportements humains mettent du temps à se modifier. Et il en faudra pour que le moteur de la consommation reparte.
- Cours LME du Cuivre depuis 2002 -