Mines d'or de Salsigne: Une triste expérience qui illustre la difficulté de l'Etat à se réformer
Dans son rapport annuel 2003 remis au Président de la République le 4 février 2004, la Cour des Comptes en ce qui concerne le Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable, a fait des observations sur la gestion des Agences de l'eau ainsi que sur l'intervention de l'Etat dans le cadre de l'exploitation des mines d'or de Salsigne qui est aujourd'hui un des sites les plus pollués de France. Il nous a semblé intéressant de vous résumer les observations de la Cour des Comptes et réponses des Ministères sur ce dernier sujet.
C'est en 1980 via le BRGM qu'a commencé l'intervention de l'Etat dans l'exploitation des mines d'or de Salsigne. Plus de vingt ans après, l'exploitation de la mine s'achève.
A l'heure du bilan, on ne peut que constater " la difficulté pour l'Etat d'arbitrer entre les impératifs sociaux de soutien à l'emploi et la nécessaire prise en compte du coût environnemental associé à la poursuite d'une activité polluante." Cela met aussi en évidence les insuffisances de la législation en matière de sites et sols pollués : en cas de défaillance de l'exploitant, c'est à l'Etat qu'incombe, dans les faits, la réhabilitation du site.
La Cour des Comptes se félicite que suite à l'affaire de Metaleurop, la législation a évolué dans le sens d'un renforcement des garanties exigées par les acteurs économiques mais elle reste réservée car " il faudra veiller à ce que son application soit effective "
Rappel des faits
Un site dont l'exploitation était en crise chronique avec une succesion d'exploitants.
Un bilan environnemental fortement dégradé avec des effets sur la santé des individus, la pollution de l'Orbiel.
La sous estimation par l'Etat de nombreux facteurs:
Le risque économique: non seulement l'exploitation a été en crise permanente, mais des contentieux persistent.
Le risque environnemental et ses conséquences financières: alors que la pollution était connue, l'Etat s'est contenté de confier l'exploitation à des tiers ignorant aussi les risques sanitaires. Pourtant, cela n'a fait qu'aggraver la situation qui à la fin incombe à l'Etat.
Une facture financière très lourde pour l'Etat: entre les pertes d'exploitation, les coûts de dépollution, le coût est supérieur à 125 millions d'euros. Une bagatelle...
Une situation révélatrice des insuffisances en matière de législation en matière de sites et sols pollués. Et pourtant, rien n'a changé jusqu'à l'apparition de l'affaire très médiatisée de la fermeture de l'usine de Metaleurop à Noyelles Godault. A ce sujet, l'Ademe et le Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable ont entrepris par voie de référé de remettre en cause la responsabilité des actionnaires, ils ont été déboutés en première instance comme en appel.
Recommandations de la Cour des Comptes
L'évolution de la législation est favorable, mais il faut " appliquer fermement les nouvelles dispositions législatives ". Il faut veiller à ce que les garanties soient suffisantes, et il est nécessaire que les services régionaux de l'environnement sous l'autorité du préfet se mobilisent.
L'Etat doit prendre en compte les risques environnementaux et éviter de prendre des décisions uniquement sous l'angle de la sauvegarde des emplois sous la pression de l'opinion publique.
Il faut séparer au niveau des services déconcentrés de l'Etat, les services en charge de l'animation et de la veille économique de ceux à qui incombe la responsabilité de la prévention des pollutions et des risques. Une telle évolution remettrait en cause l'architecture actuelle du réseau des DRIRE placé sous la double tutelle du ministère de l'Ecollogie et du développement Durable.
Réponses du Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable
Il reconnaît l'échec de ses analyses mais explique que c'est " largement " le fait de l'opérateur retenu.
Il considère qu'une séparation au sein des DRIRE des services en charge de l'animation et de la veille économique de ceux à qui incombe la responsabilité actuelle de la prévention des pollutions et des risques n'aurait rien changé à la décision de sauvegarder l'emploi... et bien au contraire, c'est une " avancée en termes d'organisation de l'Etat " d'avoir un service déconcentré d'un ensemble diversifié de missions à l'égard des acteurs industriels.
Réponses du Ministère de l'Intérieur
Il rappelle que les aides de l'Etat doivent respecter le droit européen de la concurrence .
Il indique que la réorganisation du réseau des DRIRE vient " nourrir la réflexion au sein du débat en cours de la réforme de l'administration territoriale "
Pour en savoir plus: Observations de la Cour des Comptes sur les juridictions financières (format PDF)