Modes & Déchets textiles : collections, collectes... et recyclage
Au tout début, pendant environ 18 mois, la créatrice de l'asso a personnellement collecté ces déchets, les transportant jusqu'à son appartement, d'abord en taxi puis dans une camionnette de location, où elle les triait, les revendait ou les apportait à un broyeur.
Aujourd'hui, non seulement elle emploie trois collaboratrices, mais les quantités récupérées sont telles, qu'elles ont nécessité de transférer l'activité dans un vaste entrepôt ayant appartenu à l'armée. "Si nous n'existions pas, tout cela irait à la décharge", rappelle celle qui est à l'initiative de l'idée qui a remporté un succès certain : "je savais qu'il y avait beaucoup de déperdition dans l'industrie du textile mais ignorais que cela représentait de telles montagnes".
Les déchets (pour autant que l'on puisse appeler ça comme ça) collectés reflètent cette variété puisqu'elle récupère des pièces de luxe de grands noms de la mode américaine, comme Oscar de la Renta ou Marc Jacobs, des marques plus grand public comme J. Crew, ou encore de jeunes designers qui lancent leur première collection, tout autant que des rouleaux de tissus partiellement utilisés : l'an passé, Fabscrap a récupéré 68 tonnes de ces tissus, tandis que Jessica Schreiber estime qu'il y a de la marge puisque ces tonnages ne correspondraient qu'au tiers des quantités générées par l'industrie new-yorkaise. La semaine de la Mode est l'occasion d'un grand ménage pour les marques : elles se défont d'énormes quantités après chaque saison, l'asso récupérant ainsi d'immenses sacs-poubelle noirs, remplis de tissus attendant d'être triés.
Alors que le monde de la mode est "sous pression croissante" d'en faire plus pour l'environnement, Fabscrap fournit à ses clients, sur une base annuelle, des informations sur le nombre de kilos recyclés à partir de leurs déchets, et sur la réduction des émissions de CO2 correspondante. Les entreprises peuvent ensuite utiliser ces chiffres pour "faire valoir leurs efforts".
Le travail de tri est effectué principalement par des bénévoles qui sont rémunérés en nature : en échange de trois heures de travail, ils peuvent emporter 2,5 kilos de tissu, et acheter des kilos supplémentaires moyennant sept dollars le kilo (un prix cassé, puisque les autres amateurs - étudiants d'écoles de mode, artistes, amateurs de couture aux moyens limités - sont facturés dix dollars le kilo).
Les pièces de tissus trop petites (issues de la découpe des vêtements) sont broyées pour être transformées en isolants thermiques, bourrage pour matelas ou encore sous forme de couvertures utilisées pour les déménagements.
Les pièces en Lycra, impossibles à broyer, sont notamment réutilisées pour remplir des sacs de boxe.
Au total, 54% des tissus collectés sont recyclés, 41% revendus, et 5% finissent à la décharge.
L'industrie textile uncitant à une consommation effrenée aurait bien besoin de se remettre en question afin de limiter ce gâchis monumental, ceci étant valable aux Etats Unis, mais aussi de l'autre côté de l'Atlantique ...