Nonant le Pin : les forces de l’ordre libèrent le centre de stockage de GDE
Tout a commencé le 24 octobre 2013, avec deux tracteurs : les opposants avaient mené une action qu'ils qualifiaient alors de « spontanée » en bloquant l'accès au site. Au départ, une vingtaine de personnes étaient sur place. Puis, très rapidement, c'est un véritable blocage empêchant l’exploitation du site qui a été mis en place.
Les opposants se sont en effet installés et organisés de manière à pouvoir se relayer jour et nuit : mobile-home, tente, équipements de couchage et de cuisine, un véritable campement a été mis en place pour tenir bon et maintenir le blocus. Jusqu'à 300 personnes, dont plusieurs dizaines d'élus locaux, y manifestaient régulièrement, notamment le mercredi soir…
Depuis lors, une bataille juridique sans précédent en France, ponctuée de nombreux rebondissements (voir notamment GDE : quand tout s'abat... ), alimente le dossier : certaines décisions allant dans le sens de GDE, d’autres, non. Ce qui fait qu’on n’avance pas, chacune des parties avançant ses arguments pour justifier ses exigences.
L'entreprise a demandé à maintes reprises la levée du blocus. Elle vient d'obtenir gain de cause. Le coup d’envoi de l’opération « expulsion des opposants au site d'enfouissement de déchets » de Guy Dauphin Environnement a été donné ce matin, à l’aube.
Dès 6 heures, un dispositif était déployé par la gendarmerie afin d’évacuer tout ce qui empêche l’accès au site.
A 7H30, le préfet Jean-Christophe Moraud rappelait les décisions du TGI d’Argentan (11 décembre 2013) puis de la cour d’appel de Caen (7 janvier et 22 avril 2014) qui demandaient la levée du blocus jugé illégal et l’évacuation du site : la justice a part ailleurs condamné des opposants au versement d’indemnités, en réparation du préjudice subi par la société GDE, tandis que l’Etat a lui aussi été condamné (par le Tribunal administratif de Caen, le 9 juillet dernier) à verser une indemnité provisionnelle (700 000 €) au propriétaire des lieux pour ne pas avoir débloqué ce site (voir GDE : et paf! 700 000 euros). « Il risque de devoir payer au total une indemnité de plusieurs millions d'euros à l'entreprise GDE si la cour administrative d'appel confirme cette décision ».
Les opposants sont restés sur le pied de guerre ; ils ont également fait appel à la justice à plusieurs reprises et sont encore en attente des réponses quant aux analyses environnementales qu'ils avaient réclamées…
Dans ce contexte, la préfecture de l'Orne envoyait un communiqué aux rédactions indiquant que « la Cour d’appel de Caen a fait droit à deux reprises en janvier et juillet dernier, à la demande de la société Guy Dauphin Environnement pour que soit mis un terme au blocage illégal de son site industriel de Nonant-le-Pin. (...) En application de ces décisions et malgré une mise en demeure signifiée par voie d’huissier dès janvier dernier, les opposants ont refusé d’obtempérer. Des discussions et médiations n’ont pas permis d’aboutir à la levée de ce blocage pour que GDE puisse accéder à son site, ne serait-ce que pour réaliser des travaux de maintien en condition opérationnelle de son outil industriel. Les opposants campent depuis octobre 2013 sur une position de refus ».
(...) Les forces de l’ordre sont donc intervenues ce matin pour procéder, conformément à la décision de la cour d’appel de juillet dernier, à l’expulsion des personnes et des véhicules qui stationnent illégalement sur la propriété de l’entreprise ».
Aucun acte de violence n’est à déplorer entre forces de l'ordre et associations anti-GDE, ce dont l'industriel se félicite. Le Président du Conseil régional de Basse-Normandie, Laurent Beauvais, qui s’était rendu sur les lieux afin de se positionner aux côtés de ces dernières, n'a pas obtenu l'autorisation de la préfecture de l'Orne d'accéder au site, tandis que les opposants qui ont souhaité rejoindre leurs camarades ont été maintenus à distance (certains d'entre eux ont été autorisés à participer au déménagement du campement, ndlr).
Quelques jours après la diffusion du reportage « Pièces à conviction » évoquant le dossier, il est évident que l’histoire ne s’arrêtera pas là. Si les forces de l'ordre leur empêchent l'accès au site, les opposants restent très déterminés et ne désarment pas ; campés sur leurs positions, ils ont déjà annoncé leur intention de se réorganiser rapidement et de bloquer les camions GDE qui apporteraient des déchets sur le site. Peu étaient présents ce matin... mais la présidente indique clairement que « vu ce qu'on nous a fait subir ce matin, on peut être 300, voire 400 très facilement »…
Sauvegarde des Terres d'Elevage et Nonan Environnement, alias Front de Résistance de l'Orne (FRO), a également édité un communiqué évoquant le possible blocage des camions de GDE: « Il serait surprenant que les pouvoirs publics mettent maintenant à la disposition de GDE les forces de l’ordre pour accompagner les camions de l’entreprise, tant pour enlever des déchets suspects que pour en amener d’autres qui n’en seront certainement pas moins suspects »…
Et le document en question, de rappeler que « GDE a été condamnée le 13 mai 2014 à la fermeture définitive du site pour dépôt illicite de déchets à Nonant-le-Pin » par le tribunal correctionnel d'Argentan (voir Nonant le Pin : la justice décide de fermer le site à double tour). Si l’entreprise a fait appel de ce jugement, la cour de Caen n’a pas encore tranché puisque rendez-vous est d’ores et déjà donné pour le 3 novembre prochain...