Plastique : vers un taux d'incorporation de matière recyclée obligatoire...
Lors d'un seminaire qui s'est tenu à Bercy, Aurore Maillet, représentante de la Commission avait d'ailleurs informé l'assistance en janvier dernier, que la « stratégie européenne sera très ambitieuse, via un volet législatif comprenant des mesures inédites au niveau mondial et un volet plus politique d’accompagnement des différentes parties prenantes pour avancer en matière d’économie circulaire », précisant d'ailleurs que « la stratégie mettra en œuvre des dispositions législatives contraignantes, notamment sur les emballages, des mesures de soutien à la recherche et à l’innovation ou encore des décisions fortes sur les microplastiques… ».
En juillet dernier, on enfonçait le clou : « l’Union européenne doit créer un marché performant pour les plastiques recyclés, qui inciterait à une hausse de la qualité, attirerait les investissements dans des usines de recyclage de plastiques et rétribuerait les bénéfices environnementaux », annonçait bun communiqué relayé par les recycleurs européens. Il faudra évidemment des débouchés en aval suffisants pour répondre aux « objectifs de recyclage ambitieux » des nouvelles directives européennes, directive-cadre déchets et directive emballages, les professionnels insistant sur la nécessaire sécurité juridique et la visibilité économique qu’apporteraient une telle mesure.
La Fnade n'a pas manqué d'insister sur ces points lors de son dernier congrès annuel, étant entendu que d'une manière générale, les professionnels du recyclage se sont rapidement déclarés prêts « à travailler en étroite collaboration avec l’ensemble de la chaine de valeur afin d’assurer que l’adéquation entre l’offre et la demande soit économiquement viable » (voir Plastiques recyclés : en quête de débouchés).
L'idée a fait son chemin... puisqu'un vote européen introduit l’obligation d’intégrer des matières recyclées. Les membres de la commission ENVI du Parlement européen ont en effet voté sur le rapport modifiant la directive relative aux plastiques à usage unique (SUP) proposée par la Commission européenne (voir aussi Déchets plastiques jetables : l'UE légifère) ; sous la conduite de Frédérique Ries, rapporteur de la commission ENVI du Parlement européen (BE, ADLE), le rapport s'est fixé pour objectif d'atteindre 35% de contenu recyclé dans les bouteilles de boisson d'ici 2025.
Ce document, voté ce 10 octobre, devra certes, être voté en plénière par tous les membres du Parlement européen à la fin du mois, tandis que le Conseil modifiera également la proposition de directive relative à la SUP de la Commission européenne. Des compromis, y compris sur l'objectif de contenu recyclé dans les bouteilles de boissons, devront être trouvés entre le Parlement européen et le Conseil. Il n'empêche que par ce vote, la commission ENVI a clairement indiqué que le moment était venu de fixer des objectifs contraignants en matière de contenu recyclé pour les plastiques.
Les professionnels du recyclage sont unanimes pour saluer ce vote historique, étant entendu que dès juillet dernier, Euric et la Fead avaient communément soutenu ce rapport du Parlement européen (projet publié le 9 Juillet), qui vise à rendre obligatoire l'incorporation d'au moins 25% de matières plastiques recyclées d'ici 2025 dans les bouteilles en matière plastique.
Euric, Confédération européenne des industries de recyclage, rappelle ainsi, qu'au cours des dernières décennies, « la législation européenne s'est principalement concentrée sur l'offre en fixant des objectifs de collecte et de recyclage qui jouent un rôle clé dans l'augmentation des matières recyclables et des matériaux recyclés disponibles sur le marché ». Il était temps « de stimuler la demande de matériaux recyclés pour des flux tels que les plastiques »
C’est précisément ce que vise « l’objectif de 35% de contenu recyclé dans les bouteilles de boisson d’ici à 2025, en envoyant un signal fort du marché qui orientera la demande de plastiques recyclés, récompensant ses avantages environnementaux substantiels en termes de CO 2 et d’économies d’énergie que les prix du marché ne permettent pas de supporter. récompenser. En outre, le maintien des plastiques dans la boucle contribuera à la réduction des déchets marins ».
Côté Fead, même réaction favorable : les membres « soutiennent pleinement le rapport qui rendrait obligatoire la production de bouteilles composées d'au moins 35% de plastique recyclé d'ici 2025 (…) dans la mesure où cette proposition encouragera la création d’un marché stable des matières recyclées et assurera une utilisation plus circulaire des plastiques. C’est d'ailleurs une mesure clé au regard de la production sans cesse croissante des bouteilles en plastique à usage unique, alors le recyclé ne suit pas pour l'heure la même tendance : la collecte de 90% de bouteilles en plastique en 2025, comme le propose la directive, est une première étape bien accueillie mais ne saurait suffire pour orienter les marchés » vers l'incorporation de matière recyclée dans des proportions satisfaisantes.
La Fédération européenne des activités du déchet espère « que ce vote positif de la commission ENVI donnera lieu à un vote tout aussi favorable le 23 octobre lors de la session plénière, au moment où tous les députés européens décideront s'ils souhaitent que le contenu recyclé obligatoire des bouteilles en plastique fasse partie de leur héritage ». Et d'ajouter que c'est même « la dernière occasion pour le Parlement européen d'agir avant la fin de son mandat : si ce n'est maintenant, l'UE perdra au moins trois ans »...
Les professionnels rassemblés au sein de la fédération européenne ne manquent pas de souligner qu'il faudrait environ 10 milliards d'euros d'investissements pour innover et développer les capacités de tri et de recyclage de l'ensemble des plastiques, au niveau de l'UE. « Notre industrie est prête à effectuer ces investissements nécessaires mais pour autant qu'il y ait des mesures législatives assurant une consommation adéquate de plastiques recyclés, ce qui est plus que jamais nécessaire au regard de l'interdiction chinoise d'importer certains flux de déchets »...
La Fnade salue elle aussi, cette belle avancée, y voyant un incontestable « signal pour accélérer le recours aux matières plastiques issues du recyclage en substitution de plastiques vierges », étant entendu que ce vote correspond bel et bien aux souhaits qu'elle a exprimés (notamment lors de son dernier congrès), à savoir : en amont, capter plus de matières plastiques à recycler lors de la collecte des déchets, et en aval, intégrer plus de matières plastiques recyclées lors de la production de nouvelles bouteilles, tant il est évident « qu'il faut que l’ensemble de la chaine fonctionne », un message sur lequel avait insisté le président de la Fnade, Philippe Maillard. Cela dit, « si nous saluons ce vote en faveur du recyclage des bouteilles plastiques, nous resterons attentifs aux modalités d’application selon les pays, notamment en ce qui concerne la compétitivité des matières issues du recyclage car c’est un élément essentiel », indique Philippe Maillard ; « or, cette compétitivité a besoin d’être soutenue par des dispositifs incitatifs et un cadre réglementaire ».
Pas question en effet, d'injecter 2 milliards d'euros (investissements jugés nécessaire par les professionnels français pour tendre vers le 100% de plastiques recyclés ou valorisés) avant de bénéficier de quelque assurance à cet égard...