Ils ne sont que 18. 18 sites de démantèlement au monde, agréés par l'Union Européenne parce que travaillant comme elle l'exige, pour ce qui touche au recyclage des coques des ex navires de guerre ou de commerce. Bordeaux Port Atlantique, le site le plus important de France dans ce secteur d'activité, via la cale sèche de Bassens, compte parmi eux ; il y accueille depuis près de 10 ans des bâtiments à déconstruire...
Depuis un peu plus de 8 ans en effet, le site de Bassens a fait de la déconstruction des bateaux de grand gabarit, sa spécialité : Derichebourg s'est chargé du démantèlement du Hilde G, tandis que Veolia y travaille depuis 2008 (en juin, la société Veolia Propreté Soborec démarrait son activités sur le port girondin ; à la fin du même mois, le premier navire pénétrait l'enceinte pour y être démantelé : le Matterhorn, un cargo de 3 500 tonnes), la Marine Nationale ayant confié quelque temps plus tard à l'opérateur, le soin de déconstruire deux de ses ex fleurons sur ce même site.
Pourquoi Bassens?
L'opérateur a choisi ce site parce que sa forme de radoub est la seule sur l'Hexagone (247 mètres de long) à pouvoir accueillir des navires aussi grands que l'ex-Jeanne d'Arc (9 000 tonnes) arrivée à quai en novembre 2014, dont le démantèlement touche à sa fin ; le chantier accueillera ensuite, à compter de la fin de ce printemps, l'ex-Colbert (pour l'heure en cours de désamiantage) qui subira le même sort.
A la fin 2017, 36 mois se seront écoulés lorsque les deux coques auront fini d'être désossées ; ce marché de démantèlement des deux bateaux militaires avait été confié à Veolia pour un montant de 11,5 millions d’euros. La ferraille résultant de ces travaux a été réinjectée dans l'outil de production des aciéries du pays basque, pour l'essentiel.
Y aura-t-il une vraie filière industrielle en France pour la déconstruction des nombreux navires (et des gros gabarits en particulier) qui sont hors service, tant il est vrai que les contraintes liées au démantèlement des bateaux, ont leurs spécificités? Ce serait bien (les Recycleurs Bretons et Gardet & De Bézenac sont également sur les rangs pour des tonnages moins importants). L'objectif de ces opérations, il est bon de le rappeler, est bel et bien de déconstruire proprement et d'éviter des pollutions aberrantes comme on le voit ailleurs dans le monde. Cela dit, l'objectif est aussi de valoriser les matières recyclables. Or, si l'on prend le cas de la ferraille, dont les cours ont sévèrement dévissé, au cours de ces dernières années... cela peut constituer, à terme, un manque à gagner pour la Marine, comme pour l'opérateur (un démantèlement de cette importance ne se fait pas en quelques semaines, mais en quelques mois).
La Marine Nationale privilégie les chantiers européens (qui ne sont pas légion) pour la déconstruction de ses bateaux (il faut dire que les péripéties de l'ex Clemenceau, parti en Inde, puis revenu faire des ronds dans nos eaux, avant d'être convoyé en Angleterre pour s'y faire démanteler n'a rien eu de glorieux). Une chose est sûre : les besoins sont importants puisque près de 200 coques de toutes tailles attendent dans les cimetières marins.
Si le belge Galloo, qui a gagné de jolis appels d'offres, dispose de ses propres installations, ce n'est pas le cas des français, qui pour démanteler ces coques d'importance sont obligés de louer l'unité bordelaise. Tout retard sur le déroulement des opérations (on a parfois des surprises, comme ce fut le cas de la Jeanne d'Arc), peuvent être alors lourds de conséquences financières...