PREDEC : les acteurs des déchets du BTP (se) manifestent
Les acteurs des filières de gestion des déchets du BTP de la région Ile de France ont pris connaissance du souhait du préfet Jean-François Carenco d’obtenir l’annulation du Plan régional de prévention et de gestion des déchets de chantier d’Ile-de-France (PREDEC), au motif qu’il instaure un moratoire de trois ans sur le stockage en Seine-et-Marne…
De la même manière que Rome ne s’est pas faite un jour, le Predec (Plan de prévention et de gestion des déchets issus des chantiers du BTP) a nécessité du temps, et même un certain temps, avant que l’accord ne soit conclu, puis voté.
Sauf qu’en février dernier, le préfet de région a annoncé un recours administratif contre ce plan francilien, ce qui a en premier lieu, fortement déplu aux élus de tous bords (Chantal Jouanno, vice-présidente de la Région en charge de l'environnement étant, sur ce coup, sur la même longueur d’onde que les élus socialistes). Et pour cause : le Predec proscrivait pendant plusieurs années toute création ou extension de décharges de déchets de chantier. « Nous ne comprenons pas pourquoi le Préfet annonce aujourd’hui qu’il attaque le Predec devant la justice administrative alors que le plan, prévu par la loi et fruit d’une longue concertation, a été validé en juin 2015 », expliquait-on volontiers le 12 février dernier, dans l’entourage de Chantal Jouanno, tandis que du côté socialiste (les parlementaires du département (à savoir les sénateurs Vincent Eblé, Nicole Bricq, Emeric Brehier, et les députés Olivier Faure, Eduardo Rihan-Cypel) accompagnés dans cette démarche par les élus du Conseil régional), on écrivait à Manuel Valls et à Ségolène Royal afin d’exprimer la « surprise d’apprendre par voie de presse » cette demande d’annulation « d’un plan ambitieux, adopté en juin 2015 sous l’impulsion de la précédente majorité ».
« J’ai déféré ce plan au tribunal pour le faire annuler dans les délais. La Région ne saurait poser ce type d’interdiction. C’est l’affaire de la loi. Et ce plan ne règle rien de nouveau en matière de déchets », avait en effet déclaré, quelques jours plus tôt, Jean-François Carenco dans les colonnes du journal Les Echos.
« Ce plan est indispensable à notre région puisqu’il permet d’anticiper les 43 millions de tonnes de déchets qui seront générées par les travaux du Grand Paris jusqu’en 2026 ». « Il favorise par ailleurs, l’émergence de filière et d’une économie circulaire locale et contribue à développer le recyclage des matériaux, conformément au vote de la loi de transition énergétique, poursuivent les élus. Il prévoit en outre un moratoire sur le stockage de déchets de chantier en Seine-et-Marne afin d’assurer un plus juste équilibre de la répartition des déchets avec les autres départements franciliens », ont également plaidé les élus PS.
Pour l'ensemble de ces professionnels, ce choix préfectoral de souhaiter obtenir l'annulation du Plan régional de prévention et de gestion des déchets de chantier, peut déstabiliser la totalité de ce qui est engagé, ce plan, issu d’un travail de concertation de plus de 5 ans de l’ensemble des parties prenantes régionales, ayant abouti à la mise en place d’objectifs ambitieux de prévention et de valorisation des déchets en Ile-de-France.
Il est bon en effet, de rappeler que si le plan n’apporte pas toutes les réponses aux problématiques soulevées, il a le bénéfice de donner aux acteurs régionaux un cadre structurant dans lequel ils trouvent de la visibilité par rapport à leurs investissements et de la pérennité aux emplois qu’ils créent. Ce point est d'ailleurs particulièrement important, au moment où des projets majeurs comme le Grand Paris Express ou encore la candidature de la ville à l’organisation des Jeux Olympiques 2024 sont mis en œuvre.
Les maîtres d’ouvrage publics ou privés voient dans ce plan un guide pour enfin mettre en place une gestion durable sur leur chantier. Sans celui-ci, cette volonté restera lettre morte. Un certain nombre d’éléments de ce plan sont d’une grande importance pour les entreprises de recyclage, qui souhaitent s’appuyer sur celui-ci pour augmenter significativement les tonnages de déchets du BTP valorisés dans la région et contribuer ainsi à la transition vers une véritable économie circulaire.
Les acteurs de la filière ne souhaitent pas se prononcer sur l’applicabilité du moratoire qui prévoit qu’aucun nouveau site de stockage de déchets ne soit créé en Seine-et-Marne. Néanmoins, ils souhaitent attirer l’attention sur le fait qu’une annulation du PREDEC retarderait la mise en œuvre de la planification et qu’il sera difficile de remobiliser les acteurs de l’ensemble de la filière.
Ceux-ci souhaitent donc réaffirmer leur soutien aux objectifs du Plan existant et estiment que le désaccord du préfet avec le moratoire ne saurait remettre en cause l’ensemble du plan issu d’un consensus régional. « Nous avons tous l'occasion d'accélérer la transformation des filières de gestion de déchets de chantier, ne laissons pas passer cette chance», concluent les signataires du manifeste qui espèrent bien, être entendus...
Pour compléter, voir aussi Essonne : un site de valorisation des déchets du BTP