Recyclage des PET complexes : Soprema ouvre la voie
L'entreprise indépendante et familiale aujourd'hui centenaire, a mis au point un nouveau procédé qui s'inscrit dans sa stratégie d’éco-sourcing visant à progressivement se soustraire aux matières premières pétro-sourcées : depuis plus de vingt ans, en effet, le groupe déploie une politique d’éco-sourcing forte lui permettant de substituer toutes les matières premières petro-sourcées par des matières premières éco-sourcées, ou recyclées.
Elle a ainsi développé une solution technologique qui permet la fabrication de matière vierge à partir de déchets d’emballages plastiques (bouteilles de lait opaques, barquettes monocouche et multicouches, etc.). Non recyclés jusqu'à maintenant, ces plastiques post consommation sont désormais transformés en polyols, l’un des composants principaux des mousses isolantes en polyuréthane pour le bâtiment, l'étanchéité et l'isolation des bâtiments comptant parmi les cœurs de métiers de la société.
La présentation de cette performance, qui a eu lieu le 9 juillet dernier dans le cadre de l'inauguration de Sopraloop, est à mettre en relation avec la volonté affichée du gouvernement est de parvenir à 100% de recyclage pour toutes les matières plastiques, en 2025. Une annonce que le président de l'entreprise, Pierre-Etienne Bindschedler, voit « comme une belle opportunité » d'aller de l'avant. « En France, chaque année, 130 000 tonnes de déchets en PET ne sont pas recyclés chaque année (...) », complète François China, directeur industriel de l'entreprise.
Installé dans un entrepôt de la zone portuaire de Strasbourg, le procédé mis au point en partenariat avec Citeo dans le cadre des travaux sur la recherche de débouchés et l'Ademe, dans le cadre du Programme d’investissements d’avenir (PIA), permettra à Soprema de produire cette année 5 500 tonnes de polyol à partir de 3 500 tonnes de déchets. L'objectif est de doubler cette production d'ici cinq ans, pour parvenir à 10 000 tonnes à partir de 5 500 à 6 000 tonnes de déchets entrants, avant de créer d'autres unités de recyclage au sein du groupe.
Il a imposé un investissement de 7 millions d'euros (dont une subvention de l'Ademe) et s’appuie sur des programmes de R&D d’environ 30 millions d’euros..
« Les déchets d'emballages, bouteilles, et autres barquettes en plastiques sont d'abord triés pour éliminer les "contaminants" puis broyés et lavés avant d'être transformés en paillettes, lesquelles sont ensuite dépolymérisées par adjonction d'additifs au sein d'un réacteur. Il s'agit d'un procédé non breveté. C'est avant tout un savoir-faire industriel », confie François China,
Et un savoir faire « payant » puisque d'ores et déjà, il a annoncé que « le prix de revient du polyol est jugé intéressant, notamment en ce qu'il met l'industriel à l'abri des fluctuations souvent très fortes du marché ». A cela s'ajoute que « le taux de substitution du polyol vierge par du recyclé peut être réalisé jusqu’à 50 %, Sopréma visant, à terme, avec l’expérience, un taux de substitution bien supérieur »... L’unité Sopraloop desservira en tout état de cause, et dans des proportions grandissantes, les deux usines de polyuréthane du Groupe basées à Saint-Julien-du-Sault dans l'Yonne et à Hof (en Allemagne), situées à équidistance de Strasbourg. « En 2017, les groupes pétrochimiques ont cessé leur fourniture de ces substances en raison d’une crise mondiale, qui nous a sérieusement impacté. Notre but est de sécuriser nos approvisionnements tout en créant une filière de recyclage de PET, jusque-là destinés à l’incinération. Nous avons su créer les compétences pour en refaire des matières premières vierges et donc une ressource et non un déchet (…) Cette crise de 2017 nous a incité à garantir notre autonomie vis-à-vis de ces géants qui privilégient des logiques purement financières, sans souci des conséquences pour leurs clients comme Soprema », expose le directeur industriel.
« Cette technologie de glycolyse du plastique PET n’avait encore jamais été appliquée industriellement aux emballages plastiques à cause de la pollution inhérente à ces derniers, que personne ne savait appréhender. D'autres procédés, pour d'autres finalités, devraient voir le jour prochainement chez d'autres industriels en France. On est sur une filière en création », rappelle et souligne Sophie Genier, directrice des services recyclage chez Citeo. Une filière qui permet de répondre à deux enjeux : limiter l’impact des plastiques en recyclant les PET difficiles à recycler, d'une part, et développer la production de matière première recyclée de haute qualité, par ailleurs. La collaboration avec l'éco-organisme se poursuivra à travers les flux pilotes : Sopréma traitera en effet les déchets d'emballages PET complexes issus des nouveaux centres de tri dans le cadre de l’extension des consignes de tri qui couvrira l'intégralité du territoire en 2022. Maintenant que le procédé est au point, il s'agit d'alimenter la machine et donc de favoriser la constitution d’un flux français -encore inexistant- avec la réception de ces matières.
Comme quoi, dès lors que la collecte est mise en place, que le gisement est ciblé, massifié, constitué, avec régularité et fiabilité, les industriels ne passent pas à côté de ce qui peut être recyclé. C'est leur coeur de métier de constamment s'adapter et innover et donc de mener la recherche en ce sens.