Recyclage du verre : on peut encore et toujours mieux faire
Friends of Glass, une communauté créée et développée par la FEVE en s'appuyant sur les réseaux sociaux, est passée en 4 ans, de 30 000 amis, à 115 000 friends cette année. Il faut dire qu'un plan d'action musclé a été mis en place, avec trois thématiques déclinées sur trois années consécutives : 2014, santé et sécurité alimentaire (le verre is perfect), 2015, le goût (avec le verre aucune migration, le goût du produit est intact), et 2016, le recyclage (là, il n'y a pas photo : avec une sacrée longueur d'avance -plus de 40 ans de pratique-, fort peu de monde ignore aujourd'hui que le verre se recycle, quand tout le monde reconnaît les conteneurs pour ce faire... encore faut-il y aller, cela va sans dire).
La France n'a pas à rougir
Schématiquement, la France récupère le verre d'emballage via deux modes de collecte : le porte à porte, à hauteur de 20% et l'apport volontaire, à hauteur de 80% (avec 180 000 conteneurs répartis à ce jour, sur l'ensemble du territoire) ; et c'est ainsi que d'année en année, les quantités de verre d'emballages sont devenues de plus en plus conséquentes, que le nombre de conteneurs a considérablement augmenté, et que les verriers ont pu, avec des progrès techniques concrétisés, enfourner de plus en plus de ces emballages devenus déchets, transformés, grâce aux investissements conséquents mis en œuvre par les centres de traitements, lesquels transforment ces déchets d'emballages en un calcin répondant strictement au cahier des charges imposé par les industries verriers.
La roue tourne et la boucle se ferme... bien avant que l'on nous bombarde de l'économie circulaire à tout va.
Ceci expliquant cela, l'Ademe annonçait un taux de 74,6% de recyclage en 2014 (avec un peu plus de 2 millions de tonnes collectées, soit 30 kg/hab./an), contre 73,9% un an plus tôt (et 40% en 1995), étant entendu que ceci constitue une moyenne, et que l'on assiste à de grandes variations d'un région à l'autre... Toujours est-il que le calcin est depuis plusieurs années la première matière première du verrier (avec un taux d'enfournement moyen de 65%, quand certaines verreries incorporent 90% de calcin dans leur production), et que la France, qui arrive en 3ème position du palmarès, ne fait pas pâle figure à l'échelle européenne, l'Allemagne caracolant en tête avec un taux de recyclage du verre consommé de 89% (ref 2014), suivie par l'Italie, avec 77% (ref 2014).
17 usines, situées à proximité des vignobles ou des lieux de production de la bière, et 14 centres de traitement ultra modernes (10 à 15 millions d'euros d'investissements sont nécessaires pour chacun d'eux, étant entendu que 9 d'entre eux sont équipés du tri optique automatisé, ce qui assure une séparation du verre blanc du coloré et permet d'augmenter le taux de calcin blanc) qui transforment le déchet d'emballage verre en calcin constituent le dispositif industriel en France, le centre de traitement constituant une pièce maîtresse de l'édifice « recyclage » : passage obligé, chaque site, qui réceptionne les tonnages de verre brut collectés (lesquels comprennent en moyenne 3 à 5 kg d'infusibles par tonne) a pour mission de capter tout ce qui est incompatible avec le four verrier. A l'issue du process mis en œuvre dans chaque centre de traitement, il ressort un calcin quasi pur (< 20gr d'impureté à la tonne)... ce qui permet au verrier d'en enfourner davantage sans craindre pour son four.
Or, plus on enfourne de calcin pour produire de nouveaux emballages, moins on consomme d'énergie, moins on émet de CO2 : « une tonne de verre recyclé implique, par rapport à une tonne de verre vierge, une économie d'émissions de gaz à effet de serre de 500 kg », souligne Jacques Bordat, qui rappelle par ailleurs que la collecte sélective du verre génère aussi une économie significative pour les collectivités locales en n'ayant pas à faire la dépense de 130 euros en moyenne /tonne de verre échappant à l'incinérateur ou à la décharge, tout en percevant 23 euros par tonne de verre collecté (tarif 2017) au nom de la garantie de reprise (1000 contrats de reprise ont été signés entre verriers et collectivités)...
Aller plus loin... via le tri, mais aussi par l'éco-conception
Pour aller plus loin, malgré un taux très satisfaisant de recyclage, la filière doit désormais faire face au défi « d'augmenter le pourcentage de trieurs systématiques (55%) face aux trieurs occasionnels (35%) », indique Jacques Bordat. Il s'agira d'optimiser davantage encore le geste de tri, en densifiant le réseau de conteneurs, notamment dans les grandes villes, tout en misant sur le look de ces conteneurs afin de sensibiliser les 18/29 ans qui ne sont que 66,8% (selon une étude Friend of Glass) à pratiquer le tri consciencieusement : on misera selon les communes, sur le design des conteneurs, la facilité d'accès, une meilleure intégration au mobilier urbain ou un affichage plus « marquant » des messages incitant au recyclage.
Aller plus loin... cela peut passer aussi, par les industriels metteurs sur le marché qui usent et rusent de toutes sortes de méthodes pour apparaître et se distinguer sur les linéaires... C'est le cas sur le marché de la bière : une nouvelle mode ou tendance, consiste pour ne citer que cet exemple, à utiliser de plus en plus volontiers des étiquettes en matière plastique (qui permettent d'imiter avec transparence à l'appui, une sérigraphie sur la bouteille), en lieu et place des étiquettes traditionnelles en papier. Ce qui n'est pas sans conséquence au stade du traitement du verre pour en faire le précieux calcin, puisqu'on constate une perte en ligne... Si ce constat n'a pas remis en cause la nouvelle façon d'étiqueter les bouteilles de bière chez Heineken, cela a incité à la réflexion, puis à l'action. Ce que nous a décrit par le menu, Laurence Perrayon-Daniel, Responsable Qualité &Développement Packaging/Produit, Heineken France.
« 92% des volumes vendus sont brassés en France et l'ensemble de nos marques correspond à 10% (en poids de verre) de la collecte nationale. L'étiquette qui doit informer le consommateur, constitue un corps étranger solidement collé à la bouteille dans la mesure où elle doit résister à l'embouteillage, au transport, à la mise en rayon, voire au seau à glace, mais se décoller chez le traiteur qui prépare le calcin, ce qui n'était évidemment pas le cas : du verre restant collé à l'étiquette partait de ce fait à l'enfouissement, ce qui représentait environ 4 000 tonnes par an, étant entendu que lorsque ces fragments de verre collés à l'étiquette en plastique n'étaient pas éjectés par le process, cela posait problème au grand damne du verrier »... puisque ce plastique, matière organique, restait à 75% (en poids) dans le calcin.
« Ce problème dû à la présence d'une bonne partie de nos étiquettes, ne nous a évidemment pas laissés indifférents, puisque nous sommes nous-mêmes très exigeants en ce qui concerne la qualité des bouteilles que nous achetons pour y introduire nos bières »...
Les objectifs sont atteints et le résultat au rendez-vous : moins de 1% de pertes verrières pour les centres de traitement (contre 4% auparavant) et moins de 20% du poids des étiquettes dans les fours verriers (contre 75% auparavant)... « Ce succès constituant par ailleurs un avantage compétitif pour nos fournisseurs qui mettent cette nouvelle étiquette en avant, quand bien même il faut compter un surcoût de l'ordre de 20% à l'achat. Dès lors que cette nouvelle étiquette sera plus largement répandue, le surcoût estimé ne sera plus que de 8 à 10% tout au plus »...