Ce n'est pas un petit caillou, mais une belle pierre qui pourrait peser de tout son poids très bientôt... De fait, 250 millions de tonnes de déchets du BTP sont produites chaque année en France ; il sera nécessaire et même impératif d'en recycler l'essentiel des tonnages dans un proche avenir, au vu des différents plans en cours à l'échelle nationale, qu'il s'agisse de la prévention des déchets ou du plan industriel « Recyclage et matériaux verts ». Dans ce contexte, nul doute que la Fédération des entreprises du recyclage « colle » à la réalité politique du moment... avec pour objectif de participer activement à la construction d'une véritable filière du recyclage de ces déchets si encombrants et si précieux tout à la fois, pour autant que l'on se donne les moyens de se pencher sur leur valorisation...
Ce 5 septembre est à marquer d'une pierre blanche... Federec, saisissant l’opportunité de la dynamique gouvernementale du moment en faveur du recyclage, a en effet officialisé sa forte implication dans le domaine de la bonne gestion des déchets du BTP, hier matin...
Avec une production dix fois plus importante que celle des déchets ménagers, les déchets du BTP, qui affichent les 250 millions de tonnes par an sur la balance, constituent un challenge de poids : pour bien faire, il faudrait en recycler plus des deux tiers, d'ici 2020. 70%, très exactement. Autant dire qu'il y a fort à faire, la France ayant accumulé un retard certain en la matière puisqu'en l'état actuel des choses, elle trie et ne valorise que 40% des tonnages. Encore faut-il réussir le virage de la professionnalisation du traitement de ces déchets... C'est précisément l'objectif de la Fédération nationale des entreprises du recyclage.
L'essentiel des tonnages est enfoui ; l'Ile de France, première région productrice de ces déchets manque cruellement d'installations de tri et il
en va de même de très nombreuses régions, telles que celle de Nantes ou encore de Marseille, tandis que l'Alsace est plutôt bien lotie... et que le Nord est en cours d'équipement satisfaisant.
Après deux ans environ de réflexions, menées dans le cadre d'un groupe de travail, Federec, qui avait annoncé la création prochaine d'une nouvelle branche (voir Federec se branche sur les déchets du BTP), a officialisé son souhait et greffé une douzième branche à sa structure.
Elle sera présidée par Erwan Le Meur, Directeur délégué en charge du pôle Chantiers au sein du groupe Paprec (voir Paprec Chantiers : recyclage sur le tas!), formé au recyclage des déchets du BTP chez Ypréma, entreprise spécialisée dans cette activité qu'il a quittée en 2008. Claude Prigent, qui préside Ypréma (voir Recyclage : c'est l'histoire d'un avenir) , assurera la vice-présidence de cette nouvelle branche.
Au conseil d'administration, 8 personnes : Jordan Meesemaecker (Egger), Jean-Pierre Luthringer (réseau Praxy), Andrien Pascal (Queyras Environnement), Jacques Rolland (Sibelco), Bruno Fradet (Veolia), Olivier Ponti (CMS), Gilles Nantet (Nantet Recyclage), Michel Bonfils (SME), auxquelles il convient d'ajouter 4 représentants régionaux : Christian Vitse (représentant Federec Nord Pas de Calais), Mikael Gourvenec (représentant Federec Est), Pierre-Yves Barbazanges (représentant Federec Ouest), Henri de Wulf (représentant Federec Région Parisienne).
« L'enjeu est de taille », souligne immédiatement Erwan Le Meur, rappelant les objectifs du plan du Conseil National des Déchets (2015-2025), celui du plan industriel « Recyclage et matériaux verts » de la « Nouvelle France Industrielle », qui a pris du retard du fait du récent remaniement gouvernemental, mais aussi le projet de loi sur la transition énergétique (avec les travaux sur les bâtis en perspective). « 60 entreprises, dores et déjà membres de Federec, pratiquent le recyclage des déchets du BT.jpg)
P et comptent faire de ce gisement à conquérir, une source de croissance pour leur activité ; 40 autres se sont déjà déclarées intéressées », à l'idée d'intégrer le groupe de la première heure...
« L'idée est d'abord de compléter le maillage territorial en matière d'installations de tri et de recyclage des déchets inertes : la France a accusé un retard certain sur ces produits : on a clairement besoin de trier et de recycler plus » afin de remonter la pente. « Il s'agira aussi, de mettre en relation la Construction et le Recyclage : ce sont deux mondes qui pour l'heure ne se connaissent pas vraiment »... mais aussi d'organiser un nécessaire rapprochement avec les entreprises du BTP, qui produisent ces déchets de chantier. « Nous souhaitons travailler avec eux, notamment à travers des projets collaboratifs, pour trouver des solution innovantes pour la fin de vie des matériaux mis sur le marché aujourd’hui »... A ce propos, le tout nouveau président de la branche regrette que les professionnels du recyclage se heurtent à une difficulté de taille ; en effet, « les diagnostics déchets avant démolition (obligatoires via la loi Grenelle II) ne sont réalisés que dans 10% des cas, et ne sont pas nécessairement bien faits ! ». Il faudrait « optimiser ces diagnostics déchets afin de mieux appréhender les chantiers de démolition importants (plus de 1000 m², ndlr) »...
« La formation tout autant que l'information sont encore embryonnaires en matière de déchets de chantier et d'environnement que ce soit dans l'univers des architectes ou dans celui des ingénieurs ou techniciens du BTP qui ne bénéficient d'aucun cours sur ce sujet ; or, ce sont ces spécialistes qui peuvent être à l'origine des commandes de ces matériaux recyclés pour réaliser des ouvrages, d'où la nécessité pour nous de nous faire connaître auprès de ces professionnels et de les informer quant aux qualités des matériaux recyclés dès lors qu'ils sont recyclés dans les règles de l'art »...
Les recycleurs du BTP étaient jusqu’à maintenant représentés par le seul Syndicat des Recycleurs du BTP (SR BTP), lequel est affilié à la Fédération française du bâtiment (FFB) et à la Fédération nationale des travaux publics (FNTP) . Il a vu le jour en 2007. « L’objectif n’est pas de concurrencer le SR BTP mais plutôt de construire un pont via un partenariat de qualité», explique le président de Federec BTP qui justifie cette
stratégie en précisant que « certains de nos adhérents et des membres du bureau font déjà partie du SR BTP. Nous souhaitons jouer la complémentarité : contrairement au SR BTP, Federec BTP ne compte pas de producteur de déchets parmi ses membres ».L'idée maîtresse est de faire en sorte de générer une vision produit et non une vision déchets à l'ensemble des parties prenantes... Et de rappeler que dans la masse des déchets du BTP, dès lors que l'on récupère ferrailles, bois et autres PVC, ces matières connaissent une seconde vie grâce au recyclage. Il nous faut maintenant aller plus loin : le tri se devra d'être optimisé : il faut « cesser d'encombrer les décharges avec ces matières urbaines parfaitement valorisables et réutilisables »... « Taverny est l'une des dernières carrières de gypse en France, le gypse étant l'un des composants essentiels du plâtre... Or des déchets de plâtre continuent d'aller en décharge »...
Il va de soi que la sortie du statut de déchets de ces déchets BTP recyclés ne sera pas oubliée... Sur le sujet, on peut compter sur le vice-président Claude Prigent, pour qui il s'agit d'un cheval de bataille de première importance... et ça tombe bien : le ministère consulte actuellement (voir notre dernière dépêche) afin d'avancer sur ce dossier...