Statistiques européennes des déchets : la Fnade conteste
Eurostat a publié cette semaine les statistiques de recyclage et valorisation des déchets des ménages dans l'UE-28 pour l'année 2012 (voir notre article). Selon la Fnade, ces chiffres ne reflètent pas objectivement la réalité, compte-tenu d’une harmonisation insuffisante des données. Problème : ceux-ci sont utilisés pour bâtir les politiques publiques. Ils servent en particulier à fixer les objectifs chiffrés de recyclage et de valorisation, et par là-même induisent les investissements nécessaires pour les atteindre...
"Les statistiques européennes laissent penser que la France a des performances de recyclage en retrait par rapport à certains pays voisins", indique la Fnade (Fédération nationale des activités de la dépollution et de l'environnement). Une étude, réalisée à la demande de la Fédération par le cabinet allemand BIPRO, identifie des différences dans le calcul effectué par les pays sur les différents modes de traitement ; ces écarts affectent les taux de recyclage/valorisation des pays. A titre d’exemple, la France ne prend pas en compte les déchets triés et exportés. L’intégration de ces données, comme le font les autres pays, augmenterait le taux de recyclage de l'Hexagone de 44,5% à 50,9% sur l’ensemble des Déchets Non Dangereux (DND). Ramenés au seul périmètre des Déchets Ménagers et Assimilés (DMA), cette intégration des déchets triés exportés mettrait la France à un taux de recyclage dépassant les 40%.
On peut aussi lire que l’Allemagne n’a pas recours au stockage pour l’élimination de ses déchets municipaux. La France a mis en installations de stockage 24 millions de tonnes de DMA en 2010. L’Allemagne, la même année, a stocké plus de 30 millions de tonnes de déchets alors que les données Eurostat ne font apparaître aucun stockage pour les Déchets Ménagers et Assimilés. "Le 'zéro stockage' allemand n’est donc pas une réalité. Il résulte d’une approche consistant à montrer qu’aucun déchet municipal allemand n’est stocké sans prétraitement. Ceci est pourtant aussi le cas de la majorité des déchets municipaux français avec les déchèteries, avec plus de 20 filières REP (Responsabilité Elargie du Producteur) en action et avec les centres de tri ; ils sont pourtant déclarés par la France comme déchets ménagers non pré-traités et stockés", explique la Fnade.
L’étude de la Fédération pointe ainsi des différences de calcul sur :
la méthode de comptabilisation des déchets exportés ou importés ;
la prise en compte, soit des tonnes de déchets entrants, soit sortants des centres de traitement ;
le périmètre des déchets municipaux (notamment les déchets verts et de marché / nettoyage des rues) ;
la qualification du mode de traitement retenu sur des sites multi-installations qui biaise parfois le taux de déchets stockés en ne retenant que le mode de traitement prédominant ;
la prise en compte ou non des résidus de traitement de déchets municipaux qui sont, selon les pays, qualifiés de déchets municipaux ou de déchets industriels (car ayant été prétraités par une installation industrielle) ;
la qualification de l’utilisation de certains déchets pour remblaiement ou aménagement de centre de stockage qui, selon les pays, est comptée en recyclage ou pas.
"Les statistiques européennes constituent un outil de pilotage de la Commission européenne lui permettant de s’assurer du respect des objectifs de la directive cadre déchets par les différents pays de l’Union. Il est essentiel que ces statistiques reposent sur des règles communes et obligatoires", souligne la Fnade. Afin que la France ne soit pas pénalisée par une politique 'déchets' basée sur des données non comparables, la Fédération demande donc une méthode unique de calcul fondée sur des définitions plus précises dans les questionnaires transmis par Eurostat, ainsi qu'un reporting européen englobant à l’avenir les DND des ménages et ceux des activités économiques. "Les statistiques publiées par Eurostat ne couvrent que les déchets ménagers, soit moins de 30% de la production française des déchets non minéraux non dangereux", précise-t-elle au passage.
Et Michel Valache de rappeler l’importance des travaux menés actuellement qui guideront la politique publique française de gestion des déchets pour les prochaines années : "A travers le plan déchets 2014-2020, la stratégie fiscale sur les déchets annoncée à l’issue des travaux du Comité de Fiscalité Ecologique (CFE), ainsi qu’à travers la révision prochaine des objectifs de recyclage de la directive cadre européenne déchets, de nouvelles ambitions à atteindre seront fixées. Il est essentiel que ces objectifs prennent en compte les écarts de méthode entre les pays dans l’élaboration des statistiques européennes car ils détermineront durablement l’ensemble de la filière", déclare le Président de la Fnade.