Stockage : quels déchets pour Cigéo ?
Evoqué dans notre journal à plusieurs reprises, le projet Cigéo est conçu pour permettre le stockage des déchets français les plus radioactifs (voir notre article). Son cahier des charges repose sur 2 exigences essentielles exprimées par le Parlement : une sureté qui, après la fermeture du stockage ne doit pas nécessiter d’intervention humaine, pour limiter les charges pour les générations futures, ainsi qu'une exploitation réversible d’au moins 100 ans, c’est-à-dire la possibilité pour les générations suivantes de décider du devenir de l’installation, voire de récupérer les colis de stockage...
Si Cigéo est autorisé, la mise en exploitation est prévue en 2025 : les colis de déchets seraient acheminés jusqu’au centre de stockage où ils seraient contrôlés avant d’être transférés à environ 500 mètres de profondeur. Ce centre industriel est conçu pour le stockage de l’ensemble des déchets les plus radioactifs produits par le parc nucléaire actuel, depuis sa création et jusqu’à son démantèlement.
Les déchets pour lesquels Cigéo est conçu représentent moins de 4% du volume des déchets radioactifs français mais concentrent plus de 99% de la radioactivité totale de ces déchets ; ils proviennent pour l’essentiel de l’industrie électronucléaire. Les déchets de haute activité sont, en majorité, produits par le recyclage des combustibles usés des centrales nucléaires ; ils sont conditionnés dans une matrice en verre coulée dans un colis en inox. Les déchets de moyenne activité à vie longue sont issus des structures métalliques qui entourent le combustible (coques et embouts) ou des résidus liés au fonctionnement des installations nucléaires (boues...) ; ils sont conditionnés dans des colis métalliques ou en béton. A ce jour, environ 30% des déchets de haute activité et environ 60% des déchets de moyenne activité à vie longue sont déjà produits. Dans l’attente de l’ouverture de Cigéo, ils sont entreposés sur leur site de production (La Hague, Marcoule...).
Les déchets radioactifs perdent leur radioactivité au cours du temps. Le stockage consiste donc à les isoler suffisamment longtemps, en prenant en compte leurs spécificités, afin que la très faible radioactivité qui pourrait finir par se retrouver au contact de l’homme à très long terme, ne présente pas de risque pour la santé et pour l’environnement. Les déchets concernés par Cigéo ont des durées de vie très longues. Ce confinement doit donc pouvoir être assuré pendant plusieurs centaines de milliers d’années. Une fois les constructions humaines dégradées, c’est la couche géologique argileuse choisie pour implanter le stockage qui assurera principalement cette fonction. Elle est située à environ 500 mètres de profondeur et est épaisse d’au moins 140 mètres.
En 2 décennies, l’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) a développé un savoir-faire scientifique unique sur la gestion et le stockage des déchets radioactifs dans l’argile. Après avoir défini le champ des connaissances à acquérir, l’Agence a initié dès 1994 des travaux de reconnaissance géologique sur le territoire français. Suite à une candidature des départements de la Meuse et de la Haute-Marne, le gouvernement a autorisé en 1999 l’Andra à construire un laboratoire souterrain pour étudier in situ l’argile du site de Meuse/Haute-Marne. En 2005, sur la base de 15 années d’études et de recherches, elle a remis au gouvernement un dossier scientifique et technique ("Dossier 2005 Argile"), dans lequel elle montre la faisabilité du stockage géologique dans la couche argileuse étudiée et apporte la garantie de sa sûreté à long terme.
En 2009, après 4 années d’études supplémentaires, l’Andra a remis à ses évaluateurs un ensemble de documents présentant les grandes options retenues pour la conception, la sûreté en exploitation et après fermeture et la réversibilité du stockage. Ces éléments sont complétés par une présentation des études et recherches coordonnées par l’Agence sur l’entreposage temporaire des déchets et par la définition d’une zone de 30 km² pour l’implantation des installations souterraines qui a été validée par le Gouvernement après une importante démarche de concertation avec les acteurs locaux.