Taxe carbone : qui, quoi, quand, comment ?
A l’occasion de son récent déplacement dans l’Ain (01), Nicolas Sarkozy, accompagné de Jean-Louis Borloo et de Chantal Jouanno, a présenté les modalités de la taxe carbone. Celle-ci s’appliquera aux énergies fossiles et sera calculée en fonction de leur contenu en CO2. Dechetcom vous dit tout sur cette taxe controversée qui fait grincer pas mal de dents...
La taxe carbone a pour but d’encourager la modification des comportements des entreprises et des ménages vers des pratiques de consommation et d’achat plus sobres en carbone et en énergie ; sa logique est entièrement celle du pollueur-payeur. Elle permet de mieux prendre en compte les coûts engendrés par les dommages infligés à l’environnement qui ne sont pas reflétés dans les prix actuels des énergies fossiles.
En taxant les produits qui sont source d’émissions de CO2, la taxe carbone devrait ainsi permettre à la France de réduire ses émissions de CO2, et donc de respecter ses engagements nationaux, communautaires et internationaux de maîtrise de ses émissions. A titre d'exemple, cette taxe a été mise en place en Suède en 1991 et a permis à ce pays de réduire ses émissions de gaz à effet de serre (GES) de 12% entre 1990 et 2008.
La taxe carbone s’appliquera aux énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon, GPL), car leur combustion dégage du CO2. Pour chaque énergie, elle sera calculée en fonction de leur contenu en carbone. L’électricité est exclue car elle issue en France à 80% du nucléaire et de plus en plus des énergies renouvelables (EnR). Quant à la part d’électricité produite par les centrales thermiques en pointe, celle-ci est déjà incluse dans le système européen de quotas de CO2.
Cette "éco-taxe" sera calculée sur la base de 17 euros la tonne de CO2 émise, ce qui correspond au prix moyen du CO2 observé sur le marché des droits d’émission depuis sa création en février 2008. Elle représentera ainsi près de 4,5 centimes par litre de fioul et de gasoil, 4 centimes par litre d’essence et environ 0,4 centime par KWh de gaz. Le principe d’une progression à venir de la taxe carbone est très clairement affirmé.
Pour les plus grandes installations industrielles, une harmonisation européenne est mise en place par le paquet "climat-énergie". Les 1 400 sites industriels français concernés devront drastiquement réduire leurs émissions d’ici à 2020 (-21%), sous peine de devoir acheter très cher des permis d’émissions supplémentaires. Pour les ménages et toutes les autres entreprises qui consomment des énergies fossiles (65% des consommations nationales), en revanche, rien n’était prévu pour les inciter à réduire leur utilisation de ces énergies. C’est la taxe carbone qui s’appliquera à tous demain, sans aucune exonération, dans le but d'inciter chacun à adopter des comportements plus respectueux de l’environnement.
Lors de son annonce, M. Sarkozy a insisté sur le fait que cette nouvelle mesure ne devrait pas se traduire par une hausse des prélèvements en France. "Des engagements très clairs sont pris à cet égard : la taxe carbone n’aboutira pas à une hausse des impôts car d’autres impôts seront diminués ou supprimés. Il s’agit d’opérer un transfert de fiscalité pour faire changer les comportements, pas de lever une nouvelle taxe pour le budget de l’Etat. Les recettes de la taxe carbone seront restituées à 100 % aux ménages et aux entreprises. Le coût moyen par foyer de la taxe sera de 74 euros en 2010. En 2010, le montant moyen de la compensation sera également de 74 euros", a-t-il indiqué.
La compensation pour les ménages tiendra compte de la taille de la famille et du lieu de vie : le ménage vit-il dans une zone où existent des transports urbains (techniquement un "périmètre de transports urbains") ou pas. Pour une taxe carbone commençant à 17 euros par tonne de CO2 en 2010, la compensation pour un adulte vivant dans une zone desservie par les transports en commun s’élèvera à 46 euros. Pour un adulte vivant dans une zone non desservie, le montant sera de 61 euros. Enfin, chaque personne à charge du ménage ouvrira droit à un montant supplémentaire de 10 euros. Au total, pour un couple avec deux enfants, la compensation atteindra 112 euros dans une zone desservie en transports en commun, contre 142 euros s’il vit en zone rurale. Pour les ménages qui paient l’impôt sur le revenu, la compensation réduira le montant de l’impôt à payer. Pour les ménages non imposables, la compensation leur sera versée sous la forme d’un chèque vert. La réduction d’impôt comme le versement du "chèque vert" interviendront au début de l’année 2010.
Quant aux entreprises, la taxe professionnelle sera supprimée en 2010, au moment même où sera créée la taxe carbone. Par ailleurs, une commission indépendante sera créée pour suivre la fiscalité écologique, en toute transparence. Elle devra examiner les recettes de la taxe carbone, la part payée respectivement par les ménages et les entreprises. Elle devra s’assurer que les compensations fonctionnent bien à l’euro près.
Enfin, les Français seront incités par la taxe carbone à réduire davantage toutes les consommations d’énergie inutiles. Pour aller au-delà, Nicolas Sarkozy souhaite que l’Etat poursuive massivement sa politique de soutien aux économies d’énergie et au développement des EnR. La gamme des solutions est aujourd’hui très large :
l’éco-prêt à taux zéro pour l’isolation des logements (30 000 au maximum, sur 10 ans, sans condition de ressources) sera fortement développé ;
le crédit d’impôt "développement durable" permettant de réduire son impôt sur le revenu à l’acquisition d’équipements du foyer utilisant les EnR ;
le bonus/malus écologique sur les véhicules ;
le super bonus écologique (5 000 euros) pour l’achat d’un véhicule très bas carbone ;
ou encore les aides à l’acquisition de logements neufs aux normes plus exigeantes.