Tri des déchets : petite piqûre de rappel
A vouloir trop bien faire, il arrive parfois que l'on se trompe, ce qui est régulièrement le cas avec le tri de nos déchets ménagers recyclables. Ainsi ce n'est pas parce que les plastiques se ressemblent qu'ils doivent s'assembler : les jouets sont encore et toujours interdits de séjour sur les lignes de tri. Idem pour les jardinières de plantes, en pur plastique, elles aussi. Même s'ils sont en matière plastique, ces objets du quotidien intégreront le lot des refus... Il en va de même des verres à pied cassés ou des plats en pyrex qui ne doivent pas intègrer le conteneur dédié aux pots, bocaux et bouteilles en verre...
S'il n'est pas nécessaire de laver ses déchets d'emballages, on ne mettra pas pour autant dans son bac jaune, sa boite de ravioli à moitié pleine, ni son carton de pizza avec la dernière part ou la croûte dont personne n'a voulu, et encore moins des chaussures, casseroles, cocottes, bombes aérosols, fers à repasser, chauffages d’appoint et autres petits DEEE au prétexte qu'ils se recyclent... oui, c'est vrai, mais par le biais d'autres filières et via les déchetteries : le bac jaune n'a jamais été mis à dispo pour en faire une mini déchetterie de proximité.
C'est une problématique récurrente dans tous les centres de tri que de constater la présence de déchets de cette sorte, sans parler des feux d'artifice (qui disposent eux aussi, d’une filière spécialisée), mais pas seulement. Parmi les objets les plus ahurissants qui ont été répertoriés sur les tapis de tri, un pistolet (chargé) récupéré sur le site de l’usine Savoie Déchets, de Bissy, ce qui avait incité, au printemps dernier, Patrick Leseurre, délégué (pour le Sirtom de Maurienne) du comité syndical de Savoie Déchets (composé de 39 élus, représentant les 13 collectivités membres) à faire un exposé quant aux aberrations du tri constatées lors d'une réunion du comité syndical du Syndicat. Ne serait ce que parce que la découverte de cette arme de poing a inévitablement entraîné l’arrêt des installations (pendant cinq heures), avec mise en place d'un périmètre de sécurité, suivi d'une légitime intervention de la gendarmerie. Le bilan financier s'était quant à lui imposé : « 5 000 € perdus pour Savoie Déchets ».
De l'erreur de tri... à l'horreur de tri, il n'y a parfois qu'un pas que certains franchissent allègrement.
Ainsi, constatent de nombreux exploitants d'unités de tri, il n'est pas rare de trouver ici et là, serviettes hygiéniques, préservatifs et couches sales, voire quelques chiens ou chats morts (parfois dans un état abominable), dont on s'est débarrassé sans autre forme de scrupules dans le bac jaune, et qui atterrissent sur les chaînes, le tout étant insalubre et potentiellement infectieux.
Il arrive même que « des têtes de cochons circulent sur les tapis ». Outre le spectacle peu ragoûtant là encore, il est à mettre en regard de la confession musulmane de nombreux agents de tri : « un incident de cette sorte impose une heure et demie d’arrêt, le temps de tout nettoyer »... « et un coût de 1 500 € à chaque fois », témoigne Patrick Leseurre.
Au diable la sensibilité pourtant bien légitime des personnels qui devront subir le spectacle, les odeurs qui vont de pair, puis « traiter » le problème en évacuant ces déchets du reste des recyclables, à la main... Autant de « gestes non civiques » manquant singulièrement de respect pour ces hommes et femmes, qui exécutent leur mission, le tri à fin de recyclage, et qui ne sont pas là pour supporter ces agissements. De très nombreux citoyens savent que le bac jaune n'est pas l'exutoire pour y mettre tout et n'importe quoi, on en est convaincu, mais visiblement pas tous (quand bien même la liste des déchets autorisés figure sur les bacs).
De fait, des informations convergentes remontées de plusieurs centres de tri, répartis sur plusieurs régions, justifient le choix de réaliser cette petite piqûre de rappel... puisque ces désagréments se constatent un peu partout. Mais ce n'est pas tout!
Reste une source d'angoisse majeure : les bouteilles en verre cassées, qui peuvent sévèrement couper, mais aussi les déchets médicaux (poches de sang ou à urine, lancettes, cathéters) potentiellement dangereux et les sempiternelles seringues usagées (dont le présence est constatée dans quasi tous les centres de tri) qui peuvent piquer, avec à la clé, la crainte d'une contamination. Si ces dernières ne sont évidement pas légion, il est régulier d'en trouver parmi les déchets destinés au recyclage.
A chaque incident de ce genre, les conséquences sont au rendez-vous. Dans un premier temps, la chaîne est stoppée de sorte que chaque opérateur puisse vérifier son poste de travail : les seringues ont souvent tendance à circuler à plusieurs sur les tapis... La blessure est désinfectée sur place en suivant une procédure mise en place en collaboration avec la médecine du travail. L’agent piqué est conduit auprès d’un médecin (avec l'aiguille) qui met en place un protocole de soins médicaux et de nombreux dépistages après prise de sang, l'attente des résultats étant source d'inquiétudes pour la personne concernée et ses collègues. Concrètement, principe de précaution oblige, un traitement spécifique est ensuite administré à l'agent victime de ce genre de piqûre, pendant six mois ; il doit subir une prise de sang hebdomadaire car une maladie peut se déclarer au bout de trois mois. Immédiatement après l'incident, en parallèle, une enquête est diligentée pour identifier la tournée qui est à l'origine de l'objet piquant.
On ne rappellera jamais assez que les déchets de soins ne peuvent être traités comme des déchets courants et ne doivent en aucun cas être jetés dans la poubelle jaune.
Depuis plusieurs années, des boîtes hermétiques disponibles en pharmacie, que les patients en auto traitement peuvent retirer gratuitement sur présentation de leur ordonnance médicale, permettent de mettre à part le matériel piquant, coupant ou perforant qui est collecté par Dastri, éco-organisme mis sur pied pour ces déchets spécifiques (lancettes, aiguilles, seringues, cathéters… et tout autre objet dangereux qui aurait pu servir aux soins). Une fois pleine, la boîte doit être rapportée au professionnel de santé qui fera appel à un prestataire agréé. Les personnes qui sont suivies à domicile doivent laisser au professionnel de santé le soin de récupérer les déchets pour en assurer l'élimination.
Les déchets de soin dits « mous » (bandelettes sanguines ou urinaires, tubulures exemptes de piquants, cotons ou compresses, stylos et flacons d’insuline) doivent être déposés dans la poubelle grise...
Pour conclure, il est bon d'insister : le mauvais tri n'est pas sans impact. Outre le nécessaire respect que nous devons tous aux personnels affectés au tri sur les chaines, qui ne sont pas là pour gérer du caca ni avoir du tracas, ce sont des camions qui tournent, avec des rallongements de parcours (et donc des coûts supplémentaires de transport répercutés) pour les déchets qui devront quitter le centre de tri et prendre la direction de l'ISDND ou de l'UVE... Erreurs de tri et incivilités cumulées ont un coût non négligeable pour la collectivité et donc pour les usagers. En d'autres termes, il convient de regarder à deux fois ce que l'on met dans le bac des OMR et ce que l'on place dans la poubelle jaune, dédiée au recyclage, au risque de voir ses impôts locaux majorés de surcoûts qu'il n'est pas si compliqués d'éviter.