TVA et énergies renouvelables : c’est chaud !!!
Les Sénateurs débloquent enfin la TVA sur les réseaux de chaleur… mais semblent créer une nouvelle injustice sur les énergies renouvelables, à la grande déception des associations comme Amorce qui après avoir amorcé puis soutenu le débat pendant des années, pourrait avoir envie de mettre le feu aux poudres…
Grâce à la modification de la directive TVA en janvier, les sénateurs ont pu enfin voter, dans le cadre de la deuxième lecture du projet de Loi d’Engagement National pour le logement, l’application du taux réduit sur l’abonnement des factures des usagers des 450 réseaux français.
A partir de cette semaine, le texte sera amendé une ultime fois par les députés en espérant qu’ils confirmeront l’abonnement à 5,5% voté par le Sénat, mais surtout qu’ils permettront l’application à toute la facture de chauffage lorsque les réseaux de chaleur utilisent majoritairement des énergies renouvelables : près de 300 000 logements pourraient être concernés par cette mesure ambitieuse en faveur de la lutte contre le changement climatique et la dépendance énergétique … à l’heure où le cours du baril de pétrole flirte avec les 75 $.
Depuis 1999, les ménages qui se chauffent à l’électricité ou au gaz bénéficient d’une TVA à 5,5% sur leur abonnement, tandis que les 3 millions d’usagers des réseaux de chaleur français, généralement des logements sociaux et des établissements publics, continuent de payer l’abonnement de leur facture de chauffage à 19,6% (voir notre exposé du 17 janvier dernier "Réseaux de chaleur : Amorce s’insurge contre l’iniquité de la fiscalité").
Cette situation serait triplement injuste :
Elle surtaxe de 45 à 90 € par an des foyers à bas revenus, les logements sociaux étant les principaux usagers des réseaux de chaleur en France.
Elle pénalise en particulier les énergies renouvelables (bois, géothermie, valorisation énergétique des déchets) et la cogénération qui sont utilisées dans la plupart des 450 réseaux de chaleur existants dans près de 350 villes et villages.
Elle crée une distorsion de concurrence entre des modes de chauffage concurrents.
Depuis 6 ans, cette injustice subsiste car la directive européenne sur la TVA de 1992 ne mentionnait pas la chaleur parmi les produits pouvant bénéficier du taux réduit. Le 24 janvier dernier, les 25 états membres ont officialisé leur accord sur la révision de la directive TVA, accord qui corrige cette erreur en permettant l’application du taux réduit. La directive 2006/18/CE du 14 février 2006 a depuis confirmé cette évolution.
Soutenus par l’ensemble des groupes politiques et avec l’accord du Gouvernement, les sénateurs ont donc enfin pu adopter la TVA à 5,5% sur l’abonnement des réseaux de chaleur dans le cadre de la deuxième lecture de la Loi d’Engagement National pour le Logement. Pour les réseaux de chaleur français et pour Amorce, il s’agit d’un vote historique après 20 ans de bataille fiscale, mais qui doit maintenant être confirmé par l’Assemblée Nationale fin mai avant publication et application.
Mais le Sénat a souhaité aller plus loin en adoptant également, après de longues discussions, une TVA réduite sur la part variable des consommations lorsque le réseau de chaleur est alimenté à plus de 80% par du bois et de la biomasse.
Il s’agit d’une initiative importante pour le développement des énergies renouvelables, permettant ainsi d’éviter l’utilisation d’énergies fossiles et importées, et de lutter activement contre le changement climatique. Cependant, cette mesure est remarquable mais doublement injuste. D’une part, le seuil de 80% empêche tous les grands réseaux en milieu urbain, utilisant plusieurs énergies dont le bois d’en bénéficier (réseaux de Grenoble, de Lyon, …). Mais surtout, il est totalement incompréhensible que la centaine de réseaux utilisant d’autres énergies renouvelables telles que la géothermie, la chaleur issue de la valorisation des déchets, le biogaz, le solaire, mais également la cogénération ne bénéficient pas de cette mesure. Leurs usagers qui utilisent in fine une énergie aussi renouvelable que le bois continueront à payer une TVA à 19,6%.
Amorce demande donc au Gouvernement et aux Députés, outre la confirmation du taux réduit sur l’abonnement des réseaux de chaleur, d’aller au bout de leur démarche en proposant une mesure cohérente d’application du taux réduit de TVA sur toute la facture des réseaux de chaleur en particulier lorsqu’ils utilisent majoritairement des énergies renouvelables ou de récupération.
"Nous sommes sur le point de lever une injustice de près de 20 ans sur le chauffage … il serait dommage d’en créer une nouvelle sur les énergies renouvelables. Tous groupes politiques confondus, les députés doivent donc défendre dès mercredi prochain une mesure plus ambitieuse pour les énergies renouvelables et plus juste pour les usagers".