Un nouveau cycle pour le marché des déchets...
Philippe Gattet signe une étude approfondie de 400 pages dédiée au marché des déchets, intitulée « Le marché de la gestion des déchets à l’horizon 2015 – Repenser la chaîne de valeur pour pérenniser les performances », dont nous vous présentons ci dessus les principaux enseignements ; ce travail est publié par Xerfi-Précepta...
Dans ces conditions, les experts de Xerfi-Precepta prévoient une progression de 2% par an du chiffre d’affaires du secteur entre 2013 et 2015, soit un rythme deux fois moins élevé qu’avant 2008 (+3,4% par an). Dans un tel contexte, le traitement et la valorisation des déchets revêtent une importance particulièrement stratégique pour les opérateurs afin de s’assurer une croissance de leur activité et in fine de leurs marges.
La modification des règles du jeu dans le secteur a logiquement pesé sur les résultats financiers des professionnels. Selon l’analyse de Xerfi-Precepta sur un échantillon représentatif, leur taux de performance opérationnelle a reculé de 1,6 point depuis 2004 pour s’établir à 5,1% en 2011. Les ratios de rentabilité se sont également érodés. La rentabilité financière (RN/fonds propres ou ROE en anglais) a diminué de près 3 points pour tomber à 13,6%. Quant à la rentabilité des capitaux engagés (ROCE en anglais), elle a reculé de plus de 4 points entre 2004 et 2011. Une tendance qui se vérifie également chez les deux ténors historiques. Et les prévisions de Xerfi-Precepta sur le secteur à l’horizon 2015 font état de résultats en légère amélioration mais inférieurs à leur niveau d’avant 2008.
La création de valeur s’est déplacée...
Le Grenelle Environnement et le développement des filières REP (recyclage spécifique des D3E, des plastiques, des VHU, des papiers-cartons, des piles, etc.) ont créé une rupture dans le marché des déchets. D’une part, la marge se fait peu à peu au niveau de la valorisation (négoce de matières premières secondaires notamment) et de moins en moins dans la collecte ou l’élimination (phase de traitement). D’autre part, les clients (entreprises comme collectivités locales) souhaitent réduire leur empreinte environnementale en demandant à leurs prestataires de leur fournir des services à faible teneur en carbone. Ces évolutions ont au final des répercussions sur l’ensemble des activités de la filière des déchets :
en amont, la collecte traditionnelle (le coeur de métier) est arrivée à maturité, obligeant les entreprises à maîtriser parfaitement ces services et à « innover » (utilisation de camions fonctionnant avec des biocarburants, mise en place d’une collecte pneumatique comme à Romainville, pesée des déchets par logement, gestion de la facturation de la TEOM à la place de la collectivité, etc.) afin de réduire les coûts pour rester compétitif. Ils doivent aussi répondre à la demande de leurs clients en matière de collecte sélective. Une activité qui est plus génératrice de valeur ajoutée et particulièrement stratégique pour les opérateurs souhaitant développer en aval une activité de négoce de matières recyclées. Enfin, la gestion des ressources humaines est également déterminante dans cette activité ;
en aval de la gestion des déchets, la valorisation est clairement devenue la phase où se crée la valeur. La valorisation matière ou énergétique permet de faire du déchet une matière première qui peut donc être revendue sur le marché. Ce développement modifie d’ailleurs les sources de revenus des entreprises qui proviennent peu à peu plutôt des industries aval (qui achètent les déchets valorisés pour les réutiliser) et de moins en moins des producteurs de déchets. Les activités de négoce représentaient en 2010 un peu plus de 10% du chiffre d’affaires de notre échantillon, contre moins de 5% en 2004. Mais le développement de la valorisation ne signifie pas que les modes de traitement traditionnels vont disparaître. L’incinération et les centres de stockage resteront à moyen terme des exutoires incontournables en France.
Bémol sur la croissance externe
A court et moyen terme, les grandes opérations de croissance externe des deux leaders dans le recyclage sont bel et bien terminées. La priorité pour Veolia et Suez est désormais à la génération de cash et à la consolidation des activités (recentrage, réduction de coûts).
Sauf dans la valorisation, et en particulier dans le négoce de matières premières secondaires, la croissance interne sera également le mode de développement privilégié par les opérateurs de second rang. Certains groupes sont en effet endettés, à l’image de Saur ou de Séché.