USA : faudra-t-il bientôt payer plus cher pour recycler?
Le tri, c'est bien : pour autant, il faut disposer de suffisamment de filières industrielles de recyclage, ou bien savoir et pouvoir exporter. De longue date, les USA dépendent du marché chinois, qui a capté tout ce dont il a eu besoin, jusqu'à ce que l'on change de braquet : la Chine est désormais récalcitrante avec les matières made in USA, affirmant qu'elles sont trop "contaminées". Et ça change la donne sur le territoire de l'exportateur américain, surtout lorsqu'on sait que la Chine a acheté, en 2017, plus de la moitié des déchets recyclables exportés par les Etats-Unis.
Des centres de tri, aux Etats Unis, se retrouvent avec un problème coton à gérer : au lieu de vendre les déchets triés, ces installations pourraient se retrouver à devoir payer pour s'en débarrasser... C'est le cas de l'usine de recyclage de l'agglomération de Baltimore-Washington qui doit payer pour évacuer papiers et plastiques triés, alors qu'il n'y a pas encore longtemps, on en tirait une source de revenus...
On a embauché davantage de personnels, et également ralenti le rythme des machines, de sorte à organiser un tri plus strict. Mais les nouveaux taux d'impuretés admis semblent difficilement compatibles avec les technologies américaines actuelles, qui sont à la peine pour satisfaire des taux d'impuretés aussi bas. Aussi, les professionnels outre-Atlantique, sont nombreux à considérer que d'ici 2020, presque toutes les catégories de déchets seront refusées. Le choc est rude...
A Elkridge, l'usine arrive encore à vendre son PET (bouteilles en plastique) à un acheteur en Caroline du Sud, et son carton à l'étranger... mais le papier et le plastique mélangés ne valent plus grand chose : elle paie des sous-traitants pour les lui reprendre.
Ailleurs aux Etats-Unis, des recycleurs se sont résolus à ne plus trier le plastique et le papier, qui finissent en enfouissement, même si personne « ne veut le dire à haute voix, car personne n'aime le faire », a confirmé à l'AFP, Bill Caesar, patron de WCA, société basée à Houston. D'autres entités très connues, telles que Republic Services et Waste Management ont admis « l'avoir fait ponctuellement, comme dans l'Oregon ». En Floride, des petites villes, ont tout bonnement cessé de collecter à part les déchets recyclables.
Car il faut se faire une raison : si d'autres pays tels que l'Indonésie, le Vietnam ou l'Inde, sont importateurs et peuvent absorber des quantités non négligeables, ils ne peuvent évidemment pas capter l'équivalent de ce qui était introduit sur les marchés chinois... loin s'en faut.
« La Chine a donné trop peu de temps au secteur pour s'adapter », constate avec quelque regrets, Adina Renee Adler, de l'Institute of Scrap Recycling Industries (ISRI) ; « nous aurons bientôt tellement de stocks que nous serons obligés d'en mettre de plus en plus dans les décharges, dès lors que nous ne pourrions trouver de nouveaux marchés », complète le président de la National Waste and Recycling Association, Darrell Smith.
Du côté des collectivités locales, on s'inquiète aussi et pour cause : nombreuses sont les villes qui ont misé et milité pour le zéro déchet et ou qui se sont donnés des objectifs ambitieux en matière de recyclage, et qui vont devoir un jour ou l'autre renégocier les contrats dédiés à la gestion des déchets municipaux, et à quel prix ? A Washington, « il en coûte désormais 75 $ pour recycler une tonne, quand le coût de l'incinération pour produire de l'énergie électrique ne coûte que 46$ (…) Il fut un temps où le recyclage était meilleur marché, mais ce n'est plus le cas », confirme Christopher Shorter, directeur des travaux publics de la capitale américaine : « il est à craindre que recycler coûte de plus en plus cher »... « il faudra donc clairement s'orienter sur l'éducation des trieurs pour limiter les erreurs de tri », afin de mieux maitriser les coûts.